Pour Isabelle Adenot, il convient de réfléchir sur le point de savoir « comment utiliser le numérique comme levier d’amélioration de notre système de santé, sans se dissimuler les freins représentés par le changement des pratiques professionnelles, les organisations et les coordinations ».
L’objectif du Salon City Healthcare 2024 était de faire se rencontrer et échanger tous les acteurs concernés : professionnels de santé, industriels, chercheurs, financeurs, entrepreneurs, start-up, collectivités territoriales, établissements de santé, associations de patients…
Au programme, cette année, figuraient, notamment, l’évaluation de la télésurveillance basée sur les preuves et l’utilisation du numérique pour accélérer les essais cliniques en France. Une place a été également réservée à l’officine.
L’avenir très numérique de l’officine en débat
En effet, un autre point fort de cette manifestation était la table-ronde consacrée à « La révolution du digital en officine », sous-titrée « les pharmaciens en première ligne ». Notre confrère Alain Guilleminot, président de l’URPS Pharmaciens Pays de Loire, y a évoqué les principaux enjeux numériques d’avenir pour la profession.
L’un des plus importants à ses yeux concerne l’évolution des logiciels métier, avec en premier lieu le passage des logiciels actuels de gestion d’officine (LGO) à des logiciels d’aide à la dispensation (LAD), qui seront les pendants des logiciels d’aide à la prescription (LAP) des médecins. « On pourrait ainsi par exemple imaginer que la simple introduction de la carte Vitale, avec notamment la prise en compte de l’âge déclenche automatiquement l’ouverture d’une page nous permettant d’interroger le patient sur la mise à jour de ses vaccinations. »
D’autres évolutions apparaissent également souhaitables « au-delà du DMP et de la messagerie sécurisée, comme le développement du dossier communicant en cancérologie ou DCC, alimenté par tous les intervenants ».
Avoir un accès rapide et numérique avec les prescripteurs représenterait une évolution importante
Alain Guilleminot
Alain Guilleminot cite également l’importance de l’interfaçage avec les logiciels des médecins généralistes et spécialistes, avec de multiples déclinaisons envisageables comme en ce qui concerne l’accès aux fiches patients dans le cadre d’une maison de santé pluridisciplinaire ou encore la télé-expertise. « Surtout en cancérologie, le pharmacien a souvent besoin d’entrer en contact avec le prescripteur ou l’infirmière afin d’obtenir davantage d’informations sur les traitements. Avoir un accès rapide et numérique avec les prescripteurs représenterait une évolution importante. On peut aussi imaginer que le pharmacien envoie directement à un dermatologue la photo d’une éruption cutanée. Tout cela reste à construire. »
Sécurisation, observance, accès aux soins
Parmi les autres sujets discutés lors de cette table-ronde, Alain Guilleminot a évoqué l’e-prescription dont il est espéré une stabilisation du circuit de la transmission des ordonnances (et donc une plus grande efficacité de la lutte contre les fausses ordonnances**), les piluliers numériques (amélioration de l’observance), la vente en ligne des médicaments (des réflexions sont en cours autour de la réalisation d’une plateforme « Ma pharmacie en France », qui, adossée à la Poste, serait ouverte à l’ensemble des officines), la téléconsultation conventionnée (aujourd’hui environ 1 200 officines la proposent) – dont le développement s’inscrira dans l’amélioration de l’accès aux soins, notamment en ce qui concerne les soins non programmés et les apports potentiels de l’intelligence artificielle.
« Les potentialités de cette dernière sont très nombreuses et diverses », conclut notre confrère. Parmi lesquelles il évoque le double contrôle de l’ordonnance en temps réel, la gestion de l’administration des vaccins – des algorithmes pourraient aider à identifier les patients nécessitant une mise à jour de leur calendrier vaccinal – une meilleure gestion des ruptures de stocks, une assistance à la prescription pharmaceutique, l’anticipation de la mauvaise observance des traitements ou encore l’analyse des data des officines qui pourrait concourir à mieux connaître régionalement les problèmes de santé des Français.
*Ancienne présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens.
**Depuis août dernier, en attendant la généralisation de l’ordonnance numérique, le téléservice Asafo (alerte sécurisée aux fausses ordonnances) est déployé sur tout le territoire national.
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