Une affaire digne d’un roman policier, selon l’avocat de la défense. « Cette escroquerie n’est pas à la portée de tout le monde. Elle fait appel à haut niveau de technicité », affirme Me Mathieu Masse, du barreau de Lille.
Courant 2015, une pharmacienne, jusqu’alors installée à Boulogne-sur-Mer, vient de vendre son officine pour un million d’euros, lorsque son époux, consultant son relevé de compte bancaire, constate, le 15 juillet, que 635 000 euros ont été prélevés à leur insu. Quelle n’est pas la surprise du couple quand il comprend que ce tour de passe-passe a été rendu possible par une modification de son adresse mail et par un piratage de son numéro de téléphonie mobile ! Mais surtout que le virement a dûment été opéré par sa banque, Orange Bank, émanation de l’opérateur de téléphonie Orange et de Groupama Banque, le 8 juillet 2015, et que la somme a été transférée, deux jours plus tard, sur un compte aux Émirats arabes unis !
Des complicités non dévoilées
La banque, couverte aux deux tiers par son assurance, rembourse cependant la somme à ses clients, tandis qu’une enquête sur la téléphonie permet d’appréhender un homme originaire d’Ile-de-France. Muni d’une adresse mail manipulée et se faisant passer au téléphone pour le couple, il est parvenu à convaincre la banque d’effectuer le virement au profit d’une société de Dubaï.
Le tribunal de grande instance de Boulogne l’a condamné, le 13 février, à indemniser la banque, à verser des dommages et intérêts aux parties civiles et l’a maintenu en détention. Il devra purger une peine de trois ans de prison ferme.
Pour autant, Me Mathieu Masse, conseil du couple, relève que de nombreuses zones d’ombre subsistent. Les investigations n’ont pas permis de lever le voile sur l’existence de certaines complicités, ni sur les commanditaires in fine de ce transfert de fonds. L’accusé garde le silence sur ses liens avec la société de Dubaï. Tout comme sur les indices qui l’ont mis sur la piste du couple.
Certes, comme le remarque l’avocat, tout un chacun est en mesure de s’informer sur les cessions de fonds, par le biais des publicités légales, notamment sur Infogreffe. Cependant, rien dans l’instruction ne laisse transparaître comment l’escroc a pu se procurer l’identité de la banque de la pharmacienne. Plus subtil encore, aucune information ne filtre sur la manière dont il a pu usurper la ligne du mobile de la pharmacienne pour passer ses instructions à la banque, au profit de la société de Dubaï. Et confirmer l'ordre à la demande de l’agent bancaire.
En l’état actuel des choses, une complicité avec un employé de la banque, en possession des données des cartes « SIM » pour obtenir un transfert de la ligne mobile, apparaît comme indéniable. Moins complexe en revanche, le changement d’adresse mail. En deux ou trois clics, il est en effet tout à fait possible d’usurper une identité sur le Web, en créant une vraie fausse adresse mail. « Un piratage basique qui fonctionne malheureusement très fréquemment et envers lequel les banques ne sont pas suffisamment vigilantes », regrette l’avocat.
Il tient cependant à rassurer la profession. L’escroquerie dont a été victime la pharmacienne est rare. Et ce n'est que par hasard qu'elle a été touchée.
Près de 40 % du chiffre d’affaires
Médicaments chers : poids lourds de l’activité officinale
Les concentrations continuent
Hygie 31, Giropharm : grandes manœuvres au sein des groupements
Valorisation et transactions en 2023
La pharmacie, le commerce le plus dynamique de France
Gestion de l’officine
Télédéclarez votre chiffre d’affaires avant le 30 juin