Officiellement autorisé et financé depuis le 16 mars dernier, le bilan partagé de médication a fait son entrée dans les officines. « Mais les formations ne nous expliquent pas comment réaliser cette nouvelle mission. Des confrères doutent de sa rentabilité qui, au-delà d’une heure par bilan, n’est plus certaine », explique Xavier Mosnier-Thoumas, pharmacien à Saint-Médard-en-Jalles (Gironde) et fondateur de mesoigner.fr (voir encadré).
D’où son idée de créer un logiciel encadrant l’entretien avec le patient pour éviter toute dérive chronophage. Un logiciel doté d’une l’intelligence artificielle, capable de synthétiser, mettre en forme, archiver et transmettre les informations collectées.
Réalisé en partenariat avec le CVAO*, ce logiciel vise à optimiser le travail du pharmacien, à aider le médecin dans sa relation avec le patient, pour renforcer l’efficacité des traitements et limiter les effets iatrogènes.
Poser un cadre à l’entretien
En pratique, le logiciel s’intègre dans un parcours en quatre étapes :
1 – Recueil d’informations par auto-questionnaire
Pour gagner du temps et poser un cadre au futur entretien, un questionnaire est adressé au patient volontaire par mail ou courrier. Il peut aussi le remplir à l’officine, sur une tablette mise à sa disposition.
En une dizaine de minutes, le patient répond à 30 questions : informations administratives, gestion des médicaments (qui s’en occupe, rangement), suivi du traitement, difficultés (avaler, constipation…), perception des traitements (efficacité, effets secondaires), observance, prescripteurs (généraliste, spécialistes…), médications occasionnelles (homéopathie, aromathérapie, compléments alimentaires…), habitudes de vie (sommeil, tabac, alcool…).
2 – Entretien à l’officine
Quelques jours plus tard, le pharmacien partage avec le patient la synthèse du questionnaire réalisée et éditée par le logiciel. Ensemble, ils en valident ou modifient chaque point.
3 – Analyse
Le pharmacien analyse ensuite les données recueillies, à la lumière des informations dont il dispose (nombre boîtes vendues) et avec l’assistance du logiciel qui lui donne accès à une foule de données de référence**. Il en tire sa synthèse : patient observant ou non, suggestions de changements (molécule, heures de prise, forme galénique…).
4 – Entretien conseil
Le pharmacien valide avec le patient cette synthèse qui est alors enregistrée par l’officine, envoyée à l’Assurance-maladie et au médecin traitant, toujours via le logiciel, compatible avec la plupart des systèmes équipant cabinets médicaux ou officines. Un dossier papier est imprimé pour le patient.
Rentabilité
Xavier Mosnier-Thoumas a déjà réalisé 15 bilans de médication avec ce logiciel. Chacun l’a mobilisé moins d’une heure. Un timing jugé rentable pour une mission rémunérée 60 € la première année et 20 € la seconde (30 en cas de changement de traitement).
« En France, l’Assurance-maladie estime à 3,9 millions le nombre de patients concernés***, explique-t-il. Cela représente 180 bilans par officine, soit 10 000 euros de marge. Bien sûr, on ne pourra faire venir tous les patients, mais je suis persuadé que l’on peut en atteindre de 30 à 50 %. »
Le 14 septembre, une vingtaine d’officines mesoigner.fr se sont lancées dans le bilan partagé de médication avec le logiciel que la start-up entend déployer**** bien au-delà de son réseau.
Reste à convaincre les médecins : « J’ai testé mes premiers bilans avec deux généralistes, rapporte Xavier Mosnier-Thoumas. Le premier a émis un avis positif, le second enthousiaste : « Enfin quelque chose d’utile ! » Nous visons 2 000 officines équipées de notre logiciel. Cela fera 2 000 voix auprès des médecins pour aller vers une pratique plus interprofessionnelle, dans laquelle l’officine connectée sera le « hub » de la santé de proximité. »
* Comité pour la valorisation de l’acte officinal (www.cvao.org).
** Banques de données officielles et textes de référence : guide des interactions médicamenteuses, liste médicaments broyables et écrasables, médicaments inappropriés pour les personnes âgées, stopp/start…
*** Personnes de 65 ans et plus, souffrant d’au moins une ALD, ou de 75 ans et plus, bénéficiant de traitements pour lesquels au moins cinq molécules sont prescrites pour une durée de six mois.
**** Abonnement officine au logiciel : 30 €/mois, 20 € pour les officines partenaires de mesoigner.fr
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