« LE TOP DU TOP DES DU, c’est l’orthopédie ! », affirme Armand Grémeaux, responsable du cabinet de recrutement Pharm-Emploi. « Les DU d’orthopédie sont toujours pleins à craquer un an à l’avance, quelles que soient les formules proposées pour le suivre. C’est rémunérateur pour la pharmacie. La mise en place d’un lit médicalisé, cela veut dire que des royalties tombent tous les mois. Imaginez pour dix lits médicalisés ! » De plus, la pharmacie ne peut délivrer d’orthèses sur mesure que si au moins un pharmacien est titulaire du DU d’orthopédie, qui concerne des produits aussi courants que des bas de contention sur mesure ou une ceinture lombaire. Pour autant, le diplôme universitaire, ou DU, ne fait que rarement partie des exigences des titulaires qui recrutent, selon Armand Grémeaux. Mais ils constituent un plus évident sur un CV, ainsi que dans la réponse fournie au patient. C’est ce qu’explique une pharmacienne adjointe du Pas-de-Calais. Bien que l’officine dans laquelle elle exerce ne soit pas spécialisée en orthopédie, elle utilise son DU au quotidien. « En pratique il m’est souvent utile pour bien conseiller la personne à appareiller, pour l’orienter au besoin, pour vérifier que la prescription est bien adaptée, pour prendre correctement les mesures. »
Devoir de formation.
D’autres diplômes universitaires ont un véritable intérêt, comme ceux dédiés à la mycologie ou la pharmacie vétérinaire. « À mon avis, ce sont des DU davantage recherchés en milieu rural, je pense que l’APR ne dira pas le contraire. Je travaille surtout sur la région parisienne et ce ne sont pas les spécialisations les plus recherchées », indique encore Armand Grémeaux. Effectivement, le DU en pharmacie vétérinaire est un bon point de départ pour Philippe Lépée, titulaire à Souvigny (Allier) et vice-président de l’Association nationale pour la pharmacie vétérinaire d’officine (ANPVO), même si le pharmacien qui s’y intéresse ne doit pas s’arrêter là. « Personnellement, je n’ai pas de DU de pharmacie vétérinaire, je me suis formé sur le tas. À part quelques exceptions, les molécules utilisées sont les mêmes en médecine humaine et en médecine vétérinaire, je considère donc que nos six années d’étude sont une base suffisante pour exercer. Mais cela n’empêche pas que nous avons le devoir de continuer à nous former. Le DU permet de sélectionner des gens susceptibles d’exercer une spécialité, mais ce n’est qu’un moyen parmi d’autres. Je donne la priorité aux personnes qui s’intéressent à tel ou tel domaine plus qu’à un diplôme. Mais comme je l’ai dit, un DU est un bon début pour montrer son intérêt. »
Philippe Lépée se passionne de son côté pour les thérapeutiques alternatives comme l’organothérapie (utilisation d’extraits d’organes tissulaires ou glandulaires d’animaux sains) et aimerait que l’un de ses collaborateurs connaisse le domaine. « Cela ne se limite pas à savoir ce que c’est, mais il faut qu’il sache faire du conseil qui sorte des schémas habituels. Le fait de s’intéresser à un domaine peu abordé à la faculté et qu’il montre une réelle curiosité intellectuelle sont des éléments importants. » Son conseil, qui vaut autant pour les adjoints que les préparateurs : devenir plus fort que le titulaire dans un domaine particulier, en adéquation avec l’offre de son officine.
Sauver la baraque.
Robert Pujol, titulaire nouvellement retraité mais toujours très actif dans la formation, est connu pour son expertise dans les plantes médicinales notamment. Et pour cause, il était en faculté de sciences naturelles option botanique quand il a eu besoin de connaissances supplémentaires pour étudier les plantes médicinales. C’est ainsi qu’il s’est retrouvé sur les bancs de la faculté de pharmacie. Conférencier émérite en botanique avant même d’exercer le métier de pharmacie, il a gardé cette passion pour les plantes tout au long de sa vie professionnelle et s’en est fait une spécialité. « Trouver des remplaçants a toujours été un problème. Il y avait carence de DU en phytothérapie, et c’est encore le cas aujourd’hui, peut-être même davantage car nombre de DU ont dû être fermés faute de participants. Même le DU sur le MAD est fermé depuis deux ans à Toulouse, car nous sommes passés de 60 à 3 inscrits du jour au lendemain. On constate une baisse de l’implication des pharmaciens dans la formation continue partout en France. La conjoncture de crise se répercute sur la formation. Un pharmacien sur quatre affiche une comptabilité dans le rouge et son souci premier n’est pas de se former mais de sauver la baraque », analyse Robert Pujol. Une répercussion qui touche autant les titulaires que les adjoints. « Il y a encore cinq ans, les pharmaciens étaient certains de décrocher un poste en sortant de l’école et pouvaient même faire de la surenchère. Aujourd’hui c’est terminé, ils sont déjà bien contents de trouver un poste, parfois avec des horaires incroyables… Ils ne peuvent pas, en plus, prétendre à passer un DU ! »
Néanmoins, il semble que des demandes se multiplient concernant une formation à l’éducation thérapeutique du patient. Robert Pujol travaille donc actuellement à la mise en forme et au contenu de ce futur DU. « L’éducation thérapeutique passe toute entière par le conseil, c’est donc la communication vers le patient qui importe. Mon approche est empathique et donc absolument pas commerciale. Je souhaite que cette formation soit opérationnelle à la rentrée prochaine. »
Diplôme en poche.
Côté ville, un autre DU doit être mis en avant, celui de diététique et de nutrithérapie. Alain Pestalozzi, titulaire à Avallon, dans l’Yonne, a pour sa part passé quatre DU. « J’étais fondu de diététique et de nutrithérapie à l’époque où j’ai passé le DU, puis je suis venue à la pharmacie vétérinaire par amour pour les chevaux, j’ai passé le DU d’orthopédie il y a peu par besoin, et, enfin, celui de médecine de catastrophe parce que je suis pharmacien commandant, chef des sapeurs-pompiers du SDIS de l’Yonne depuis 1991 », explique-t-il. À cela s’ajoutent un DESS d’administration des entreprises, obtenu à l’Institut administration des entreprises de Caen et un équivalent avec le diplôme de Management Studies de l’université de Coventry. Inutile de cacher que, pour Alain Pestalozzi, la formation continue est absolument indispensable. La partie diététique lui est apparue comme une évidence. « Je suis un généraliste de la santé et la nutrition fait partie des demandes santé des patients, ce qui est tout à fait légitime puisque nous assistons actuellement à une véritable épidémie de diabète. » Il s’est intéressé au DU de pharmacie vétérinaire par sa passion pour les chevaux et avoue que son intérêt était davantage personnel que professionnel, même s’il reconnaît que cela lui sert au quotidien. « Nous avons quatre à six demandes directement liées à la pharmacie vétérinaire chaque jour et nous dépassons la demande par notre conseil. » Le DU de médecine de catastrophe lui sert régulièrement dans ses activités de sapeur-pompier. « J’ai dû assurer plusieurs fois le fonctionnement d’un poste médical avancé, lors d’interventions importantes comprenant de nombreuses victimes. J’ai donc dû créer des structures et des organisations éphémères (pour une intervention) ou de longue durée (pour l’organisation du service). » Enfin, il est arrivé au DU d’orthopédie parce qu’il se rendait compte de ses lacunes au comptoir. « Je plafonnais à un certain niveau d’incompétence, il y avait tellement de choses que je ne savais pas. Heureusement que j’ai finalement passé ce DU. » Pour autant, Alain Pestalozzi souligne que la formation de type DU ne suffit pas, chacun doit encore et toujours approfondir par lui-même et travailler pour que ses connaissances restent à jour. « Rien de tel qu’une journée de congrès ou de formation pour la motivation. C’est un investissement en temps mais c’est passionnant. Cela vaut pour tous, il faut toujours aller chercher ailleurs des connaissances, des intérêts. Ce n’est pas parce qu’on a son diplôme en poche que c’est terminé. »
Ouverture d’esprit.
Une doctrine qu’Alain Pestalozzi applique dans ses recrutements. L’un des pharmaciens de son officine a complété sa formation initiale à l’Institut de contrôle de gestion. Un élément déterminant dans son embauche et dans son salaire. Son prédécesseur, resté cinq ans à ce poste, avait aussi une formation en gestion. « C’est le hasard qu’ils aient tous deux ce type de formation. Ce que je demande avant tout, c’est une formation valable et une ouverture d’esprit qui permette de continuer à s’enrichir. » D’ailleurs, le DU n’est pas la seule source de formation. « Il faut que toute formation oblige à se réapproprier les choses, à se poser des questions. Pour mon DU d’orthopédie, j’ai choisi de faire mon stage dans un centre de rééducation où se trouvaient des tétraplégiques. J’ai appris beaucoup humainement et professionnellement. »
Les thèmes abordés par des DU sont nombreux et différents d’une faculté à l’autre, bien que les sujets classiques comme l’orthopédie ou le MAD (maintien à domicile) sont récurrents. Homéopathie, aromathérapie, médicaments et grossesse, ou même pharmacie humanitaire sont accessibles à tous les diplômés. Développé par PAH (Pharmacie et aide humanitaire), ce DU est proposé par la faculté des sciences pharmaceutiques et biologiques de Caen (Basse-Normandie). L’objectif est d’apporter une compétence en action humanitaire et de permettre aux pharmaciens d’assurer une logistique pharmaceutique efficace. La formation théorique dure quatre semaines pleines en septembre et doit être suivie d’un stage pratique en mission de 3 à 6 mois.
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