Pour s’assurer d’une dispensation réalisée dans les règles, le pharmacien n’a plus à consulter ses dictionnaires ; il peut trouver ce qu’il recherche dans les bases de données médicaments. Intégrées directement aux Logiciels de gestion d’officine (LGO), elles doivent transmettre des données digestes et immédiatement lisibles par le pharmacien. Bien sûr, elles sont mises à jour quotidiennement par télétransmission et en temps réel. Ces bibliothèques numériques, comme Vidal, Claude Bernard ou encore Thériaque, sont devenues des indispensables de la pratique officinale pour sécuriser le traitement. Leur intégration dans les LGO est un acquis depuis de nombreuses années déjà.
Sécuriser la dispensation
Ce n’est pas un secret, les missions du pharmacien sont nombreuses, et il jongle souvent entre diverses problématiques à gérer à l’officine, sans parler du manque de temps pour accomplir ces missions. L’accès à l’information liée au médicament se doit donc d’être limpide. « Sur cette partie, nous devons donc être toujours plus précis, rapides, de façon que le patient reparte avec une information claire sur le traitement qui lui a été fourni et puisse effectivement le prendre correctement et en toute sécurité », explique Anne Bertheau, responsable des Solutions libérales chez Vidal. Pour répondre aux besoins, les éditeurs de ces bases de données s’extirpent des outils traditionnels de l’officine et collaborent avec d’autres acteurs que les éditeurs de LGO, comme des MedTech. Et ce, afin de s’adapter aux nouvelles missions du pharmacien liées à la sécurisation du traitement. Ces entreprises, toutes en concurrence, redoublent d’efforts pour faire évoluer leurs solutions et répondre ainsi à un nombre toujours plus grand de cas d’usage.
En complément de l’utilisation sur logiciel, la base Claude Bernard est disponible sur tablette et smartphone
Traditionnellement présentes sur le LGO, elles se déploient désormais sur d’autres plateformes via des solutions dédiées, reposant sur les capacités originelles des bases de données. « Chez Claude Bernard, nous travaillons actuellement sur la conciliation médicamenteuse au niveau de l’hôpital, mais aussi en pharmacie au cours de l’entretien pharmaceutique, afin d’aider le médecin et le pharmacien à adapter au mieux le traitement par rapport au profil du patient », décrit Christophe Descamps, directeur de Claude Bernard.
Sur le bilan partagé de médication, Posos, qui a reçu l’agrément de la Haute Autorité de santé (HAS) pour sa base de données médicamenteuse en janvier dernier, a développé avec Viatris un outil qui complète leur solution de bilan partagé de médication automatisée : baptisé Medinfo, il analyse instantanément les interactions et contre-indications selon le profil du patient. Ledit outil, payant, fournit, entre autres, « une analyse instantanée des traitements du patient contextualisée à son profil et aux sources médicales et pharmaceutiques de référence », détaille un communiqué.
Autre axe de développement : la mobilité. En complément de l’utilisation sur logiciel, la base Claude Bernard est disponible sur tablette et smartphone par exemple. Comme d’habitude, il est possible de consulter les informations de 400 000 médicaments et produits de santé, de contrôler les ordonnances et les posologies, et d'afficher des monographies. À cela s’ajoute un outil de contrôle et de scan d’ordonnances, afin de détecter les risques potentiels entre les médicaments et le profil du patient. Vidal propose sensiblement le même outil avec Vidal Mobile. Ces applications, en plus d’attirer éventuellement des utilisateurs de la concurrence, rendent accessibles la plupart de ces services directement depuis un appareil mobile. Elles souffrent toutefois d’une limite, car bien qu’équipées de la plupart des fonctionnalités des bases, la recherche d’alternatives thérapeutiques n’intègre pas les dossiers patients et ne permet donc pas de sécuriser la dispensation avec la même précision que le LGO.
L’IA au service du bon usage du médicament
C’est aussi en exploitant les évolutions technologiques les plus récentes que ces services tentent de se renouveler. L’intelligence artificielle fait les choux gras de la presse depuis l’arrivée de l’intelligence générative (GenAI), symbolisée par la disponibilité de ChatGPT depuis novembre 2022. Mais l’IA n’est pas nouvelle pour ces bases de données qui s’en servent depuis des années pour améliorer la pertinence des résultats, « grâce à l’analyse massive de données, la personnalisation des recommandations, la détection des interactions, la maintenance et les mises à jour automatiques afin d’assister les équipes scientifiques dans leur travail quotidien de recherche et d’analyse – une tâche fastidieuse », décrit Christophe Descamps, directeur de Claude Bernard. En toile de fond, l’objectif consiste à faire en sorte que les LGO soient interfacés avec une base de données qui renferme des informations actualisées, exactes, de qualité et fiables.
Même son de cloche chez Vidal. « Nous utilisons l’algorithmie depuis plus de dix ans pour nous aider à indexer toute la matière, mais toujours avec une supervision humaine », décrit Cécile Carron de la Carrière, directrice Stratégie Marketing & Communication de Vidal. Comme chez Claude Bernard, des dizaines de développeurs et de data scientists monitorent des outils de machine learning, afin d’aider les pharmaciens et scientifiques à saisir de l’information et alimenter la base de données médicamenteuses plus rapidement et avec des informations toujours plus pertinentes. La confiance envers l’IA n’est donc pas totale…
Des annonces à SantExpo
Et la GenAI dans tout ça ? Des systèmes d’IA capables de générer du texte, des images ou autres, en réponse à des prompts… Eh bien oui, les Vidal, Claude Bernard et autres planchent tous sur le sujet. Difficile toutefois de leur tirer les vers du nez, car, si le sujet est bien sur la table, les solutions ne sont pas encore sorties du carton. « Nous présenterons des choses à Santexpo », nous explique-t-on chez Vidal, qui travaille à l’amélioration de son moteur de recherche pour apporter, à l’aide de l’IA générative, une réponse aux patients directement au comptoir. « Mais sans tomber dans les travers que l’on peut rencontrer avec les IA généralistes », assure la directrice marketing. À comprendre, les hallucinations, ou des données insuffisamment sourcées. Vidal va présenter à SantExpo les résultats d’une proof of concept d’une IA générative, basée uniquement sur des données Vidal vérifiées et des sources validées et partagées, pour répondre aux questions en langage naturel que se pose un professionnel de santé sur le médicament.
Arrivée plus récemment sur le marché de l’officine, Thériaque, banque de données intégrée aux officines de ville depuis son rapprochement avec Synapse Médecine en mai 2022, entend pousser l’exploitation des systèmes Natural Language Processing (NLP), ou Traitement automatique du langage naturel, via la GenAI et confirme au « Quotidien du pharmacien » que le sujet est bien inscrit dans la roadmap produit.
En parallèle, « nous développons des briques fonctionnelles à destination des LGO notamment (Thériaque n’est pas intégré nativement aux LGO d’officine, mais embarqué dans les widgets/extensions d’application de Synapse, contrairement à Vidal ou Claude Bernard). » Quid desdites briques en développement pour l’officine de ville et des partenaires de Thériaque ? L’entreprise ne souhaite pas s’épancher sur ses nouveaux partenariats et outils pour le moment. Ceux-ci devraient toutefois répondre à des usages liés aux nouvelles missions du pharmacien, notamment aux bilans de médication, à la bonne prise en charge des patients et à l’information sur des médicaments spécifiques, comme les anticancéreux. Sans plus de précision. « La brique innovation consiste à apporter de la donnée extrêmement ciblée ; il y a aussi du recours à l'IA pour produire des recommandations très personnalisées pour le patient », glisse Vincent Depras, directeur général de l’entreprise.
Travailler sur des sources vérifiées
De l’IA, encore de l’IA. Thériaque est à bonne école, car Synapse Médecine en a fait le fer de lance de son outil Synapse Copilote. Celui-ci illustre ce qu’il est possible de produire comme fonctionnalités avec l’IA et la montagne de données exploitables dans les bases de données médicaments. Présentée en novembre dernier, cette solution permet, grâce à des algorithmes de traitement du langage naturel « aux professionnels de santé de gagner du temps et d'améliorer leur confort lors de la prise de décision médicale », écrit l'entreprise bordelaise sur son site internet. Certaines fonctionnalités font directement écho à ce qu’autorisent traditionnellement les bases de données produits en matière d’observance, d’aide à la décision, de veille médicale, etc. Les algorithmes permettent ainsi de rester informé des dernières informations médicales, via une veille automatisée, de générer des conseils thérapeutiques personnalisés ainsi que des documents de suivi et des plans de surveillance.
Des bases qui communiquent aussi avec le patient
Les bases de données médicaments déploient aussi des outils aux mains des patients. Vidal, par exemple, a présenté, en novembre 2022, son application compagnon Vidal Ma santé, disponible dans le catalogue de Mon espace santé, mis en place par l’Assurance maladie et le ministère de la Santé, pour accompagner quotidiennement le patient dans son parcours de soins. En pratique, il suffit de scanner les codes des boîtes de médicaments, d’enregistrer ses traitements et ses ordonnances pour avoir accès aux différentes fonctionnalités proposées. L’appli est enrichie d’un système d’alertes médicamenteuses, d’un agenda de rappel, et donne accès à des informations fiables, vulgarisées, sur un médicament.
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