Plusieurs études italiennes font déjà état d'une surmortalité des patients BPCO au sein des cohortes de patients Covid+. Il est toutefois possible que cela ait été dû aux tensions sur le système de santé et la pénurie de professionnels de santé. « Les patients mouraient car on n'était pas en mesure de les mettre sous ventilation mécanique », expliquent les chercheurs du University College de Londres, auteurs d'une méta-analyse sur le sujet, rappelant que « jusqu'à présent, les mécanismes particuliers qui pourraient justifier que la BPCO soit un facteur aggravant de la COVID-19 sont encore inconnus ».
En ce qui concerne le tabagisme, il est possible que la surexpression du récepteur ACE2 (utilisé par le SARS-CoV-2 pour pénétrer dans les cellules humaines) observée chez les fumeurs puisse augmenter le risque de sévérité de la pathologie.
Près de deux tiers de cas sévères en cas de BPCO
Pour explorer la réalité d'un surrisque potentiel de morbimortalité, les auteurs ont réalisé une revue systématique de la littérature, soit un total de 2 473 cas confirmés de Covid dans 15 études, dont 2 % de patients BPCO et 9 % de fumeurs. La sévérité étant définie dans l'étude par le décès, l'admission en unité de soins intensifs et/ou le recours à la ventilation mécanique, les formes graves représentaient 63 % des cas chez les 35 patients BPCO contre 33,4 % chez les patients non-BPCO, ce qui correspond à un surrisque statistiquement significatif.
Le taux de décès était de 7,4 % dans l'ensemble du groupe, mais de 38,5 % chez les fumeurs et de 60 % chez les patients atteints de BPCO. Environ 22 % des fumeurs et 46 % des anciens fumeurs présentaient des complications sévères. Par rapport aux non- et ex-fumeurs, ce risque était plus élevé de 45 % en cas de tabagisme actif.
Les auteurs reconnaissent qu'une limite de leur étude réside dans la faible proportion de fumeurs et de patients BPCO dans leur échantillonnage. Ils rappellent que les dernières séries chinoises font état d'une prévalence de BPCO de l'ordre de 13 % parmi les patients hospitalisés pour Covid-19. Ils estiment toutefois que leurs données plaident en faveur d'une meilleure prévention de l'infection chez les patients BPCO et les fumeurs.
Concernant le lien entre tabac et le risque d'être infecté par le SARS-CoV-2, les données de la littérature sont plus ambiguës. En avril dernier, le neuroscientifique Jean-Pierre Changeux et ses collègues ont émis l'hypothèse que le récepteur nicotinique de l'acétylcholine (nAChR) joue un rôle clé dans la physiopathologie de l'infection Covid-19 et que la nicotine est protectrice vis-à-vis du SARS-CoV-2. Trois essais préventifs et thérapeutiques ont d'ailleurs été lancés dans ce sens à l'hôpital de La Pitié-Salpêtrière (AP-HP), pour étudier l'effet de la nicotine sur l'infection Covid-19.