LE LIVRE qui paraît aujourd’hui, fait l’effet d’une nouvelle bombe en Ovalie. Sous le titre « Rugby à charge, l’enquête choc »*, Pierre Ballester met à découvert le système du dopage et ses pratiques à risques. Il décrit après les années amphétamines et corticoïdes, les années 2000 et « le tsunami des compléments alimentaires (…) bons, moins bons, inutiles, mauvais et les pires qui soient ». C’est pour faire barrage à ces trois dernières catégories que l’Ordre des pharmaciens et le ministère des Sports ont signé le 24 février dernier une convention visant à associer les pharmaciens dans la prévention du dopage lié à la prise de certains compléments alimentaires.
Contrôles positifs.
Car la pharmacie est le principal circuit de distribution du complément alimentaire. Un marché lourd de près de 77 millions d’euros et prometteur de belles performances avec des taux de croissance de 8 à 9 % **. Cependant, le pharmacien n’a pas qu’un rôle commercial à jouer dans cette nouvelle course. Il doit également en assurer l’arbitrage. En effet, selon les estimations officielles, un complément alimentaire sur cinq contient des substances dopantes, dont 15 % d’entre eux, des substances anabolisantes. Des chiffres contestés par le Synadiet, le syndicat national des compléments alimentaires : « 90 % des substances illicites sont des dopants sanguins et les 10 % restant sont des anabolisants qu’on ne peut trouver sur nos sites de production », affirme Nicolas Cappelaere, vice-président du Synadiet et P-DG des laboratoires Ineldea. Pour lui, il ne peut y avoir de contamination croisée à l’insu d’un fabricant.
Dans le doute, les sportifs professionnels, tout comme les amateurs, soucieux de ne pas voir leurs efforts anéantis par un simple contrôle, semblent s’en remettre de plus en plus à leur pharmacien. C’est en tout cas le constat des officinaux. « Nous sommes identifiés à deux titres, analyse Lucile Sublon, titulaire de la pharmacie de la Cité à Strasbourg. Le sportif en compet’ a peur du dopage. Il connaît les produits et les règles. Raison de plus pour se ravitailler en officine. » Quant à l’amateur, « il a peur d’Internet. Il vient à l’officine pour se rassurer », constate la pharmacienne qui ne s’approvisionne qu’auprès de laboratoires français. Elle affirme d’ailleurs que les produits distribués en pharmacie diffèrent totalement de ceux commercialisés dans les autres réseaux (Internet, magasins de sports…). « Nous ne sommes de toute façon pas démarchés par ces fabricants », déclare catégorique, la titulaire. Elle-même mordue de course à pied, Lucile Sublon dispense des conseils aux sportifs, essentiellement centrés sur la diététique.
Essai à transformer.
En effet, en matière de sécurité, les laboratoires ont fait le job, comme l’affirme Alban Maggiar, président de la Fédération européenne des laboratoires de compléments alimentaires (EHPM) et directeur général du laboratoire Carrare. Le travail des fabricants de compléments alimentaires a été de dénoncer les amalgames souvent effectués volontairement par les sportifs, pris la main dans le pot (belge), entre substances illicites et compléments alimentaires. D’ailleurs, rappelle le président de l’EHPM : « Les rares cas de produits contaminés par des substances dopantes n’étaient pas des compléments alimentaires mais des médicaments ou contrefaçons qualifiés abusivement de compléments alimentaires. » Il ajoute qu’aucun complément alimentaire français « n’a jamais été concerné par des contaminations avec des substances dopantes ». Du reste, environ 150 compléments alimentaires sont d’ailleurs clairement labellisés « non dopants » sur le marché hexagonal. Alors que le ministère des Sports brandit la menace de « nouveaux produits qui parviennent chaque année légalement sur le marché », Alban Maggiar renvoie aux réglementations de 2002, 2006 et 2011, à la charte de qualité régulièrement actualisée, et surtout à la norme Afnor (NVF94-001)*** à laquelle les fabricants ont contribué et qui est appliquée par six des dix fabricants français. Cette norme, qui n’existe dans aucun autre pays européen, est ce qu’il y a de plus abouti. « Nous invitons les pharmaciens à repérer sa mention sur la boîte du produit et surtout à veiller à ce que leurs fournisseurs la respectent », recommande Nicolas Cappelaere.
Avec la convention, l’Ordre et le ministère ont prévu un passage de témoin. Une série d’outils conseils (affiches, plaquettes), issus de la coopération entre le Comité d’éducation sanitaire et sociale de la pharmacie française (Cespharm) et le ministère des Sports sera mise à disposition des officines. La piste est bien préparée. Il ne reste aux titulaires qu’à s’y élancer.
** Sources Ospharm juillet 2013 à juin 2014.
*** Concerne tous les produits pouvant être consommés par un sportif.
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