TRAITEMENT des plaies, compression médicale, appareillage en traumatologie, rhumatologie et rééducation, auto-injection du diabétique, incontinence et stomie : voici les principales familles de dispositifs médicaux (DM) que le pharmacien est amené à délivrer régulièrement. Mais pas seulement. Certains se sont spécialisés dans l’accompagnement du malade à domicile et peuvent aussi fournir des lits médicalisés ou des fauteuils roulants. Des seringues à la gamme blanche en passant par du matériel bien plus imposant, le marché du DM à l’officine est difficile à définir. D’autant que, depuis quelques années, de nouveaux DM apparaissent, à la frontière du médicament. C’est le cas, par exemple, de sprays nasaux ou de compléments alimentaires qui choisissent ce statut pour différentes raisons, notamment pour accéder au marché plus facilement ou pour communiquer sans contrainte réglementaire.
Ce marché particulièrement éclaté donne du fil à retordre à toutes les instances qui se penchent sur ses contours. Un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), en 2010, précise en effet qu’il comporte « des produits variés et fort nombreux (entre 800 000 et 2 millions) » et que « la structuration du secteur reflète cette hétérogénéité », avec aussi bien de très petites entreprises, notamment dans les domaines de l’orthèse et du grand appareillage orthopédique, que des multinationales. Selon l’étude référence du Pôle interministériel de prospective et d’anticipation des mutations économiques (PIPAME), le marché français en 2009 était évalué à 19 milliards d’euros pour 1 079 entreprises employant 64 000 collaborateurs, le marché mondial étant de 200 milliards d’euros.
De plus, les définitions utilisées sont loin d’être limpides, même dans les textes de référence. Autre difficulté : à quelques exceptions près, les pharmaciens partagent le monopole de la vente des DM avec des prestataires de service divers. Résultat : il n’existe aucune donnée chiffrée consolidée concernant le marché du DM vendu en officine. Néanmoins, le baromètre Celtipharm 2013 sur les produits du selfcare propose un focus sur les DM vendus en pharmacie hors prescription, sur un panel de 3 000 officines. Ainsi, les ventes de DM en valeur, hors prescription, en officine, sont évaluées à 621,7 millions d’euros pour l’année 2013, soit une progression de 4,3 % par rapport à 2012. Ce qui représente 79,3 millions d’unités (+1,5 %).
Innovations constantes.
Sur le marché du DM officinal non prescrit, c’est le laboratoire Hartmann qui est largement leader (près de 10 % de parts de marché) grâce à la place qu’il occupe dans l’incontinence (voir « Le leader à la loupe » ci-contre) et les bons résultats obtenus dans le soin des plaies et l’autodiagnostic. Il est suivi par la marque Urgo, spécialiste du marché des premiers soins et connu pour des innovations constantes dans ce domaine. Présent avec toute une gamme de sparadraps, compresses, antiseptiques, filets de maintien, bandes et pansements, Urgo a aussi développé des solutions spécifiques récompensées pour leur qualité innovante (crevasses, ampoules, verrues, mycoses, cicatrices, aphtes…). Numéro trois sur ce marché, Omega Pharma se caractérise par le très grand nombre de marques qu’il déploie. Parmi les dispositifs médicaux proposés, le groupe met en avant sa gamme Predictor (tensiomètres, thermomètres, tests d’ovulation et tests de grossesse), ainsi que ses produits minceur. En effet, les références Bloqueur de glucides, Capteur de graisses et Réducteur d’appétit, sont des DM utilisables dès lors que l’IMC de l’utilisateur est au moins de 18,5. Omega Pharma est aussi présent sur ce marché avec sa marque Addax Expert, qui propose des solutions réparatrices pour les crevasses, les ampoules et les callosités. Enfin, la Cooper obtient également de très bons résultats grâce à une position forte dans plusieurs domaines. Sa marque Pouxit est ainsi leader du marché des traitements antipoux (34 % de parts de marché en volume, soit une progression de deux points en cumul mobile annuel à février 2014). La gamme Actipoche, dans la thermothérapie, domine son segment avec 18,8 % de parts de marché en volume (+ 3 points). Les thermomètres Torm font également office de leader dans leur domaine (23 % de parts de marché, en progression de 3 points). Les marques Suretest (tests de grossesse et d’ovulation), Salva (ceintures de soutien lombaires) et Osmosoft (traitement des coups de soleil) sont chacune numéro deux de leur segment.
DM remboursés en hausse de 5,1 %.
Du côté des DM en ville prescrits et remboursés, l’Assurance-maladie rappelle que « la dépense consacrée est particulièrement dynamique », représentant 5,25 milliards d’euros en 2012 (+5,1 %). Ainsi, « les remboursements consacrés aux dispositifs médicaux ont crû deux fois plus rapidement que l’ensemble des soins de ville. En conséquence, sur le seul champ du régime général, la LPP (liste des produits et prestations) contribue pour près de 24 % à la croissance des soins de ville ». De plus, d’après la classification de la CNAM qui regroupe les produits de la LPP en catégories homogènes (soit en fonction de l’anatomie, soit en fonction de la thérapie ou du besoin), tous les types de DM « ont connu une croissance de la dépense en 2012 ». Les segments qui concentrent les plus fortes dépenses sont les dispositifs de l’appareil respiratoire, ceux consacrés à l’autocontrôle et à l’autotraitement du diabète, ainsi que les appareillages orthopédiques externes. Quant aux DM utilisés dans le cadre du maintien à domicile, activité en forte progression, ils représentent près de 80 % de la dépense en 2012.
Le panel Pharmastat (14 000 officines) du cabinet IMS Health indique pour sa part que le DM remboursé connaît une progression de 5,8 % de son chiffre d’affaires, à 2,3 milliards d’euros, pour l’année 2013. « Le pharmacien n’a pas de monopole sur ces produits qui sont aussi distribués par d’autres prestataires. Pourtant l’officine est largement concurrentielle et la plupart des références de la LPP ne subissent aucun dépassement de tarification. D’ailleurs, un certain nombre de produits sont soumis à un prix limite de vente. Enfin la largeur de l’offre mérite d’être rappelée : le pharmacien peut proposer tous produits, du lit médicalisé au déambulateur, de la canne au petit appareillage, etc. », souligne Fabrice Camaioni, membre du bureau de la fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) rattaché à la commission exercice professionnel, en charge notamment de la LPP, et vice-président de l’Union nationale des prestataires de dispositifs médicaux (UNPDM).
Pour les DM prescrits, Fabrice Camaioni note le succès de certaines classes, comme l’oxygénothérapie, la nutrition entérale, la compression médicale et veineuse, les orthèses… « Cela coûte de plus en plus cher à la collectivité. Le Comité économique des produits de santé (CEPS) a d’ailleurs pour mission de dépoussiérer la nomenclature de la LPP et de revoir des prix à la baisse. »
L’un des problèmes rencontrés par les officinaux sur ce marché n’est pas en soi l’absence de monopole sur les DM, mais plutôt une pratique encore trop courante de captation de marché avant même la sortie d’hôpital des patients qui vont avoir besoin de matériel médical à domicile. « On se bat contre ce phénomène, notamment à la FSPF et à l’URPS Pharmacie de Champagne-Ardenne. Notre action a porté puisque l’ARS a envoyé un courrier aux hôpitaux pour rappeler les fondamentaux, à savoir l’appartenance des ordonnances aux malades et leur libre choix du fournisseur. Il y a eu un effet positif lors de la réception de ce courrier, mais la pratique n’a pas été éradiquée pour autant, en particulier dans le domaine de l’oxygénothérapie », ajoute Fabrice Camaioni. Les pharmaciens ne sont pas prêts à se laisser faire. C’est pourquoi différents dossiers ont été remis à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) depuis deux ans, afin de lutter contre ce captage illégal de patientèle.
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