Le traitement de l’hépatite C Sovaldi (sofosbuvir) du Laboratoire Gilead a focalisé l’attention du grand public. La société civile découvrait alors qu’un traitement de trois mois pouvait coûter 41 000 euros en France, que ce tarif est le plus compétitif négocié dans un pays dit développé dans le monde et que ce médicament (et d’autres nouveaux antiviraux) étaient porteurs d’un espoir : la guérison pour la majorité des malades. Mais ce prix, jugé exorbitant par les patients, posait un nouveau risque jusqu’alors inconnu en France, celui de la sélection des bénéficiaires. Or le Sovaldi n’est qu’un médicament innovant parmi d’autres dans la vague porteuse que connaît l’industrie pharmaceutique. Ainsi, selon les projections des laboratoires, les 20 prochains anticancéreux devraient entraîner, pour la France, un surcoût de plus d'1 milliard d’euros.
Le débat du juste prix des médicaments a pris de l’ampleur avec la pétition lancée par des cancérologues en mars 2016, l’appel à la sauvegarde de l’accès aux médicaments par la Ligne nationale contre le cancer en avril, les inquiétudes exprimées en juin lors du congrès mondial sur le cancer (ASCO) face à des familles en faillite à cause du coût des traitements, en même temps que paraissait la campagne censurée de Médecins du monde en France. De son côté, le gouvernement a mis en place des mesures pour maîtriser les dépenses de santé. « Le poste le mieux maîtrisé de l’objectif national des dépenses de l’assurance-maladie (ONDAM) est celui des médicaments, pour lequel la moitié des efforts est supportée par les assurés sociaux, rappelle Catherine Pajarès y Sanchez, rapporteure de l’avis du CESE. Les lois de financement de la Sécurité sociale (LFSS) ont instauré des mécanismes de contribution basés sur le chiffre d’affaires des industriels. Mais l’arrivée de nouveaux médicaments innovants menace la soutenabilité du système de santé et pose la question de la sélection des bénéficiaires d’un traitement qui, pour les exclus, poussera à se fournir à l’étranger ou sur Internet avec les problèmes de sécurité sanitaire que cela pose. »
Attentes des patients
Dans un avis adopté mercredi dernier à 176 voix pour et une abstention, le CESE préconise la mise en place rapide d’études prospectives sur l’impact financier des traitements innovants dans les 10 ans, et de les intégrer dans le rapport annuel de la Cour des comptes sur l'application de la loi de financement de la Sécurité sociale. Il souhaite améliorer l’arbitrage financier qui ne fait, actuellement, pas de distinction entre innovation incrémentale et de rupture. Il propose d’étudier la pertinence et la faisabilité de remplacer les actuels SMR (service médical rendu) et ASMR (amélioration du service médical rendu) par un « indicateur thérapeutique unique », l’index thérapeutique relatif, comme le suggère la Haute Autorité de santé (HAS). Il ajoute qu’il est nécessaire de garantir la représentation des associations agréées dans l'arbitrage financier sur la prise en charge des traitements innovants, ainsi que celle des cotisants aux caisses d’assurance-maladie. « Il faut rechercher de nouvelles règles de fixation du prix des médicaments innovants, ce qui suppose de régler la question de l’évaluation en vie réelle, pour vérifier que la promesse du médicament est au rendez-vous et ainsi ajuster son prix. Cela nous permet d’aller vers des mécanismes de fixation de prix à la performance », explique Christian Saout, co-rapporteur. C’est pourquoi le CESE veut favoriser les évaluations en vie réelle tout en prévoyant un mécanisme de révision périodique du prix en fonction des résultats de ces évaluations.
L’instance émet aussi des recommandations au plan européen : harmoniser les méthodes d’évaluation, améliorer les échanges d’informations entre les pays pour garantir un meilleur prix, étudier l’idée d’une agence de fixation des prix et d’une centrale d’achat européenne. « Par ailleurs, le CESE soutient l’initiative internationale engagée par la France devant le G7, qui a fait inscrire dans une déclaration la nécessité de fixer les prix des médicaments en fonction des attentes des patients et de la soutenabilité des systèmes de santé », ajoute Christian Saout. Un juste prix qui garantirait aussi une juste rémunération aux laboratoires pharmaceutiques.
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