La sécurité routière est une problématique de santé publique. C’est Emmanuel Barbe, délégué interministériel à la Sécurité routière, qui l’affirme. Selon une étude de l’INSERM (voir ci-dessous), 3,4 % des accidents de la route mortels sont dus à la prise de médicaments. Une problématique qui préoccupe les autorités sanitaires depuis de nombreuses années. Le pictogramme sur les boîtes de médicaments qui peuvent influer sur la conduite d’un véhicule a vu le jour par un arrêté le 3 mai 1999. En 2003, l’Agence du médicament est chargée d’élaborer un pictogramme graduant le niveau de risque. C’est ainsi que, depuis 2005, trois pictogrammes de niveau 1 à 3 ornent certaines boîtes de médicaments, accompagnés d’une mise en garde écrite. Jaune : ne pas conduire sans avoir lu la notice. Orange : ne pas conduire sans l’avis d’un professionnel de santé. Rouge : attention danger, ne pas conduire. En 2008, le dispositif est entièrement opérationnel avec la publication d’un arrêté au journal officiel listant les médicaments concernés.
Mais les débuts prometteurs des pictogrammes de couleur ne se confirment pas dans la durée. En outre, depuis 2008, la liste des médicaments concernés n’a pas été réévaluée. Or, 250 nouvelles substances actives ont été mises sur le marché, dont 30 pour les seuls médicaments du système nerveux central (SNC). D’autres médicaments ont vu leurs indications évoluer ou ont disparu du marché, entraînant des reports de prescription. C’est dans ce cadre que l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a lancé une réévaluation, en commençant par les substances actives considérées comme les plus problématiques, les médicaments du SNC : « Nous avons fait un focus sur les benzodiazépines et apparentées car elles sont souvent impliquées dans les accidents de la route dus à la consommation de médicaments et l’ensemble de cette famille pharmaceutique est passé au pictogramme de niveau 3 », explique Nathalie Richard, directrice adjointe de la direction des médicaments en neurologie, psychiatrie, anesthésie, antalgie, ophtalmologie, stupéfiants, psychotropes et médicaments des addictions à l’ANSM. Cette première réévaluation n’est qu’une étape, l’ANSM ayant prévu de continuer ce travail sur d’autres familles de médicaments. Elle annonce d’ailleurs la parution d’autres arrêtés courant 2017 pour compléter la liste des médicaments dangereux pour la conduite d’un véhicule.
Responsabilité du conducteur
Cette nouvelle liste est parue au journal officiel du 18 mars dernier, signalant 33 nouveaux médicaments dangereux pour la conduite d’un véhicule et 16 autres dont le niveau de dangerosité a augmenté. Un timing parfait pour le lancement officiel, mercredi dernier, d’une campagne de communication grand public. Emmanuel Barbe, délégué interministériel à la Sécurité routière, Benoît Vallet, directeur général de la Santé et Isabelle Adenot, présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP) ont signé une convention pour renforcer la sensibilisation du grand public aux effets des médicaments sur la conduite de véhicules. Contrairement à l’alcool et à certaines drogues, il n’est pas possible de tester des conducteurs sous médicament lors d’un contrôle routier. En revanche, en cas d’accident, il est possible de réaliser une recherche de substances sur un prélèvement sanguin. La présence de pictogrammes sur les boîtes de médicaments implique la responsabilité du conducteur qui aurait passé outre les précautions d’usage. La question doit donc être impérativement abordée par les professionnels de santé avec leur patient, en particulier par le pharmacien lors de la délivrance de médicaments à risque. Afin de faciliter l’échange au comptoir, des outils sont mis à disposition des pharmaciens sur le site du Comité d’éducation sanitaire et sociale de la pharmacie française (CESPHARM) : une affiche ayant pour slogan « La sécurité sur la route commence sur votre table de nuit », une brochure grand public à remettre lors de la dispensation des médicaments concernés, une fiche mémo professionnelle et un court film d’animation diffusable sur les écrans des pharmacies qui en possèdent.
Pour la présidente de l’Ordre des pharmaciens, l’implication des pharmaciens est une évidence. « Il n’est pas toujours possible d’arrêter de prendre un médicament et même lorsque c’est possible, l’arrêt des effets du médicament n’est pas forcément immédiat, sans même parler de la prise simultanée de plusieurs médicaments. » De même, Isabelle Adenot remarque que médicaments et pathologie traitée doivent être associés pour délivrer les bons conseils. « On ne peut interdire de vivre aux patients sous traitement au long cours. C’est déjà suffisamment difficile d’être malade. Mais la présence d’un pictogramme permet d’ouvrir le dialogue, de donner des conseils. Il est vrai que les pharmaciens face à un patient qu’il connaisse, qui prend les mêmes médicaments depuis longtemps, voient leur vigilance baisser et c’est un tort. D’où cette piqûre de rappel par le biais de la campagne d’information. »
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