Que ce soit en termes d’accessibilité aux médicaments ou d’attractivité de son territoire, la France reste en retrait des meilleurs standards européens. Les délais de mise sur le marché sont loin d’être respectés et bien que le système d’accès précoce soit loué par l’ensemble des acteurs, il ne concerne que quelques molécules, et donc un nombre limité de patients.
Le cabinet Roland Berger, missionné par le LEEM, a livré les résultats du 1er Observatoire de l’accès aux médicaments et de l’attractivité en France. Premier enseignement : la disponibilité des nouveaux médicaments est « significativement moindre » dans l’Hexagone qu'en Allemagne, Italie ou Angleterre. Ainsi, seulement 49 % des médicaments ayant reçu une autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne entre 2018 et 2021 sont pleinement disponibles pour tous les patients français au 31 décembre 2022 et 17 % sont accessibles grâce au dispositif d’accès précoce. En Allemagne et en Italie, le taux de disponibilité grimpe respectivement à 87 % et 81 %.
Parmi ces médicaments indisponibles, près d’un tiers est en attente d’évaluation par la Haute Autorité de santé (HAS – délai d’évaluation médian de 140 jours) ou de négociation avec le Comité économique des produits de santé (CEPS – délai de négociation médian de 252 jours). Le délai légal européen prévoit un total de 180 jours que la France ne parvient pas à respecter. D’autant qu’il faut encore ajouter, après la fin de la négociation de prix, un délai administratif avant publication au « Journal officiel » de 110 jours en moyenne.
Pire, 69 % des nouveaux médicaments dont le prix n’a pas encore été publié au « Journal officiel » peuvent être considérés en impasse d’accès. En effet, « la négociation de prix se poursuit depuis plus de 500 jours », ce qui pose la question de « la probabilité de succès de la négociation au-delà de cette période ». Et le cabinet de citer le cas des « cinq dernières innovations de la classe des antipsychotiques ainsi que les trois nouveaux traitements de fond de la migraine, disponibles dans les principaux pays européens » mais pas en France. Au global, les patients français accèdent aux nouveaux médicaments en moyenne 380 jours après les Allemands, 179 jours après les Anglais et 72 jours après les Italiens.
Le dispositif d’accès précoce, réformé il y a moins de trois ans, permet de réduire le délai moyen d’accès en France de 295 jours. Néanmoins, rappellent les industriels, il ne concerne que des médicaments présumés innovants dans le cadre de maladies rares, graves ou invalidantes, lorsqu’aucun traitement approprié n’est disponible et qu’il y a urgence à traiter. Cet accès dérogatoire a concerné 51 000 patients entre sa mise en œuvre en juillet 2021 et mars 2023. En outre, 20 % des médicaments en accès précoce ont obtenu une amélioration du service médical rendu (ASMR) de niveau 5 (absence d’amélioration), en raison de données comparatives non disponibles au moment de l’évaluation, ce qui les conduit à une impasse d’accès puisqu’ils sont exclus de la « liste en sus » qui permet leur financement à l’hôpital par l’assurance-maladie.
Quant à l’attractivité de la France, elle reste encore toute théorique malgré l’ambition affichée du Président de la République d’en faire « la première nation européenne innovante et souveraine en santé ». Les industriels pointent en particulier « la complexité et l’imprévisibilité de la régulation » et « la pression budgétaire croissante ». De fait, les investissements sont restés stables en 2020 et 2021 et sont essentiellement consacrés à une augmentation ou une adaptation des capacités existantes. Résultat : la France est distancée par ses pairs européens dans la production de nouveaux médicaments, en particulier en ce qui concerne les médicaments biologiques et leurs biosimilaires.
Même si la situation française « n’est pas catastrophique » et que ce 1er Observatoire ne prend pas en compte les dernières annonces d’investissements en France, il « confirme qu’il y a une urgence médicament », souligne le président du LEEM, Thierry Hulot. C’est pourquoi les industriels attendent au plus vite les conclusions de la mission sur le financement et la régulation des produits de santé lancée par la Première ministre Élisabeth Borne, et qu’ils seront particulièrement attentifs aux mesures contenues dans le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), notamment sur les décisions budgétaires concernant le médicament.
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