Une charte, censée garantir « une disponibilité équitable des médicaments en tout point du territoire national en cas de tensions d’approvisionnement », a été remise le 22 novembre au ministre de la Santé. Signé par l'ensemble des professionnels de la production et de la distribution du médicament, ce document, disponible en ligne, aura-t-il des répercussions concrètes dans les prochaines semaines ?
Proposée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et le Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP) à l’ensemble des acteurs de la chaîne pharmaceutique, cette charte d'engagement comprend neuf mesures qui devront être appliquées sans délai par l'ensemble des signataires. Ces derniers devront notamment « s’informer mutuellement de manière transparente et régulière des disponibilités des médicaments à toutes les étapes de la chaîne pharmaceutique » et « entretenir un dialogue constant avec l’ANSM afin de mobiliser de manière adéquate les stocks disponibles des industriels pour assurer une couverture continue et équitable des besoins de la population ». Les industriels s'engagent à « prioriser les flux de distribution au profit des grossistes-répartiteurs pour une répartition équitable aux pharmacies ». De leur côté, les officinaux promettent de « garantir un niveau de commande n’excédant pas de façon déraisonnable le besoin de leur patientèle », et de « privilégier les commandes auprès de leur grossiste-répartiteur principal », notamment en renonçant à utiliser des outils de commandes automatisés et systématiques.
Toutefois, aucune mesure contraignante, et donc aucune sanction, n'est prévue par ce document en cas de non-respect des engagements. Les syndicats de pharmaciens veulent tout de même croire que la signature de cette charte aura des effets positifs dans les semaines à venir. « Nous sommes satisfaits d'avoir réussi à mettre tout le monde autour de la table en un temps record, rappelle Fabrice Camaioni, vice-président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). C'est un texte équilibré, qui porte des notions importantes comme la transparence ou l'éthique. L'un des objectifs pour les pharmaciens sera de cesser d'avoir ce réflexe de surstocker même si le ministre a admis qu'il comprenait ce comportement. Quand on a été confronté à des pénuries on peut être tenté de surstocker, mais si les grossistes ont des stocks suffisants il n'y a pas lieu de commander au-delà de ses besoins. » Fabrice Camaioni le concède, tout ne va pas changer du jour au lendemain. Néanmoins, les acteurs de la filière vont devoir très vite démontrer leur volonté de respecter les engagements précisés dans la charte. « D'ici à un mois il faut que la situation soit redressée. Sans les dévoiler, le ministre a indiqué que des mesures plus fortes seraient prises si la situation ne s'améliore pas, insiste-t-il. Début janvier, le PLFSS sera adopté au « Journal officiel » et de nouvelles prérogatives seront mises en œuvre, en particulier le renforcement du pouvoir de police sanitaire de l'ANSM. Cependant, il fallait trouver des solutions dès aujourd'hui. Nous sommes en novembre, le froid et les épidémies arrivent… Quand on voit les problèmes qu'il y a, notamment sur l'amoxicilline pédiatrique, il fallait agir rapidement. Les patients ne peuvent servir de variable d'ajustement », insiste Fabrice Camaioni.
À l’origine de l'idée qui a mené à la réalisation de cette charte, l'Union des syndicats de pharmaciens d'officine (USPO) espère que la signature de ce document servira de point de départ. « Il est très important que tous les professionnels de la production et de la distribution du médicament prennent des engagements, confirme Sonia Jouve, vice-présidente du syndicat. Cette charte, c'est le premier niveau. On attend dans quelques semaines la feuille de route du ministre pour l'hiver, l'idée c'est de procéder par étapes. Aujourd'hui, l'objectif est de restaurer la confiance dans le système », analyse-t-elle. Dans les prochaines semaines, les pharmaciens seront aux premières loges pour savoir si l'adoption de cette charte permet, bel et bien, de fluidifier le circuit de distribution des médicaments et de limiter ainsi les tensions d'approvisionnement.
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