À 45 ans, Mehdi Djilani n’a pas quitté sa chambre d’enfant. Elle est devenue le bureau d’où il dirige la pharmacie de Saint-Pierre-d’Oléron, créée par son père. Car chez les Djilani, la pharmacie est une histoire de famille.
Fils et neveu de pharmacien, en terminale, le jeune Mehdi hésite à peine : « J’étais attiré par l’aviation civile, indique-t-il, mais j’ai opté pour la pharmacie. » À la faculté de Poitiers, son amour du métier se développe : « Nos études sont passionnantes car elles offrent une approche très large des sciences*, permettant une prise en charge du patient dans sa globalité. » Il découvre aussi que la pharmacie ne mène pas qu’à l’officine. Il choisit la filière industrie, fait un double diplôme (DESS de recherche clinique et marketing pharmaceutique). En 5e année, il part au Burkina Faso travailler dans un programme de lutte contre paludisme. En 6e année, il envisage une mission d’étude en Bolivie sur les plantes médicinales, mais reste auprès de son épouse, pharmacienne, rencontrée sur les bancs de la fac.
De l’industrie à l’officine
En 1999, il rejoint l’industrie pharmaceutique : Synthélabo, Searle, Pharmacia, Pfizer. Chef de produit, formateur scientifique, il voyage dans les congrès internationaux, côtoie de grands médecins… « Une période passionnante » et une brillante carrière qu’il interrompt pourtant, lorsque son père lui annonce que la pharmacie de Saint-Denis d’Oléron est en vente.
Il hésite, mais son sang îlien, le désir d’élever une famille en province et l’envie d’être patron de ma propre entreprise prennent le dessus. En 2004, il est de retour sur son île. « Le changement est abrupt, avoue-t-il. Une commune rurale (1 200 habitants à l’année), un travail énorme, des gardes de nuit très chargées… Mais l’exercice est très valorisant, basé sur la proximité et la relation humaine en hiver, et sur une présence de premier recours en été. Ce double rythme est passionnant. »
Parallèlement, Mehdi Djilani fait carrière au sein des sapeurs-pompiers. Nommé commandant en 2016, il assure conseils et formations en matière de risques chimiques et biologiques. Il continue aussi de travailler avec des laboratoires pharmaceutiques, formant, par exemple, des pharmaciens au bon usage de médicaments quittant l’hôpital pour la ville. Enfin, son intérêt pour la transmission, l’amène à enseigner la neuropharmacologie à la faculté des sciences humaines (psychologie) de Poitiers.
Intelligence collective et convivialité partagée
En 2013, il rejoint réseau Totum qui réunit 200 officines indépendantes : « Chacun participe à la gestion et l’organisation du réseau, partage les bonnes idées, dans une totale transparence, explique-t-il. C’est de l’intelligence collective et de la convivialité partagée, tant au niveau national que local**. Le réseau nous fait grandir comme professionnel de santé et entrepreneur, dans un contexte exceptionnel, car le métier n’a jamais autant évolué que ces dix dernières années. »
Élu président du réseau Totum en 2018, Mehdi Djilani change d’officine en 2020. Il succède à son père, parti à la retraite, à la tête de la pharmacie de Saint-Pierre d’Oléron*** (son épouse conserve celle de Saint-Denis). Sa parfaite connaissance de l’île l’amène également à participer à la création d’une MSP multisites qui rassemblera bientôt 30 professionnels de santé de l’île.
Enfin, quand ses multiples activités lui laissent du temps, Mehdi Djilani aime se plonger dans des livres d’Histoire, pratiquer la course à pied sur la plage, la pêche à l’écluse, le kayak de mer ou le wakeboard. L’occasion de moments privilégiés avec sa chère Île d’Oléron.
* Mehdi Djilani aime rappeler la citation de Pierre Gilles de Gènes : « De par l’étendue de leurs connaissances, les pharmaciens sont parmi les rares personnes à pouvoir appréhender l'ensemble du monde réel ».
** 5 pharmacies de l’île d’Oléron sur 10 sont adhérentes au réseau Totum.
*** L’officine emploie 8 personnes dont 3 pharmaciens. Et un pharmacien supplémentaire en été, quand sa clientèle passe de 100 à 700 patients/jour.