LE 7 JANVIER, à 17 heures, dans la Salle des Actes de la faculté de pharmacie de Paris, était remis le grand prix littéraire de l’Académie nationale de pharmacie dans une ambiance singulière. L’assemblée avait en tête l’effroyable attentat de la matinée. Les visages graves clamaient en même temps leur fierté de récompenser un livre qui « pour la première fois a fait l’unanimité », a précisé Éric Fouassier, secrétaire du jury. Le psychanalyste Philippe Grimbert, président du jury, s’est enthousiasmé de ce « petit livre par la taille mais qui contient tout, à la fois le portrait du trajet d’un malade, juste, drôle, très humain, et un humour décapant à la manière de Charlie Hebdo… ».
Puis c’est au tour de l’auteur, Jacques A. Bertrand, de prendre la parole. Sur le choix de l’autobiographie, parce que « c’est un des genres les plus romanesques qui soit ». Et de conclure que « la littérature est utile, comme les caricaturistes sont utiles ». L’émotion est palpable. Tout est dit, simplement, à l’image de son livre. Un livre sur le cancer. Ça aurait franchement pu nous donner mal à l’estomac. Mais l’auteur, sur le fil, entre rire et larmes, n’a pas l’intention de « clouer son propre pylore au pilori ! » S’ensuit une description désopilante du fameux pylore, « valvule, mini-caisson de décompression, poste de douane », qui « décide si ça va passer ou non ».
Et justement, ça a du mal à passer. Les effets secondaires du traitement, les attentes interminables à l’hôpital, l’impression qu’être malade c’est perdre son identité. Le ton n’a pas été facile à trouver confie l’auteur. Le combat contre le cancer reste terrible. La distance et l’humour pour mieux faire passer la pilule. La plume de Jacques A. Bertrand fait des miracles. Pour la première fois, on se surprend à sourire du cancer ! La littérature comme remède à tous les maux. Pourquoi pas ? L’envie de raconter des histoires lui est venue à 10 ans, suite à une opération du genou. Le monde médical lui aurait donc donné sa vocation littéraire. Conscient aujourd’hui qu’il lui doit aussi la vie.