LA TROISIÈME édition du challenge « Reload My Pharmacy », organisé par l’Oréal Cosmétique Active, vient de récompenser le Strate College de Sèvres par le prix Reload International. Ce concours confronte des projets innovants conçus par cinq écoles de design européennes à partir d’exemples concrets d’officines. L’objectif est de proposer des idées novatrices, tout en répondant concrètement aux préoccupations actuelles des pharmaciens : l’interactivité avec les clients-patients, la création de nouveaux espaces plus ludiques, mais en insistant aussi sur la mission de conseil du pharmacien, et un positionnement le plus distinct et le plus compétitif possible par rapport à la concurrence. Ces projets réinventent de fait la pharmacie et la plongent dans l’économie digitale.
Inspiré des grandes forêts tropicales.
Une grille de critères d’évaluation a été imposée aux étudiants de chacune de ces écoles, qui ont d’abord organisé une compétition nationale avant de désigner leur champion au challenge international. L’équipe gagnante, Éva Chantre et Antoine Bousquet, étudiants en 5e année, a travaillé sur la pharmacie du centre Euralille, à Lille. Située entre deux gares, et face à l’hypermarché Carrefour, la pharmacie est confrontée à d’importants flux de clientèle. Malgré un espace cosmétique et un système de dépôt d’ordonnances bien organisés, la pharmacie devait travailler sur le manque de confidentialité, l’absence de signalétique et la gestion du trafic. Les deux étudiants ont créé le concept de canopée, inspiré de l’écosystème des grandes forêts tropicales, invitant à penser l’officine comme le poumon de la ville. « La pharmacie s’articule autour d’un tronc central, un passage sensoriel théâtralisant la dermocosmétique », expliquent-ils. Une table pour des tests de produits, une autre pour les eaux et une troisième sur laquelle il suffit de poser le produit pour avoir toutes les informations le concernant grâce à un système digitalisé, l’ensemble forme comme une étoile à trois branches au milieu de ce passage. L’espace se disperse ensuite entre plusieurs branches bien identifiées, un espace enfants, avec des écrans d’informations diverses, un espace conseil santé/premiers soins, un espace beauté et un espace de vente rapide pour les personnes pressées, relié à une vitrine digitale baptisée « walk drive » sur la façade extérieure de la pharmacie. Elles peuvent scanner leur ordonnance, sélectionner des produits de soin, tout cela en quelques clics et venir chercher immédiatement ou plus tard leurs commandes. Ce premier prix est récompensé d’une dotation de 6 000 euros.
Le jury, composé de spécialistes venant de l’Oréal et d’architectes designers indépendants, a également récompensé l’équipe néerlandaise, de Delft Technical University, en lui attribuant le prix du Jury. Ce projet « Benu Health » concerne une chaîne de pharmacies, quelque 200 points de vente aux Pays-Bas.
Son objectif, faire disparaître la notion de douleur et donner une vision positive de la santé, quitte à effacer le terme même de pharmacie. Très épuré, le modèle de pharmacies proposé est conçu autour de la gestion des commandes par alerte sur smartphone, le client circule ensuite dans l’officine, s’il le souhaite, peut prendre conseil dans des espaces un peu à l’écart, ou prendre un thé dans un coin réservé.
Ces deux projets, ainsi que les deux autres en lice, de l’Altoo University of Helsinki et de l’IDE Espana, (Politecnico di Milano était la cinquième école de design à concourir, mais n’a pu boucler à temps son projet), font la part belle à l’officine digitale, expérimentant ainsi le lien futur qui devrait se nouer entre les patients et les équipes officinales par le biais de l’usage des technologies les plus interactives.
Réenchanter l’officine.
Pour l’Oréal, ces projets ont l’avantage d’apporter une source d’inspiration nouvelle et de dynamiser le réseau de pharmacies qui distribuent les différentes marques du géant cosmétique, lequel parle de réenchanter le monde de l’officine. Les écoles avaient du reste comme l’un des critères principaux à respecter, la mise en valeur des espaces dermocosmétiques dans l’officine. Il reste cependant à concrétiser ces projets, très intéressants et innovants, mais pour l’instant éloignés de ce qui est mis en œuvre par les agenceurs. Par ailleurs, les organisateurs du concours réfléchissent à intégrer un chiffrage des projets parmi les critères à respecter, afin de leur donner une meilleure visibilité.