En février 2013, le Pr Philippe Even (désormais radié de l’Ordre des médecins) a publié un livre intitulé « la vérité sur le cholestérol », invitant les patients arrêter les statines.
« Ce discours n’a pas été sans conséquences », alerte l’Académie de médecine dans un rapport qui revient sur les études prouvant le bénéfice/risque très favorable des statines, surtout chez les patients à haut risque de maladie cardiovasculaire. En effet, selon une étude colligeant les données de plusieurs milliers d’utilisateurs de statines (données de l’assurance-maladie), le taux d’interruption de traitement par statine a augmenté de 26 % entre 2012 et 2013 chez les patients en prévention secondaire, et de 40 % chez les patients à risque cardiovasculaire modéré. L'étude montre que la mortalité globale a augmenté parmi ces deux populations. « Cependant, le lien de causalité immédiat entre la polémique et les interruptions de traitement reste difficile à prouver », reconnaît l’Académie de médecine.
Mais une seconde étude de l’assurance-maladie, en cours de publication, montre l’effet néfaste d’un arrêt des statines chez des patients à risque cardiovasculaire élevé. Cette étude a été menée chez des utilisateurs réguliers et depuis plus d’un an de statines en prévention secondaire (et donc à risque cardiovasculaire majeur). Chez les patients qui ont arrêté les statines, le risque de décès ou d’événement cardiovasculaire non fatals dans les trois mois suivant l’arrêt a été trois fois supérieur à celui des patients qui n’avaient pas arrêté leur traitement. Cette augmentation de la morbimortalité était moins importante chez les patients à risque cardiovasculaire modéré ou faible.
Alerter les patients
« Ces données confirment que l’arrêt des statines chez les sujets à haut risque cardiovasculaire (soit en prévention secondaire soit en prévention primaire) est délétère et il convient d’informer la population du risque encouru dans ce contexte », conclut l’Académie. Autrement dit, les statines sont indispensables quand le risque de faire un accident cardiovasculaire est élevé ou très élevé : leur bénéfice est majeur et largement supérieur au risque d’effets indésirables (atteintes musculaires, diabète).
En revanche, « donner une statine à quelqu’un qui présente un risque faible est certes associé à une réduction de la morbimortalité, mais cette indication est considérée comme peu utile en raison du nombre de patients à traiter pour éviter un événement et en raison de son coût », estiment les Académiciens. Pour les patients à risque intermédiaire, la décision est à prendre au cas par cas.