Le 10 octobre, l'Union nationale des professionnels de santé (UNPS) et l'Union nationale des caisses d'assurance-maladie (UNCAM) se sont engagées dans un nouvel accord-cadre interprofessionnel, dit ACIP.
Un accord qui va notamment permettre d’accélérer les dispositions conventionnelles pour répondre aux orientations fixées dans le plan présenté par le président de la République, « Ma Santé 2022 ». « L’ACIP vient en surplomb des accords mono ou pluriprofessionnels fixer un cap stratégique, avec un engagement de l’ensemble des professions de santé signataires sur le principe de l’exercice coordonné », explique Nicolas Revel, le président de l’UNCAM, dans le cadre d’une table ronde intitulée « Interpro : du rêve à la réalité ? », à l’occasion du Congrès national des pharmaciens* qui s’est tenu le week-end dernier à Strasbourg. « Il s’agit d’un accord très large, d’un socle qui va permettre de décliner l’interprofessionnalité soit en accords spécifiques monoprofessionnels soit en accords interprofessionnels », précise la présidente de l’UNPS, Jocelyne Wittevrongel, également vice-présidente de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).
Une source d'économies
L’accord signé présente trois objectifs principaux : faire évoluer les pratiques pour la prise en charge coordonnée des patients (par exemple le recours à la télémédecine), accompagner les professionnels dans la transition numérique en santé (avec notamment le développement du DMP et de la prescription électronique), et simplifier les conditions d’exercices grâce, entre autres, aux téléservices. Reste donc maintenant à le mettre en musique via des accords interprofessionnels, ou profession par profession qui, eux, pourront prévoir des rémunérations. Et les choses ne devraient pas traîner. « L’objectif n’est pas de faire bouger l’organisation des soins dans les territoires avec une échéance à 50 ans, mais dans les 2 à 3 prochaines années », insiste Nicolas Revel. Aussi, des négociations, qui doivent décliner le cadre général défini par l’ACIP, vont s’ouvrir très vite, « c’est-à-dire d’ici à deux mois », indique le directeur général de l’UNCAM. Pour lui, l’exercice coordonné est également un gage de qualité des prises en charge, avec à la clé des économies pour le système de santé. « Si l’on pouvait faire un peu moins de régulation tarifaire parce qu’on est meilleur sur les hospitalisations évitables, ou sur la qualité de la prise en charge, je pense que c’est gagnant pour tout le monde », fait remarquer Nicolas Revel.
Albin Dumas, président de l’Association de pharmacie rurale (APR), se félicite de la voie empruntée. « On a fait un premier pas, j'en suis très heureux », indique-t-il, déplorant toutefois que lorsque l’on donne d’un côté 900 millions d’euros par an sur 4 ans pour l’évolution du système de santé, on reprenne de l’autre un milliard d’euros par an sur le médicament.
La FSPF signataire
Quoi qu’il en soit, la profession compte bien s’inscrire dans cette logique d’exercice coordonné. « La FSPF sera signataire de cet accord », réaffirme le président du syndicat, Philippe Gaertner, pour qui ce texte est « l’occasion de passer à quelque chose de plus formalisé ». En effet, la coordination des soins existe déjà, comme le rappelle Jacques Battistoni, président du syndicat de médecins MG France. Mais pour lui, « il faut aller plus loin, en se connaissant mieux ». « On ne part pas d’une page blanche », reconnaît en effet Nicolas Revel, relevant que, au quotidien, médecins, pharmaciens et infirmiers ne cessent d’échanger. Mais pour aller plus loin et rendre ces coopérations plus efficaces, il est nécessaire de doter les professionnels d’outils et de ressources qui permettront de franchir une étape supplémentaire, explique le directeur général de l’UNCAM. Pour lui, les bilans de médication font d’ailleurs partie des éléments de coordination. « J’attends beaucoup de ces missions », lance-t-il aux congressistes alors que l’engagement des pharmaciens dans ces bilans est encore timide (voir encadré).
Le DMP, outil de la coordination
Le dossier médical partagé (DMP) en cours de déploiement est un autre outil de cette coordination des soins. « C’est un élément essentiel de la coordination interprofessionnelle », indique Philippe Gaertner, en particulier si la « prescription pharmaceutique » devenait réalité (voir ci-dessous). « Nous avons de plus en plus d’officines qui s’équipent pour pouvoir en créer », se félicite pour sa part Nicolas Revel, qui a profité de sa présence au Congrès national pour saluer la mobilisation des pharmaciens. Environ 6 000 officines sont ainsi en capacité d’ouvrir des DMP et 80 000 DMP sont créés chaque semaine, alors que la campagne nationale auprès des assurés n’a pas encore été lancée. Après, il faudra les alimenter. « Nous sommes en train de travailler avec votre Ordre national pour faire un lien entre le DP et le DMP », annonce Nicolas Revel.
Certes, « nous ne sommes pas au début de la coordination, mais à une étape où on la formalise et où on lui donne des moyens, conclut Philippe Gaertner. Quand des professionnels prennent du temps pour s’assurer de la construction du parcours du patient, ce temps doit être reconnu ». Et par conséquent, rémunéré.
*Le 71e Congrès national des pharmaciens s’est déroulé les 20 et 21 octobre à Strasbourg. L’événement est co-organisé par la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), l’Association de pharmacie rurale (APR) et l’association de formation continue UTIP.