Comme le précise le secrétaire général de la FIP, le pharmacien français Luc Besançon, il est difficile de comparer les niveaux et les montants de rémunération dans le monde, tant les conditions d’exercice et les structures des coûts sont variables. Ainsi, par exemple, si la livraison quotidienne du grossiste est incluse dans le prix des médicaments en Europe, elle est facturée à part aux États-Unis. Pour cette raison, la FIP a choisi de ne pas citer nommément les pays où les revenus sont les plus élevés… ou les plus bas.
Dans le monde, une pharmacie sur deux est indépendante, les autres appartenant à des chaînes publiques ou privées. Dans 30 des 50 pays étudiés par l’enquête, les pharmaciens peuvent consentir des rabais ou ristournes à leurs clients, soit sur tous les médicaments, soit uniquement sur les OTC. Ces rabais peuvent être accordés soit aux patients, soit aux caisses de maladie qui remboursement les prescriptions, comme par exemple en Allemagne. Les rabais sont obligatoires dans 4 pays, mais totalement inexistants dans 12 autres. Dans 85 % des pays, les pharmacies sont la seule source d’approvisionnement en médicaments prescrits, les 15 % restants autorisant aussi les médecins à en délivrer. Beaucoup de pays s’inquiètent du développement des ventes des OTC hors pharmacie, au détriment de l’activité de ces dernières.
Des missions rémunérées
Selon les pays, les marges et les honoraires rémunèrent uniquement le produit, ou couvrent aussi un certain nombre de services qui leur sont attachés. Certains nouveaux services sont par contre rémunérés à part, avec un honoraire spécifique, y compris s’il n’y a pas de délivrance. Selon M. Besançon, l’Australie est l’un des pays les plus avancés en matière de nouveaux services, dont la rémunération est négociée au sein d’une convention collective avec l’État, régulièrement remise à jour. Elle tient compte des résultats obtenus par les différents programmes menés par les pharmaciens. Ceux-ci établissent par exemple des recommandations pour le suivi de chaque patient, et sont rémunérés pour ce travail, parce qu’il est jugé efficace et permet de réduire les coûts. Par ailleurs, les pharmacies rurales bénéficient de modes de rémunération adaptés à leurs spécificités, très différentes de celles des villes.
En Écosse et en Angleterre, les patients peuvent, en cas de maladie bénigne, consulter un pharmacien plutôt qu’un médecin. Si le pharmacien délivre un OTC, il lui sera payé par la Sécurité sociale à un tarif supérieur à ce qu’il aurait obtenu pour une vente normale. De plus, les pharmaciens écossais touchent près de 1 500 euros par an pour réaliser, à l’officine, des actions d’information et de promotion de la santé.
Autre nouvelle mission rémunérée, soit en honoraire soit par le produit, les vaccinations à l’officine sont déjà une réalité au Royaume-Uni et en Irlande, mais aussi au Portugal, aux États-Unis, au Canada, aux Philippines et, bientôt sans doute, en Suisse.
L’exemple suisse
Le secrétaire général de la FIP relève par ailleurs que la France est bien placée en matière de nouvelles rémunérations : « le dossier pharmaceutique est un outil formidable pour développer des services, et les entretiens pharmaceutiques, par exemple autour des AVK, sont une innovation encore unique au monde. » Dans tous les cas, poursuit-il, ces initiatives contribuent à positionner le pharmacien en tant que centre de premier recours, porte d’entrée vers l’ensemble du système de santé.
Mais existe-t-il, pour finir, une « terre promise » pour exercer la pharmacie ? Rappelant ses réserves sur les comparaisons des données, Luc Besançon se risque toutefois à citer deux pays, les États-Unis et la Suisse, mais dans des cadres très différents : « Les pharmaciens hospitaliers américains sont certainement ceux qui sont les mieux associés à toute la prise en charge des patients, et disposent de larges responsabilités et d’un excellent statut. Par contre, les officinaux sont confrontés à une telle progression des ventes par correspondance que leur rémunération et leur qualité de vie s’en ressentent de plus en plus. » Quant au « paradis officinal », il se situe certainement, selon lui, chez nos voisins helvètes, avec des pharmaciens dotés de larges compétences, dans un système très libéral et bien rémunéré.