« Quand les associations creusent des puits dans les pays du Sud, l’expérience montre qu’après quelques années, les installations sont hors service, ce qui prouve que, pour une solution durable du problème de l’accès à l’eau saine, il faut sortir de la spirale de la simple charité », explique Julien Ancele, directeur général de 1 001fontaines.
Avec sa fondation Énergies pour l’Afrique, Jean-Louis Borloo l’a aussi vérifié : en l’absence d’ingénierie locale, seule 30 % de l’aide au développement est véritablement opérationnelle. C’est pourquoi l’ONG 1001fontaines, créée en 2004, forme des équipes et soutient des entrepreneurs locaux au sein de communautés rurales. Ce sont eux, et non l’association, qui gèrent les stations d’épuration. Des micro-entreprises voient ainsi le jour, qui vont assurer la pérennité des installations.
Trois prototypes, fabriqués en France, ont été installés dans des villages cambodgiens à partir de 2004. Une première plateforme a été montée en 2008 au Nord-Ouest du Cambodge, en partenariat avec l’ONG locale Teuk Saat 1 001. Elle va piloter des stations qui recourent à l’eau la plus disponible (mare, rivière ou puits) et utilisent un système de filtration à sable et de désinfection par ultra-violet alimenté par des panneaux solaires.
Dans chaque village équipé, c’est un opérateur local qui contrôle la qualité selon des normes OMS, qui veille sur la maintenance de l’installation, conditionne l’eau en bonbonnes ou en jerricanes, et la commercialise à bas coût (1 centime/litre). Deux objectifs sont atteints : chaque villageois a la possibilité de boire jusqu’à 2 litres d’eau parfaitement saine tous les jours, et l’opérateur qui entretient l’outil de production perçoit des revenus pour lui et sa famille.
En trois ans la plateforme initiale, avec ses 35 salariés, a installé des stations dans une soixantaine de villages, créant une activité pour plus de 160 opérateurs. Une deuxième plate-forme a été créée à Phnom-Penh pour desservir des provinces du Sud-Est du pays.
« Nous buvons 90 % de nos maladies »
« Le partenariat avec une ONG locale est décisif pour favoriser l’adhésion des populations au programme, souligne Julien Ancele, elle permet de s’appuyer sur les leaders d’opinion dans les villages et sur les responsables des centres de soins. » L’argument santé est vite compris : « nous buvons 90 % de nos maladies », affirmait Louis Pasteur. Dans les pays du Sud, l’eau est encore aujourd’hui la première cause de maladie et de décès, avec un taux de mortalité infantile proche de 20 %, pour les quelque 800 millions de personnes vivant en milieu rural qui n’ont pas accès à une eau potable. Des études épidémiologiques (publiées dans BioMedical Central et PLOS one) ont validé l’intérêt sanitaire du modèle 1 001fontaines avec, dans les villages équipés, une réduction des risques de diarrhées de 33 à 62 %, ainsi qu’une réduction de l’absentéisme scolaire évaluée à 45 %.
Après le Cambodge, où 1 001fontaines est entrée en phase industrielle accélérée, l’ONG se développe à Madagascar et elle s’implante en Inde. Au total, aujourd’hui, dans ces trois pays, 180 000 personnes vivant dans des secteurs ruraux privés de système d’adduction, consomment une eau potable.
Le concours organisé par Google pourrait booster l’essor international des programmes : quatre des dix finalistes (sur 300 participants au départ) bénéficieront chacun d’une bourse de 500 000 euros. « Si nous sommes parmi les gagnants, 60 000 personnes pourront bénéficier d’une eau saine dans une vingtaine de villages », a déjà calculé Julien Ancele. Le verdict appartient à un jury, où siègent notamment Bernard Kouchner et le Pr Alain Deloche. Mais les jeux sont ouverts également sur internet, via le vote du public en ligne à l’adresse suivante : https://impactchallenge.withgoogle.com/france2015/charity/1001fontaines
Clôture des clics le 7 octobre.