Les JAK sont des protéines cytoplasmiques à activité tyrosine kinase liées à des récepteurs transmembranaires de cytokines de type I et II. La fixation de la cytokine sur le récepteur active la molécule JAK associée au récepteur, ce qui aboutit à l'activation de protéines d'aval appelées STAT (transducteur de signal et activateur de transcription). La voie de signalisation JAK STAT est impliquée dans la réponse aux agents pathogènes, l'inflammation, la différenciation et la prolifération cellulaire et l'oncogenèse. Il existe plusieurs niveaux de régulation et il est légitime de s'intéresser aux molécules susceptibles d'interférer avec cette voie pour contrôler certaines situations pathologiques.
« Contrairement aux biothérapies qui n'ont qu'une cible unique, les inhibiteurs de JAK peuvent bloquer simultanément plusieurs voies de réponse cellulaire aux cytokines inflammatoires (IL-4 IL-13 ou IL-17 entre autres) et ainsi réguler l'immunité innée et adaptative. Le degré d'inhibition varie selon le type de molécule inhibitrice et de la molécule JAK avec laquelle elle interagit », explique le Pr Olivier Dereure, du CHU de Montpellier*. L'action des antiJAK est donc très complexe, ce qui se traduit par des spectres d'efficacité et d'effets indésirables différents.
De nombreuses indications potentielles
Après des premiers travaux réalisés avec le tofacitinib dans le psoriasis en dermatologie ces molécules ont connu un développement rapide dans des indications majeures en rhumatologie et en hématologie. La dermatite atopique fait partie, avec le psoriasis, des indications phares en dermatologie. Les antiJAK sont également prometteurs dans certaines maladies orphelines comme le vitiligo ou la pelade, ou d'autres plus marginales comme la maladie de Verneuil, le granulome annulaire ou la sarcoïdose. Dans la dermatite atopique, il s'agit d'une prescription de deuxième intention initiée uniquement en milieu hospitalier compte tenu des contre-indications.
« Il reste des incertitudes sur le maintien de leur efficacité dans le temps et leur tolérance au long cours, prévient le professeur. Si de nouvelles molécules présentent des nombreuses perspectives de développement il est important de bien préciser leurs indications et leur place dans les stratégies thérapeutiques et d'évaluer leurs effets indésirables ainsi que leurs modalités de surveillance cliniques et biologiques. »
Engagés depuis plus de vingt ans dans la prise en charge des maladies inflammatoires chroniques de la peau, les Laboratoires Pfizer annoncent l'obtention d'une AMM européenne pour Cibinqo (abrocitinib)** inhibiteur de JAK1 dans le traitement de la dermatite atopique modérée à sévère de l'adulte nécessitant un traitement systémique en attente de solution thérapeutique. Il a fait l'objet d'un large programme de développement clinique JADE qui comporte sept études ayant inclus plus de 3 800 patients. Ce programme a permis d'évaluer son efficacité et sa sécurité comparativement au placebo et à un traitement systémique de référence anticorps monoclonal recombinant qui inhibe la signalisation des IL4 et IL13. Cibinqo est autorisé en prise quotidienne en comprimés de 100 mg et 200 mg. Le programme éducatif vise à accroître la sensibilisation aux problèmes de sécurité du produit, notamment les infections (y compris le zona et les infections graves et opportunistes), les événements thrombotiques, y compris l’embolie pulmonaire, les tumeurs malignes, les événements indésirables cardiovasculaires majeurs (MACE) et la toxicité embryofœtale après exposition in utero. Cibinqo devrait être disponible en France fin 2022.
* Communiqué aux Journées dermatologiques de Paris JDP 2021.
** Visioconférence de Pfizer.