Le concept de la voie intranasale est séduisant.
« Un vaccin en injection intramusculaire provoque une réaction immunitaire globale, mais n'empêche pas la multiplication du virus dans les fosses nasales, explique le Pr Isabelle Dimier-Poisson, responsable de l’équipe de recherche BioMAP en charge du projet. C'est la raison pour laquelle il prévient les formes graves mais n'est pas très efficace pour empêcher les infections. Un vaccin intranasal provoque une réponse immunitaire globale réduisant le risque de cas grave, ainsi qu'une réponse immunitaire locale qui réduit le risque d'infection et de transmission. »
Autre avantage : il s'agit d'un vaccin protéique ciblant non seulement la protéine Spike mais aussi des protéines qui ne mutent pas, et qui sont restées identiques de la souche originelle de Wuhan au variant Delta. D'un point de vue pratique, le vaccin mis au point à l'université de Tours par l'INRAE pourrait, dans un premier temps, être utilisé comme un « booster » des vaccins déjà existants afin de compléter la protection contre les nouveaux variants, ou chez certains publics (enfants, habitants de régions sans la logistique nécessaire pour conserver les vaccins à ARNm).
Pour l'heure, les chercheurs ne sont pas en mesure de publier ni même de communiquer leurs résultats. « Nous sommes dans une phase de sécurisation de la propriété intellectuelle de notre procédé, justifie le Pr Dimier-Poisson. Nous avons déjà déposé nos demandes de brevet et publierons nos données dès qu'elles seront acceptées. » En attendant, l'équipe du Pr Dimier-Poisson affirme qu'à l'issue de deux administrations par voie nasale, espacées de trois semaines, une forte réponse immunitaire humorale, notamment des immunoglobulines A muqueuses, neutralisantes (IgA2) et polyspécifiques, était observée chez des souris mutées pour être sensibles à l'infection par le SARS-CoV-2. Par ailleurs une immunité cellulaire était mesurée au niveau des cavités nasales et des poumons des animaux.
Après exposition à l'infection, 100 % des animaux vaccinés ont survécu sans aucun signe clinique, à la différence du groupe non vacciné. Par ailleurs, l'effet du vaccin sur la contagiosité a été évalué dans le modèle hamster syrien, dont la physiopathologie du Covid-19 est très proche de celle observée chez l'homme. Les animaux vaccinés et infectés ne présentent aucune charge virale pulmonaire et nasale détectable, à l’inverse des animaux infectés non vaccinés présentant de fortes quantités d’ARN viral dans les poumons et les cavités nasales.
La phase de développement et de production des lots de vaccins est prévue pour 2022. L'ANRS maladies infectieuses émergentes va porter le volet juridique des essais cliniques dont elle sera le promoteur. Le Pr Dimier-Poisson précise qu'une start-up pour assurer la co-direction, est en cours de montage.
Au centre du viseur : une mise sur le marché en 2023. Les promoteurs se targuent d'un développement 100 % français, puisqu'outre Vaxinano, les entreprises GTP Bioways (Toulouse), C.RIS Pharma (Saint-Malo) sont également impliquées. Le fabricant de dispositifs médicaux Recipharm, basé à Monts, va ouvrir une ligne de production dédiée à la fabrication de l'injecteur.