* À ne rater sous aucun prétexte, « l’Heure du diable » (1), qui clôt la trilogie « Évangile » de Patrick Bauwen, après « le Jour du chien » et « la Nuit de l’ogre ». Responsable d’un service d’urgence dans une clinique de la région parisienne, l’auteur y met en scène un médecin aux prises avec un tueur psychopathe. Angoissé et dépressif – il ne pratique plus que la téléconsultation, abuse des médicaments et de l’alcool –, le Dr Kovak conclut enfin la traque qui va le confronter à son passé et le lier aux origines du Chien. Glauque et prenant.
* Également médecin urgentiste et psychologue clinicien, Marc Magro a construit son 16e livre, « Même pas morts » (2), à partir d’un fait historique méconnu. Enquêtant sur la disparition de ses grands-parents, Paul Antonelli, commissaire à Bordeaux, revient sur les non-dits familiaux et cherche à percer le mystère d’un film censé avoir été tourné par les Nazis dans le ghetto de Varsovie en 1942. L’horreur du passé toujours recommencée.
* Après s’être imposé avec sa trilogie autour de l’inspectrice norvégienne Sarah Geringën, « le Cri », « Complot » et « l’Île du Diable », Nicolas Beuglet met en scène une nouvelle héroïne particulièrement mystérieuse, en Écosse. Dans « le Dernier Message » (3), Grace Campbell enquête sur le meurtre du pensionnaire d’un monastère. Au centre de l’intrigue, fondée, dit l’auteur, « sur des recherches scientifiques actées dans le milieu universitaire, mais qui ne sont pas encore arrivées aux oreilles du grand public » : l’évolution de l’intelligence humaine.
* Hier policier, aujourd’hui analyste au ministère de l’Intérieur, Hervé Jourdain publie des polars régulièrement primés. Dans « Terminal 4 » (4), un cadavre carbonisé a été trouvé dans le coffre d’une voiture qui a brûlé aux abords de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle. L’enquête met en lumière les conflits entre taxis et VTC clandestins, les oppositions au projet du nouveau terminal, les luttes politico-économiques autour de la pollution…
* Pour son premier roman dans la Série Noire, le journaliste Jacques Moulins nous entraîne dans les arcanes d’Europol – l’Office européen de police qui aide à combattre la criminalité internationale et le terrorisme – alors qu’un mouvement ultranationaliste est soupçonné de projeter des actions violentes partout sur le continent. L’action du « Réveil de la bête » (5) se concentre sur le cybercrime. Avec des méthodes tout à fait crédibles du côté des « bons » et des « méchants ».
Intrigues parallèles
* « Entre fauves » (6), de Colin Niel, succède à sa série guyanaise multiprimée mettant en scène un gendarme noir-marron à la recherche de ses origines et à « Seules les bêtes », qui se déroule dans la solitude des Causses. C’est un thriller choral qui se déploie de la vallée d’Aspe, dans les Pyrénées enneigées, au désert du Kaokoland en Namibie. D’un côté des ours, de l’autre des lions. Sont-ils les vrais prédateurs ?
* Ce sont aussi deux intrigues parallèles qui animent « la Proie » (7), le sixième opus de la série Benny Griessel de Deon Meyer traduit de l’afrikaans en français (que l’on peut lire tout à fait indépendamment), parmi une douzaine de best-sellers. Au Cap, l’inspecteur et son équipe de l’unité d’élite sud-africaine des Hawks sont confrontés au meurtre d’un ancien policier ; à Bordeaux, un ancien combattant de la branche militaire de l’ANC est hanté par la crainte que son passé ne le rattrape. Action et coups de théâtre le disputent à la dénonciation politique, dans une chasse à l’homme haletante, sur fond de corruption aux plus hauts niveaux et de dépeçage organisé du pays.
* Scénariste connu pour la télévision et le cinéma, le Suédois Stefan Ahnhem s’est mis à l’écriture de polars avec le même succès. « Moins 18° » (8) est le troisième volet de sa série Fabian Risk, après « Hors cadre » et « la Neuvième Tombe ». La brigade criminelle de la police de Helsingborg doit comprendre pourquoi le conducteur d’une voiture ayant fait le grand plongeon dans le port est en réalité mort depuis deux mois, son corps ayant été congelé.
Trafics
* Révélé avec « Il était une fois dans l’Est », le journaliste Arpad Soltész, réputé pour son travail sur le crime organisé, donne à nouveau une image documentée et terrible de la Slovaquie. À partir de la mort d’une jeune junkie, déclarée accidentelle bien qu’un témoin ait vu le coupable maquiller le meurtre en overdose. Inspiré de faits réels, notamment l’assassinat du journaliste slovaque Jan Kuciak et de sa compagne en 2018, « le Bal des porcs » (9) met au jour un vaste réseau de prostitution, de corruption et de chantage organisé par la mafia calabraise, chapeautée par le Premier ministre en personne. Un polar politique.
* D’une atmosphère étrange à l’autre, on quitte la côte normande des « Refuges », qui a valu à Jérôme Lubry le prix Cognac 2019, pour Haïti. « De soleil et de sang » (10) fait alterner les périodes et les lieux à partir de la découverte en 2009, juste avant le terrible séisme, des corps suppliciés de plusieurs couples. Refusant d’imputer ces crimes au vaudou, l’inspecteur chargé de l’enquête remonte la piste d’un trafic d’enfants. Pauvreté, misère, inégalités, corruption, violences…, le tableau est inspiré de faits réels.
* Fin connaisseur du Pays basque, encore inconnu en France comme auteur de romans policiers, Ibon Martin se dévoile avec « la Valse des tulipes » (11), qu’il a situé dans la splendide Réserve de la Biosphère d’Urdaibai. C’est là que les corps de plusieurs femmes âgées d’une cinquantaine d’années sont retrouvés, avec chacune un pétale de tulipe sur le corps. Toutes, à l’adolescence, auraient passé une année à Lourdes, « missionnées » par un couvent de Guernica afin de s’y débarrasser d’un « problème ». Un de ces « problèmes » aurait-il ressurgi ?
(1) Albin Michel, 473 p., 21,90 €. (2) Marge Noire/de Borée, 485 p., 19,90 €. (3) XO, 395 p., 19,90 €. (4) Fleuve, 318 p., 19,90 €. (5) Gallimard, 375 p., 18 €. (6) Rouergue, 338 p., 21 €. (7) Gallimard, 566 p., 18 €. (8) Albin Michel, 570 p., 22,90 €. (9) Agullo Éditions, 392 p., 22 €. (10) Calmann-Lévy, 395 p., 19,90 €. (11) Actes Sud, 478 p., 23 €.