Le Quotidien du pharmacien.- La prépublication d’une étude en vie réelle en Écosse montre d’excellents résultats pour le vaccin d’AstraZeneca. Est-ce le début de la réhabilitation pour ce vaccin ?
Gabriel Thabut.- J’insiste sur l’envergure de l’étude qui inclut plus de 5 millions d’individus, dont 1,14 million ont été vaccinés et 490 000 avec le vaccin AstraZeneca. Cette étude montre que son efficacité vaccinale, 28 jours après une dose, est de 94 % pour la prévention des hospitalisations liées au Covid. Dans nos essais cliniques nous avons zéro patient hospitalisé pour Covid dès la 3e semaine suivant la première injection de l’AZD1222. Zéro ! Donc les résultats de l’étude écossaise ne nous surprennent pas du tout. Cette étude en vie réelle, qui, je le rappelle, a été réalisée par des académiques avec un financement public, donc sans aucun contrôle des laboratoires, inclut beaucoup de personnes âgées. Le résultat poolé (regroupant les personnes ayant reçu le vaccin Pfizer ou le vaccin AstraZeneca - NDLR) révèle une efficacité de plus de 80 % chez les plus de 80 ans, mais en regardant la répartition des vaccins, on se rend compte que les plus de 65 ans ont été essentiellement vaccinés avec l’AZD1222. Il n’y a pas de doute sur l’efficacité vaccinale, c’est pourquoi l’agence européenne du médicament (EMA) tout comme l’autorité anglaise (MHRA) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont recommandé notre vaccin sans restriction d’âge.
La mutation E484K, qui concerne les variants dits sud-africain, brésilien et écossais, suscite des inquiétudes quant à sa potentielle capacité à contourner l’immunité acquise après infection ou vaccination. AstraZeneca indique avoir lancé des recherches. De quoi s’agit-il ?
Selon les études in vitro réalisées par chaque laboratoire, les vaccins actuels restent efficaces face au variant britannique, moins face au variant sud-africain. L’étude réalisée en Afrique du Sud montre une efficacité vaccinale de l’AZD1222 limitée pour les formes de Covid symptomatique sans gravité chez des sujets jeunes, mais ne permet pas de savoir quelle est l’efficacité clinique de notre vaccin sur le variant sud-africain. On a des raisons de penser qu’il garde un bon niveau d’efficacité parce qu’il n’y a pas que les anticorps qui entrent en jeu, il y a aussi l’immunité cellulaire dont on sait qu’elle est relativement préservée. En effet, les épitopes qui sont modifiés par le variant ne sont pas ceux ciblés par l’immunité cellulaire. Par ailleurs, nous développons une nouvelle forme de vaccin actif contre ces variants, notamment le sud-africain, qui pourrait être prêt à l’automne. Il est relativement simple de modifier la séquence génétique de notre vaccin, mais il faut ensuite le temps de le développer, de le produire et de lui faire passer l’étape de la validation clinique.
Comment expliquez-vous que les effets secondaires du vaccin AstraZeneca n’aient pas été repérés, du moins de cette intensité, lors des essais cliniques ?
Ces syndromes pseudo-grippaux, qui étaient moins fréquents dans les études, sont impactants mais heureusement se résolvent en 24 à 48 heures. Selon nous, ils sont plus fréquents en vie réelle en raison de la stratégie vaccinale qui vise, avec ce vaccin, des sujets jeunes. On sait que plus le sujet est âgé, moins il présente d’effets indésirables et plus la réactogénicité est faible. Dans l’une de nos premières études publiée dans « The Lancet », près de 20 % des 18-55 ans ont présenté de la fièvre sur 24 à 48 heures, alors que ce taux tombe à zéro chez les plus de 55 ans. De plus, les personnes vaccinées sont très majoritairement des femmes et, en vaccinologie en général, il est connu qu’elles ont davantage d’effets indésirables que les hommes.
Soutenez-vous la vaccination par les pharmaciens avec ce vaccin ?
L’intérêt collectif est d’arriver le plus vite possible à une immunité collective. Du fait de sa grande efficacité et de ses caractéristiques logistiques, le vaccin AstraZeneca a la capacité de se diffuser partout, y compris dans les pharmacies, là où des vaccins plus compliqués au niveau logistique auront des difficultés à aller. Donc oui, bien évidemment, nous sommes favorables à la vaccination par les pharmaciens.
Face au déficit d’image de ce vaccin, que comptez-vous faire ?
Jouer la transparence ! L’objectif de la vaccination défini par les autorités de santé est la diminution de la mortalité et de la morbidité liées aux hospitalisations. Or les différentes études montrent l’efficacité de notre vaccin. Les preuves scientifiques continuent de s’accumuler. Tout le monde va réaliser que c’est un excellent vaccin qui peut être administré à tous.
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