Si de manière générale, la santé a été absente de la campagne électorale, les déserts médicaux ont focalisé bien des propos de candidats. Étant donné qu'il faut huit à neuf ans pour former un médecin, d'autres solutions existent sur le terrain pour assurer l'accès aux soins, notamment des délégations de tâches, comme le rappelle Jacques Gravier, directeur de la rédaction du « Quotidien du pharmacien ».
En 2021, une enquête, menée par les titres du Groupe Profession Santé, avait d'ailleurs révélé l'appétence particulière des pharmaciens et infirmiers pour ces délégations de tâches : côté infirmiers, la pratique avancée, et côté pharmaciens, la vaccination contre le Covid et la grippe, ainsi que des nouvelles missions dans le dépistage et la prévention. « Les candidats entendent-ils encourager ces délégations de tâches ? », interroge Jacques Gravier. Selon le Dr Patrick Barriot, son référent santé, Marine Le Pen y est résolument favorable, que ce soit dans le dépistage du cancer colorectal, dans la vaccination, ou encore la prévention de la dénutrition chez la personne âgée ou les TROD. Pour les infirmières, il faut accélérer le développement des IPA (infirmières en pratique avancée) qui se heurte jusqu'à présent à une rémunération dérisoire et à des médecins traitants « qui ne jouent pas le jeu ». Mais, affirme le référent santé du Rassemblement national, la délégation de soins est également valable pour le pédicure-podologue dans le pied du diabétique. « Il y a un éventail très large de meilleures répartitions des tâches, que ce soit entre l'orthoptiste et l'ophtalmologue, les gynécologues et les sages-femmes, les médecins généralistes et les pharmaciens… », énumère-t-il, regrettant cependant que nombre de ces délégations soient encore le « fait du prince ». En un mot, certains professionnels rechignent encore à se démettre de certaines tâches.
Patrick Barriot est convaincu que le déploiement passe par un meilleur dialogue entre ces professionnels de santé. Ce dialogue peut être lui-même favorisé par des structures telles que les CPTS ou les équipes de soins coordonnées autour du patient (ESCAP), « une très bonne mesure, très souple », estime-t-il.
Pour le référent santé d'Emmanuel Macron, l'interprofessionnalité représente également une issue à l'impasse à la désertification médicale. La délégation de tâches, le transfert de compétences pour aller jusqu'au bout de la logique, sont des solutions pour redonner du temps aux médecins. Mais, insiste-t-il, les assistants médicaux, dont on ne parle pas assez, s'imposent également comme une solution. Selon lui, un écosystème doit se mettre en place autour du patient. Il ne doit pas s'instaurer en silo, mais à l'issue d'une discussion autour d'une table avec les acteurs impliqués, à l'échelle d'un territoire. « La santé ne concerne pas seulement le médecin mais l'ensemble des professionnels de santé ».
François Braun n'en positionne pas moins le médecin traitant en chef d'orchestre de cet exercice coordonné. « La prévention, le dépistage, des axes très forts dans le programme d'Emmanuel Macron, doivent se faire avec l'ensemble des professionnels de santé autour du patient, les infirmiers, les kinés, le pharmacien on l'a vu pendant la crise sanitaire, tout ce qu'on a réussi à faire, justement par la coopération entre ces professionnels de santé », expose-t-il. En appui de cette coopération, le numérique s'impose, notamment par le biais de « Mon espace santé ». Le numérique sera également essentiel pour le suivi des pathologies chroniques, rappelle-t-il.
Quant aux structures interprofessionnelles, elles sont toutes bonnes dès lors qu'elles améliorent la coordination entre les professionnels, autour et avec le patient. « Il faut mettre à profit l'intelligence collective qui a été développée pendant la crise sanitaire », recommande-t-il. Et d’ajouter que cet exercice pluriprofessionnel devrait s'apprendre dès la formation. Les étudiants le demandent.
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