Les bilans de prévention : une idée qui fait pschitt !
Annoncé par Emmanuel Macron en 2022, « Mon bilan prévention » est une série de rendez-vous aux âges clés de la vie (18 à 25 ans, 45 à 50 ans, 60 à 65 ans et 70 à 75 ans) permettant aux patients et aux professionnels de santé d’aborder certaines thématiques de prévention prioritaires (activité physique, sédentarité, habitudes alimentaires, addictions, perte d’autonomie…), d’identifier des facteurs de risque de maladies chroniques, de réaliser des dépistages, des rappels de vaccination… Un programme pilote d’expérimentation a été lancé dans les Hauts-de-France à destination des personnes âgées entre 45 et 50 ans en octobre 2023, et devait se généraliser en janvier 2024.
« Cet item sort des négos, explique Guillaume Racle, conseiller à l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Aucun effort de mise en place n’a été fait par les pouvoirs publics. Cet entretien de 45 minutes, chronophage et dense, ne bénéficie d’aucun levier incitatif. La rémunération a été fixée à 30 euros mais ce montant n’a pas été confirmé par arrêté. Celui-ci manque encore. Pour l’USPO, c’est une affaire enterrée. »
L’entretien court opioïdes : en cohérence avec les attentes
Cet accompagnement destiné aux patients traités par opioïdes pour lutter contre l’addiction, fait partie des propositions de l’avenant conventionnel en discussion avec la Caisse nationale de l’assurance-maladie (CNAM). Cette mission est validée par les syndicats et devrait être rémunérée 5 euros. « Il y a une coordination avec la convention médecin et nous sommes amenés à dialoguer en parcours de soins sur la gestion de la douleur », explique Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).
« Cet entretien court portant sur tous les produits du palier 2 est valorisé en cohérence avec le temps passé puisqu’il s’agit de renforcer la dispensation usuelle de six questions (échelle de Pomi) au comptoir. L’USPO espère désormais que les logiciels de gestion officinale (LGO) seront opérationnels pour accompagner ces entretiens », rapporte Guillaume Racle.
L’e-prescription : les médecins et les LGO seront-ils au rendez-vous ?
Elle est en phase de déploiement et devrait être généralisée au plus tard le 31 décembre 2024. « Elle s’appliquera fin 2024 à tous les prescripteurs et se déploie actuellement département par département. Mais les pharmaciens se heurtent en matière de facturation à certaines CPAM qui ne participant pas à l’expérimentation ne sont pas encore opérationnelles. Résultat : des pharmaciens risquent des rejets puisque le dispositif de e-prescription ne prévoit plus d’envoi de documents par scann. Deuxième blocage, certains LGO ne sont pas encore au point ou certaines de leur version incluant la e-prescription ne sont pas stables. Certains pharmaciens préfèrent donc attendre et conservent l’ancienne version », explique Guillaume Racle.
La dispensation à l’unité : une fausse bonne idée
Elle est rémunérée depuis 2022 lorsque le pharmacien délivre un antibactérien à usage systémique, si le conditionnement le permet ou lorsqu’il procède à une délivrance fractionnée des médicaments classés comme stupéfiants ou soumis à la réglementation des stupéfiants (1 € TTC dans la limite d’un plafond annuel de 500 € TTC). « La plupart des gens qui se sont intéressés au sujet disent que ce n’est pas une bonne idée. Mais pour la population, si ! », résume Philippe Besset. Pour Guillaume Racle, la dispensation à l’unité est « enterrée. Même la CNAM n’y croit plus ».
Le renouvellement exceptionnel de 3 mois : à nouveau reporté !
La loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, ou « Loi Rist » de 2023, étend le renouvellement exceptionnel des ordonnances expirées pour pathologie chronique à 3 mois. Mais les textes d’application manquent toujours.
« On réclame un acte et une traçabilité, annonce Philippe Besset. Il y aura quelque part dans le texte conventionnel actuellement en discussion une phrase qui dit qu’une fois le texte paru, on ouvrira une négociation sur ce point-là. »
La dispensation adaptée : un rendez-vous manqué
Ce dispositif, visant à assurer la bonne observance des traitements en délivrant la quantité pertinente nécessaire et en évitant tout risque de mésusage, était en expérimentation avec rémunération de l’assurance-maladie entre 2020 et 2022, selon la dernière convention pharmaceutique.
« C’est également repoussé dans le texte conventionnel en discussion à une date ultérieure mais l’idée est retenue, dévoile Philippe Besset. L’idée est de la lier à l’ordonnance numérique. Le pharmacien sera rémunéré à l’acte. » Fini, a priori, l’usine à gaz qui répercutait la rémunération des pharmaciens sur une proportion des économies réalisées par l’assurance maladie, payée sous forme de rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP).
« L’avenant devrait préciser les conditions suivantes : ce n’est que l’année suivant le déploiement de l’ordonnance électronique, quand les données de volume seront disponibles, que la dispensation adaptée sera négociée, précise Guillaume Racle. L’USPO ne cache pas sa déception car environ 800 000 dispensations adaptées étaient enregistrées chaque mois, effectuées par les deux-tiers des pharmaciens qui s’y étaient engagés. Ces chiffres étaient un bon signal. »
La PDA : quand c’est flou…
La réglementation est depuis un certain temps dans le flou. La préparation des doses à administrer (PDA) est aussi en attente d’un texte d’application. Dans l’avenant conventionnel en cours de discussion, les syndicats demandent la création d’un modèle économique. « Ce point pourra être mis à l’ordre du jour d’une commission paritaire nationale des programmes d’accompagnement (CPNPA) dès que les bonnes pratiques seront publiées », explique l’assurance-maladie.
Entretiens pharmaceutiques payés à l’acte : la cerise sur le gâteau
Pour les bilans partagés de médication comme pour les accompagnements AVK, AOD, asthme ou anticancéreux oraux, l’assurance-maladie propose dans l’avenant conventionnel que chaque étape d’entretien soit payée indépendamment les unes des autres. Certains entretiens de bilans partagés de médication seront même revalorisés pour une rémunération totale en année 1 de 65 euros (au lieu de 60 euros aujourd’hui), et 30 euros en année 2 (au lieu de 20 euros aujourd’hui).
Cerise sur le gâteau, l’assurance-maladie incite, dans ses négociations sur la convention médicale, les médecins à prescrire les bilans partagés de médication pour déclencher une consultation médicale longue de déprescription chez les personnes de plus de 80 ans hyperpolymédiquées, valorisée à 60 euros.
La démarche RSE fait cavalier seul
Introduite dans la convention de 2022, la rémunération de la démarche écoresponsable en pharmacie devrait évoluer, selon les propositions de l’assurance-maladie. « La CNAM a désolidarisé cet item de la démarche qualité et la valorise à hauteur de 100 euros. Cet indicateur, sur la base du volontariat, est rémunéré par une ROSP dès lors que deux items par niveau sont acquis (évaluation carbone de la structure, baisse de la consommation d’énergie, mise en place d’une politique de déchets, utilisation de LED et de produits d’entretien à faible impact environnemental…), détaille Guillaume Racle. Cette rémunération reste symbolique toutefois au regard des investissements ou des coûts induits. »
Des ROSP exceptionnelles pour 2024
L’avenant conventionnel en cours de négociation entre la CNAM et les syndicats représentatifs introduit des rémunérations sur objectifs de santé publique (ROSP) « exceptionnelles », afin d’aider à la mise en place des nouvelles missions :
- Un paiement 2024 exceptionnel pour la mise en place des nouvelles missions (réalisation d’au moins un acte de vaccination et d’un TROD angine) et l’engagement à adapter les locaux en 2024 de manière à être en mesure de réaliser des bandelettes urinaires en 2025 : 200 euros ;
- Un paiement 2024 exceptionnel pour la réalisation d’au moins un entretien (accompagnement, entretien femmes enceintes, entretien opioïdes) : 250 euros ;
- Un paiement exceptionnel pour la progression de 10 % ou plus du nombre de kits de dépistage du cancer colorectal remis en 2024 par rapport à 2023 : 100 euros.
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