Le 21 septembre, plus de 40 étudiants inscrits l'an dernier en PASS à l'université de Paris se sont présentés devant les grilles du ministère de l'Enseignement supérieur. Brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : « Rendez nos places ! » ou « Aidez-nous », ces jeunes animés par le désir de devenir un jour professionnel de santé ont alors débuté un sit-in et une grève de la faim sous les fenêtres du ministère qui a mis en œuvre la réforme de la PACES à la rentrée 2020.
Si ces étudiants recalés en fin d'année dernière en arrivent à de telles extrémités, c'est parce qu'ils ont l'impression d'avoir été victimes d'une profonde injustice. Pour eux, le coupable est tout désigné : les épreuves orales qui ont compté pour 70 % de leur note finale.
Des oraux préparés à la dernière minute
Pour comprendre le désarroi de ces étudiants, il faut revenir à l'an dernier. À l'université de Paris, 520 places en filière santé sont dédiées aux étudiants qui expérimentent le PASS pour la toute première fois. Les 260 étudiants ayant obtenu les meilleures notes à l'issue des épreuves écrites (ceux qu'on appelle les "grands admis") accèdent directement au Graal. Ceux classés juste en dessous doivent, eux, passer des oraux censés valider leurs compétences « humaines ». L'introduction de ces oraux constitue d'ailleurs l'une des grandes nouveautés de la réforme comme le rappelle Théo Vitrolles, porte-parole de l'Association nationale des étudiants en pharmacie de France (ANEPF). « Le but de leur introduction était de corriger les travers de la PACES, pour ne pas former des étudiants uniquement capables de noircir des cases. Dans le cadre de ces oraux, on demande par exemple aux étudiants de répondre à des questions en situation de stress. » Un exercice qui ne requiert en effet pas les mêmes qualités que pour réussir un QCM.
Si l'ajout des oraux part d'une ambition louable, leur fonctionnement ne va pas être suffisamment bien expliqué si l'on en croit les témoignages des étudiants inscrits en PASS à l'université de Paris. « À peine deux Webinaires d’une heure, en changeant le contenu d’une des épreuves deux semaines avant l’épreuve d’oral », résume une des étudiantes concernées. Des informations données à la dernière minute qui déstabilisent des étudiants. Ces derniers ne sont pas au bout de leurs surprises.
De la pétition à la grève de la faim
Initialement, les oraux (2 sessions de10 minutes chacune) ne devaient représenter que 50 % de la note finale des étudiants parisiens. Ils vont finalement compter pour… 70 %. Comme le révèle un article publié par « Egora », c'est en enquêtant eux-mêmes que les étudiants se sentant lésés vont se rendre compte de l'importance démesurée de l'oral dans leur note finale. Ils vont également découvrir que les étudiants les mieux classés ont également été les plus pénalisés. Proches des 260 premières places, certains d'entre eux vont dégringoler au classement et être finalement recalés.
En juillet dernier, après avoir découvert le pot aux roses, des étudiants ajournés vont créer le « Collectif étudiant Pass Université de Paris ». Ils vont mettre en ligne une pétition sur le site « Change.org » signée par près de 3 000 personnes. Deux référés sont déposés devant le tribunal administratif de Paris, lesquels n'aboutiront pas car les étudiants peuvent être admis en LAS 2 et ont donc la possibilité de retenter leurs chances à l'issue de cette deuxième année (selon des critères pas encore très clairs aujourd'hui). Sans réponse du ministère, qu'ils ont continué d'alerter durant l'été, ces étudiants ont donc décidé de passer à la vitesse supérieure en entamant une grève de la faim. Ils n'ont aucunement l'intention d'abandonner. « On ne lâchera pas l’affaire tant que notre cause ne sera pas entendue ! », a tweeté l'une des étudiantes du Collectif le 21 septembre.
Des questions déplacées durant les oraux
Énième stigmate des difficultés de la réforme de la PACES, la question des oraux ne concerne (malheureusement) pas que l'université de Paris. « Partout ailleurs ou presque, ces oraux ont été mal préparés, dénonce Emmanuel Voiment, représentant du Collectif national PASS/LAS, structure qui fédère des parents d'étudiants partout en France. Dans certaines facs, ils représentent 30 % de la note, ailleurs c'est 50 %, parfois c'est 70 % comme à Paris. Nous demandons davantage de clarté par rapport à ces oraux qui doivent concernent tous les étudiants. Ils ont été mis en place car on souhaite avoir des médecins qui ont plus d'empathie. Les "grands admis", dont certains vont devenir médecins en sont exemptés, ce n'est absolument pas logique. » Emmanuel Voiment a également découvert avec effarement le contenu de certaines questions ouvertes posées à des étudiants lors de ces oraux. « Comment appréhenderiez-vous le métier de médecin si vous tombiez enceinte ? Cette question a été posée à des étudiantes », se désole Emmanuel Voiment. « Quand on voit que des étudiants en arrivent à faire une grève de la faim, que d'autres fuient vers l'étranger pour poursuivre leurs études et que certains refusent d'aller en LAS 2 parce qu'ils n'y croient plus, ça en dit long sur la détresse qu'engendre la réforme. »
Pour Théo Vitrolles, le porte-parole de l'ANEPF, les oraux ont malgré tout leur place et ne doivent surtout pas être cloués au pilori. Pour qu'ils jouent le rôle qu'on attend d'eux il reste néanmoins beaucoup de travail à accomplir. « Le système pour cette première année a été imparfait, cela ne fait aucun doute, confirme Théo Vitrolles. Il y a eu un gros problème de communication au niveau des universités, nous avons aussi eu connaissance de questions posées lors des oraux qui n'avaient pas lieu d'être et Il y a clairement un problème d'homogénéisation entre les facs… » Autant de problématiques qu'il serait bon de résoudre durant cette nouvelle année universitaire.
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