Le Quotidien du pharmacien.- Le droit français constitue-t-il un cadre favorable à la vente en ligne de produits de santé ?
Me Sébastien Beaugendre.- Le droit français procède d’abord du cadre européen auquel chaque État membre peut ajouter des conditions nationales (nécessaires justifiées et proportionnées à l’objectif de sauvegarde de la santé publique). Moins libéral que celui d’autres États membres (ex. Pays Bas ou en Belgique), il se veut plus protecteur, plus traditionnel. Le gouvernement français a certes suivi les évolutions de la jurisprudence européenne, obéissant à la hiérarchie des normes, mais prudemment, de manière que la pharmacie numérique soit le prolongement de la pharmacie physique. Les artisans de la vente en ligne de médicaments dans notre pays n’ont pas voulu l’ouvrir à tous les vents. Cependant, dans notre pays, les logiques du ministère de la Santé et de l’Autorité de la concurrence ne sont pas les mêmes…
Les pharmacies en ligne françaises sont-elles par conséquent protégées par le droit des plateformes numériques européennes ?
Des outils ont été mis en place en France pour de bonnes raisons. Que l’on songe au questionnaire préalable de santé, à l’interdiction de l’incitation à l’usage abusif de médicaments, ou encore à la simple question de savoir si le patient est un homme ou une femme, et le cas échéant, si elle est enceinte. Juridiquement, on peut imposer le respect de telles règles. Économiquement c’est une autre question. La Cour de justice de l’Union européenne a d’ailleurs validé la possibilité d’imposer ces règles françaises plus strictes à condition qu’elles soient dictées par la sauvegarde de la santé publique (Arrêt Shop Apotheke) et que l’État français les ait notifiées à la Commission et aux autres États membres. Or on peut s’étonner aujourd’hui de n’avoir toujours aucune certitude sur cette notification et le cas échéant son contenu. À ma connaissance, aucune information n’a filtré à ce sujet, ni de la part du ministère de la Santé, ni de celui des Affaires Européennes. Un tel flou est regrettable car les textes qui n’ont pas été notifiés par la France ne sont pas opposables aux acteurs des autres États membres !
Les pharmaciens français ont-ils raison d’occuper l’espace numérique ?
La nature a horreur du vide. Ils ont raison de se positionner. À ce que j’en sais, leur objectif n’est pas de mettre en concurrence les pharmaciens, de faire une market place, ce que nous dénoncions dans l’affaire Doctipharma. Mais de créer une plateforme conforme à la fois aux règles et aux usages français.
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