« La santé est le pilier de l’attractivité territoriale », affirme Gérard Lheureux, maire de Crécy-en-Ponthieu (Somme), petite commune de 1 400 habitants. Cet élu a vite réagi après avoir reçu Bruno Lefer, le pharmacien du bourg, qui venait l’alerter sur l’avenir de la maison médicale, « inquiet comme pharmacien, et surtout inquiet pour la présence médicale ». Le confrère avait aussi prévenu Patricia Poupart, maire d’un village voisin, et conseillère régionale.
« Depuis dix ans, aucun médecin parti à la retraite n’a été remplacé à la maison pluridisciplinaire de santé (MSP), et des nouveaux médecins s’installent seuls dans des petites communes hors de Crécy », s’alarme Bruno Lefer.
Cette MSP a été créée en 2012, à l’initiative de médecins. Elle a compté cinq médecins généralistes, trois cabinets infirmiers, soit quinze infirmiers, une orthophoniste, deux cabinets de kiné, une sage-femme, un podologue, deux dentistes. L’année suivante, la pharmacie rejoignait la MSP, à 500 mètres du centre du bourg, et compte à ce jour cinq pharmaciens, cinq préparateurs, trois administratifs, sans compter le personnel d’entretien, soit plus de quinze bulletins de salaire mensuels.
Départs à la retraite non remplacés
Le non-remplacement des médecins partis à la retraite a ramené le nombre de praticiens à quatre, puis bientôt à trois. Ce qui n’était pas sans poser problème puisque le niveau des charges, lui, restait constant.
« C’est surtout une question de service à la population, estime Bruno Lefer. Plus le pôle médical est important, plus la prise en charge peut l’être, et notre territoire compte beaucoup de personnes âgées, peu mobiles. Une personne est chargée des livraisons à la pharmacie. »
Gérard Lheureux et Patricia Poupart ont pris leur bâton de pèlerin, et ont « démarché » les maires de trente-sept communes alentour. Objectif : les inciter à prendre part à la charge de la MSP. Les réactions ont été partagées, certains élus voyant les médecins « comme des nantis », et n’étant pas prêts à les aider. « Le problème existe, convient Bruno Lefer, ce sont souvent les médecins qui bloquent les projets de communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), chez nous, comme à Abbeville. Ils demandent de l’aide, mais ne bougent pas, et prennent les autres professionnels en otages. »
« Nous avons un problème de territoire, il faut le mailler car les communes pauvres ne pourront pas aider, et la communauté de communes n’est pas compétente », explique Gérard Lheureux. Celui-ci a envoyé un courrier à 37 communes, sur les 71 que compte la communauté. Puis il a provoqué des réunions avec les élus. « Sauver la maison médicale, c’est aussi sauver la pharmacie. Elle a embauché pour augmenter son amplitude d’heures, mais si elle ferme tout le monde s’alarmera. »
Le maire de Crécy a proposé aux communes une cotisation de 10 euros par habitant, pour un engagement annuel sur trois ans. Mi-janvier, dix-neuf communes avaient répondu favorablement, d’autres réponses étaient encore attendues. « L’avenir de ces professions de santé n’est pas de rester seules chez soi. Il faut partager entre les professionnels. Pour des élus, avoir un tissu de santé permet d’attirer de nouveaux habitants », conclut-il.
A la Une
Gel des prix sur le paracétamol pendant 2 ans : pourquoi, pour qui ?
Salon des maires
Trois axes d’action pour lutter contre les violences à l’officine
Médication familiale
Baisses des prescriptions : le conseil du pharmacien prend le relais
Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens
Retraite des pharmaciens : des réformes douloureuses mais nécessaires