Lucien Bennatan, président du réseau Act Pharmacie (créé avec Willy Hodin et Dominique Brasseur, cofondateurs du groupe PHR en 1991), a tiré début novembre un premier bilan du nouveau groupement, six mois après sa création.
Une croissance notable
Aujourd'hui, le groupement compte 47 pharmacies adhérentes, avec une quarantaine d'autres qui devraient le rejoindre avant la fin de l'année. En plus de ces futurs adhérents, deux groupements régionaux, Integral Pharma et Insta Pharma (qui représentent 186 pharmacies) ont manifesté leur volonté de se joindre à Act Pharmacie. « Nous avons encore un bon potentiel de croissance », juge Lucien Bennatan, qui se félicite de ces bons chiffres. Mais la croissance n'est pas une fin en soi pour le groupement « Ce qui nous préoccupe, c'est l'avenir des pharmacies. Nous ne sommes pas dans une démarche capitalistique vénale », explique-t-il.
Une stratégie d'achat au bénéfice de la marge
Act Pharmacie met en avant son système d'achat, porté par Actmazon (un partenariat avec Pharmazon). « C'est un aspect important pour nous. Il est impératif de faire gagner du temps au pharmacien afin qu'il puisse se concentrer sur son métier et développer le potentiel de son officine. Mais pour ça, il faut garantir la disponibilité des médicaments et produits dont il a besoin. » Pour y arriver, le groupement se concentre uniquement sur les médicaments à forte marge (40 %) pour les pharmaciens, avec 250 laboratoires partenaires, dont Biogaran, Zydus et EG labo pour les génériques, et un réseau de shortliners avec plus de 2 500 produits. Par ailleurs, 300 produits MDD (Alvita de Allianz et NEP de Nepenthès) font aussi partie du catalogue. « En suivant nos préconisations d'achat, nos adhérents peuvent atteindre 20 000 euros de marge supplémentaire », affirme Lucien Bennatan.
Répondre à une médecine à deux vitesses
Mais la priorité d'Act Pharmacie reste de répondre aux évolutions du système de santé. « Nous sommes en train de créer une médecine à deux vitesses », constate Lucien Bennatan : « Les déserts médicaux s'étendent, et près de 15 % des Français n'ont pas d'accès à un laboratoire d'analyses médicales. En 2024, la France comptera davantage de citoyens de plus de 65 ans que de moins de 15 ans. Or 20 % des plus de 65 ans ont une maladie chronique, 30 % suivent plusieurs traitements… Il y a urgence ! »
Le groupement travaille sur plusieurs services, qu'il espère pouvoir lancer dès l'année prochaine. Le premier est la création d'un logiciel de pré-diagnostic, conçu en partie avec une intelligence artificielle à apprentissage automatique, qui prend la forme d'un questionnaire intégré au LGO de la pharmacie (Pharmony, Pharmaland, Smart RX, LEO…) : « Aujourd'hui, le 15 sert de centre de triage. Le pharmacien pourrait jouer ce rôle de régulateur, en vérifiant si un simple médicament suffit pour guérir le patient, s'il faut entamer un entretien plus poussé, ou s'il faut l'envoyer voir un médecin », avance Lucien Bennatan.
Le second est un programme de soins et de support post-cancer, où les pharmaciens accompagneraient les personnes (bilan de médication, suivi diététique…) ayant eu un cancer afin d'améliorer leur qualité de vie, de réduire les séquelles et de prévenir les rechutes. Un soutien qui passerait aussi par l'utilisation des locaux des pharmacies afin de créer des groupes de rencontre et d'écoute entre les patients.
Mars 2024 verra aussi l'arrivée de la première officine sous enseigne Act Référence, ainsi que les premières ébauches d'une MDD propre au groupement.
Autre projet, cette fois pour 2027, lancer une offre d'examens biologiques médicaux délocalisés simples, similaire à ce qui se fait en Italie. « Avec ce système, les gens n'auraient plus besoin de faire des dizaines de kilomètres en voiture afin d'entrer dans un laboratoire pour faire une simple prise de sang ! », explique Lucien Bennatan, qui espère que ces offres pourront développer ce rôle de pharmacien qui conseille, dépiste, oriente, prédiagnostique et régule.
Un « modèle Medicare à la française »
Outre ces initiatives internes, Act Pharmacie souhaite impulser la création d'un « modèle Medicare à la française », qui consiste à faire suivre aux patients de plus de 65 ans un programme d'éducation et d'accompagnement thérapeutique, et lier la prise en charge des soins au suivi de ce programme. Une initiative qui a permis aux États-Unis, selon le dirigeant du groupement, de réduire de 16 % la prescription de médicaments, de 20 % la chronicité entre 60 et 70 ans, et de 21 % le nombre de passages aux urgences chez les patients suivant ces formations*. « Mais ce n'est pas avec nos 47 pharmacies que l'on peut lancer un tel projet ! », reconnaît Lucien Bennatan, qui déclare vouloir s'associer à d'autres groupements pour pouvoir au moins expérimenter ce service dans le cadre de l'article 51.
* Rapports 2023 de la commission du budget du Sénat américain.
D'après une conférence de presse organisée le lundi 6 novembre.
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