« C’est une question de crédibilité de l’action publique. » Agnès Buzyn, ministre de la Santé, explique : « on ne peut pas rendre la vaccination obligatoire pour les enfants pour les protéger et pour atteindre le taux de couverture vaccinale qu’on estime nécessaire pour protéger un pays, et, en tant que soignant, ne pas donner l’exemple de la vaccination contre la grippe, pour protéger nos aînés, les personnes fragiles, les nourrissons. » Les professionnels de santé sont donc personnellement appelés à « adopter une conduite exemplaire en veillant à ne pas propager involontairement l’infection » et élever leur taux de couverture, très inégal d’une profession à l’autre, qui tournerait actuellement autour des 25 % (mais une enquête des Ordres professionnels dévoilée en mars dernier élève ce taux à 46 %). « Je sais pouvoir compter sur eux pour qu’ils se vaccinent, en particulier les professionnels de premier recours qui doivent aussi sensibiliser leurs patients à l’importance de la vaccination. » Ce ne sont pas que des mots pour la ministre de la Santé qui, dès le lendemain de ses déclarations, inaugurait le kiosque vaccination aux Entretiens de Bichat et se faisait vacciner contre la grippe.
Un acte individuel et solidaire
Néanmoins, si cet appel n’était pas entendu, la ministre réfléchira à mettre en place des mesures incitatives, voire coercitives. Agnès Buzyn préfère croire en une prise de conscience de la communauté des soignants. « Il me paraît indispensable, quand on travaille en EHPAD ou en milieu hospitalier avec des personnes très âgées, fragilisées, de leur assurer cette protection minimale. » Et de rappeler qu’effectivement, « la vaccination n’est pas seulement un acte individuel, il est aussi destiné à protéger son entourage, éviter la contamination des plus vulnérables et la survivance de la maladie dans l’environnement ». A contrario, ne pas se vacciner revient à « compter sur la vaccination des autres pour ne pas être exposé ».
Or le constat est amer. La saison 2016-2017 comptabilise 14 400 décès surnuméraires directement liés à la grippe. « Ces drames sont d’autant plus regrettables que nous pouvons les éviter », déplore la ministre. En cause : la baisse continue, depuis plusieurs années, du taux de couverture vaccinale contre la grippe, alors même que le nombre de personnes invitées à se faire vacciner contre une prise en charge totale de l’Assurance-maladie ne cesse d’augmenter. « Moins de la moitié des concitoyens invités à se faire vacciner sont couverts, nous sommes donc loin des 75 % recommandés par l’OMS », ajoute Agnès Buzyn. Or, si l’on atteint une couverture de 2/3 des personnes concernées, « nous pourrions sauver près de 3 000 vies », insiste-t-elle. Comme le souligne le Dr Daniel Lévy-Bruhl, responsable de l’unité infection respiratoire et vaccination de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), la saison 2016-2017 a été marquée par « une épidémie précoce, d’intensité modérée en nombre de cas en consultation, avec la circulation quasi exclusive du virus H3N2, qui a occasionné des grippes sévères en grand nombre chez les personnes âgées, caractérisée par un excès de mortalité toutes causes à plus de 20 000 décès, dont environ 14 400 probablement liés à la grippe ».
Hiver sans grippe
C’est dans ce contexte que l’Assurance-maladie a lancé vendredi une campagne de communication baptisée « Ne laissons pas la grippe nous gâcher l’hiver ». En plus des affiches, dépliants et informations aux professionnels de santé, la campagne prend une orientation grand public avec la diffusion d’un spot publicitaire sur 7 chaînes de télévision et différents sites Internet, des annonces dans la presse grand public, une vidéo pédagogique diffusée dans les espaces d’accueil des caisses l’Assurance-maladie et sur les réseaux sociaux, l’ouverture d’une page Facebook « Hiver sans grippe ». « La grippe s’inscrit dans la vie quotidienne, dans un hiver comme les autres, comme un événement courant, mais à l’échelon individuel, cela peut devenir un événement dramatique. C’est pourquoi nous voulons faire de la vaccination un geste courant, presque automatique, un premier réflexe à adopter avant l’hiver qui sera suivi de gestes d’hygiène », détaille le Pr Olivier Lyon-Caen, médecin-conseil national de la Caisse nationale d’Assurance-maladie. L’an dernier, 56 % des plus de 65 ans se sont fait vacciner contre la grippe, mais ce taux tombe à 37 % chez les 65-69 ans et à 36 % chez les malades chroniques. « L’information sur la campagne a commencé il y a trois semaines auprès des professionnels de santé, insiste le Pr Lyon-Caen. Cette campagne ne fonctionnera que s’ils sont pleinement impliqués dans ce défi. »
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