Les signalements de dérives sectaires ont connu « une augmentation significative » en 2021, selon le dernier rapport de la mission interministérielle chargée de lutter contre ces phénomènes (Miviludes). La santé concentre à elle seule près d'un quart des saisines.
« Les dérives liées à la santé sont parmi les plus inquiétantes », tel est le constat alarmant fait par Sonia Backès, secrétaire d'État à la Citoyenneté, à l'occasion de la publication du rapport annuel de la Miviludes sur les dérives sectaires. Sur l'ensemble des saisines reçues par l'office de lutte contre les dérives sectaires en 2021, près d'un quart (744) sont en lien avec la santé. Parmi ces derniers, près de 70 % se rapportaient à des « pratiques de soins non conventionnelles telles que la naturopathie, le reiki, ou la nouvelle médecine germanique », détaille le rapport de la Miviludes.
Le document consacre un large chapitre aux pseudo-guérisseurs. Une galaxie de charlatans aux profils très divers. On y retrouve notamment tous les psychothérapeutes, psychospécialistes et autres psychosomatothérapeutes autoproclamés qui utilisent ces termes pompeux « pour tromper le client ». Les défenseurs de « la méthode Hamer » (ou nouvelle médecine germanique) qui considèrent que « tout cancer, et plus généralement toute maladie, résulte d’un choc psychologique intense vécu par le patient », prétendent qu'identifier l'origine du traumatisme suffit à guérir la maladie et détournent les malades des solutions thérapeutiques efficaces. Les fanatiques du jeûne, notamment les adeptes du « respirianisme », une pratique qui consiste à ne se nourrir que d'air et de lumière pendant 21 jours et serait déjà responsable de 7 décès à l'étranger, selon les experts de la Miviludes. Tous les « dérapeutes » (contraction des mots dérapages et thérapeute) qui convainquent des individus souvent fragiles de se détourner des méthodes conventionnelles (le crudivoriste Thierry Casasnovas, le militant anti-vaccin Jean-Jacques Crèvecoeur…). Une liste qui n'est, bien sûr, pas exhaustive.
Autant de mouvances qui proposent souvent des stages aux personnes intéressées afin de les former à leurs méthodes. Comme le rappelle la Miviludes, les conséquences peuvent être désastreuses. « Les coûts induits par les stages ou les conférences peuvent très vite devenir exorbitants ; l’affaiblissement et l’isolement des participants peuvent les conduire à la rupture de tout lien avec le milieu familial ; les carences alimentaires peuvent dangereusement affaiblir les participants, les rendant plus facilement manipulables et exploitables ; les discours préconisant une médecine parallèle non éprouvée peuvent inciter les participants à se détourner de la médecine conventionnelle et de leurs traitements médicaux », souligne le rapport.
Les dérives sectaires liées à la santé constituent aujourd'hui « un enjeu de santé publique » et leur coût pour la société « peut s'avérer considérable », estime la Miviludes. Elles tuent déjà aujourd'hui. Deux personnes souffrant d'un cancer sont ainsi décédées après avoir suivi les préceptes d'un naturopathe qui prétendait les aider à guérir « grâce à des remèdes naturels tels que des cocktails d'huiles essentielles, une alimentation centrée sur des jus de fruits et de légumes et des jeûnes sévères et prolongés ».
Si les dérives sectaires dans le domaine de la santé sont loin d'être nouvelles, la pandémie de Covid-19 a servi de « catalyseur des peurs et des frustrations », poussant de nombreuses personnes, dubitatives sur les vaccins anti-Covid ou opposées aux mesures restrictives prises pendant la pandémie, dans les bras d'individus particulièrement dangereux. Toute catégorie confondue, la Miviludes a reçu 4 020 saisines en 2021, soit une hausse de 33,6 % par rapport à l'année précédente et de près de 50 % par rapport à 2015.
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