Ce jeudi 10 octobre, le Projet de loi de finances de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 va être officiellement présenté en Conseil des ministres. Alors que le déficit de la Sécu devrait atteindre les 18 milliards d’euros en 2024, le gouvernement s’apprête à annoncer des mesures d’économies d’ampleur. De leur côté, les pharmaciens redoutent surtout de nouvelles baisses de prix sur les médicaments et espèrent de véritables avancées sur la substitution des biosimilaires et des hybrides.
La Commission des comptes de la Sécurité sociale avait initialement tablé sur un déficit de 16,6 milliards d’euros en 2024, contre 10,5 milliards initialement programmés dans le budget adopté l'année dernière par le Parlement. Finalement, le dérapage devrait être encore plus important. Une dernière estimation évalue en effet à 18 milliards d’euros le déficit de la Sécu en 2024, selon plusieurs sources ayant eu connaissance du PLFSS 2025. Sans mesures d’économies drastiques, le déficit de la Sécu pourrait même atteindre les 25 milliards d’euros en 2025.
Parmi les mesures envisagées, le report de six mois de la revalorisation des retraites, pour économiser 4 milliards d’euros. L’indexation des retraites sur l’inflation, prévue au 1er janvier, serait donc reportée au 1er juillet. Une piste qui suscite toutefois de vives oppositions politiques et qui n’est pas certaine de rester en l’état. Le gouvernement voudrait également répartir différemment les allègements de cotisations patronales, aujourd'hui fortement concentrés au niveau du SMIC, pour que les salariés les moins bien payés puissent être augmentés plus facilement. Une réforme qui pourrait générer 5 milliards d’euros d’économies. Également dans le viseur, les arrêts maladie, dont le coût pourrait « dépasser 17 milliards d'euros » en fin d’année selon le directeur de l’assurance-maladie, Thomas Fatôme. Selon « Les Échos », le gouvernement envisage d'abaisser le plafond d'indemnisation (le faisant passer de 1,8 à 1,4 SMIC) plutôt que d’étendre le délai de carence, comme l’avait proposé la Cour des comptes. Montant de l’économie espérée : près de 600 millions d’euros.
Mesure sans doute la plus emblématique parmi celles envisagées, la volonté de faire baisser la part de l’assurance-maladie dans le remboursement des consultations chez le médecin, en augmentant celle des complémentaires santé. Mesure qui, si elle est retenue, ferait mécaniquement augmenter les tarifs des complémentaires. Le taux de remboursement de la Sécu sur les consultations médicales passerait de 70 à 60 %. Ainsi, sur une consultation à 30 euros (le montant en vigueur à partir du 1er janvier), la Sécu verserait 18 euros et les mutuelles 12 euros. D’autres solutions envisagées pour réduire le déficit de la Sécu pourraient s’annoncer elles aussi assez impopulaires. On peut évoquer notamment la mise en place « d’un plan d'action afin de vérifier la pertinence des transports de malades », l’idée de faire davantage contribuer les patients en affection longue durée (ALD) ou encore la possibilité de durcir les conditions d’accès à l’aide médicale d’État (AME). Les budgets des hôpitaux devraient eux aussi être limités.
L’assurance-maladie compte également poursuivre son offensive contre les fraudes, avec l’objectif de réaliser 420 millions d'euros d’économies dans ce domaine, notamment en réduisant les hospitalisations évitables et en agissant contre le gaspillage des produits de santé. Une lutte contre les fraudes à laquelle les pharmaciens sont déjà largement invités à participer (généralisation du dispositif ASAFO contre les fausses ordonnances, bon usage…). Autre sujet qui concernera les pharmaciens au premier chef, de nouvelles baisses de prix à prévoir sur les médicaments. Malgré les alertes des industriels du secteur le nouveau ministre de l’Industrie, Marc Ferracci, a récemment prévenu que « des efforts » et des « arbitrages difficiles » seraient nécessaires.
Les syndicats de pharmaciens espèrent aussi que l’assurance-maladie osera (enfin) miser sur les biosimilaires et les hybrides, Une estimation récente du GEMME (association GEnérique Même MEdicament) rappelait ainsi que si la substitution des médicaments hybrides et des biosimilaires était appliquée de manière optimale (c’est-à-dire avec la possibilité pour le pharmacien de substituer dans tous les répertoires telle que la réglementation le lui permet), la réduction des coûts pour l’assurance-maladie s’élèverait à 160 millions d’euros. « Il est plus que temps que nous puissions enfin substituer largement les biosimilaires et les hybrides à l’officine », insistait cette semaine encore Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). Il y a quelques jours, son homologue de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), Pierre-Olivier Variot, annonçait avoir déposé, dans le cadre du PLFSS, « un amendement sur les biosimilaires, pour que ces derniers puissent entrer dans la course et être au même niveau de prise en charge que les génériques ». Au vu des difficultés économiques actuelles du réseau, les mesures contenues dans ce PLFSS seront observées avec plus d’attention que jamais.
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