Le Quotidien du pharmacien. - Le projet d’une « Grande Sécu » vous semble-t-il pertinent ?
Jean-Jacques Zambrowski. - Dans cette période préélectorale, le gouvernement cherche à gagner l’adhésion des couches populaires, notamment des populations qui seraient susceptibles de nourrir le mouvement des « Gilets jaunes ». Il s’agit principalement des 5 à 7 % de Français qui ne bénéficient pas d’une couverture de complémentaires santé satisfaisante, à l’inverse de l’écrasante majorité des salariés. Ce projet de « Grande Sécu » est donc en priorité une mesure d’équité sociale. Il est évident que du point de vue des organismes complémentaires (mutuelles et assureurs), cette transformation de notre système, si elle venait à voir le jour, entraînerait des bouleversements importants. De toute évidence, leur chiffre d’affaires s’effondrerait. Pour autant, rien n’indique qu’elles ne pourraient préserver leur rentabilité…
Des organismes complémentaires dont les frais de gestion sont par ailleurs importants, estimés à 29,3 % en moyenne par remboursement… À propos des tâches administratives, les pharmaciens pourraient-ils, quant à eux, espérer d’une « Grande Sécu » un allégement du poids de ces charges ?
Je ne pense pas qu’il faille raisonner en ces termes. Bien au contraire, davantage qu’une surcharge de travail, la mise à jour de la complémentaire santé au comptoir doit être considérée comme un atout essentiel dans la relation client et dans la fidélisation. Et le pharmacien aura tout intérêt à maintenir ce lien. Il y a d’ailleurs fort à parier que, dans la perspective d’une « Grande Sécu », les organismes complémentaires, soucieux de conserver leur clientèle, rivalisent de créativité et développent de nouveaux produits sous forme de paniers de soins, ciblant des produits aujourd’hui non remboursés ou insuffisamment pris en charge. Bien entendu, cette démarche pourra également porter sur des prestations innovantes comme des entretiens nutrition, un bilan dermatologique, des tests ophtalmo ou auditifs…
Alors que la part des organismes complémentaires dans le remboursement du médicament s’infléchit d’année en année, l’officine aurait donc tout à gagner de ce repositionnement des mutuelles et des assureurs ?
Sans aucun doute. Le pharmacien doit investir dans la proximité qu’il entretient avec son client. Il aura tout intérêt à savoir auprès de quel organisme complémentaire est assuré ce patient afin de pouvoir lui proposer les services correspondant à sa couverture. On pourrait ainsi imaginer que les groupements et enseignes de pharmacie se saisissent de cette nouvelle opportunité pour lier des partenariats avec des organismes complémentaires. Le logo de la mutuelle pourrait alors être affiché sur la vitrine, identifiant ainsi la pharmacie participante auprès des assurés. Il va sans dire qu’il s’agirait d’un dispositif gagnant-gagnant, aucun pharmacien ne pouvant développer de manière isolée de telles prestations.
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