La santé est une préoccupation majeure des Français. Et pourtant elle n’est abordée que depuis peu par les postulants à l’élection présidentielle. D’ailleurs, selon une enquête réalisée par Harris Interactive pour la Fédération nationale de la mutualité française (FNMF), « si 3 Français sur 4 se déclarent intéressés par la campagne, 72 % d’entre eux estiment les candidats ne parlent pas assez de santé ». Forte du succès de son site PlacedelaSanté.fr, la FNMF, en partenariat avec trois think tanks - la Fondapol, la Fondation Jean-Jaurès et Terra Nova - a donc proposé à l’ensemble des prétendants à la fonction suprême de venir exposer leur programme santé.
Sans Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, qui n’ont pu être présents faute de place dans leur agenda, cinq d’entre eux - Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France), François Fillon (Les Républicains), Benoît Hamon (la Belle Alliance Populaire), Yannick Jadot (Europe Écologie les Verts), qui s'est finalement désisté pour Benoît Hamon, et Emmanuel Macron (En Marche) - sont ainsi venus présenter leur vision de la protection sociale et des moyens à mettre en œuvre pour en garantir l’avenir.
Un grand oral peu convaincant et à l’image du ressenti des Français enclins à penser que « les propositions des candidats sont déconnectées de leurs préoccupations ». Et pour cause ! Quand bien même les prétendants auraient essayé de répondre aux deux sujets jugés majeurs par nos concitoyens - le financement de la protection sociale et l’accès aux soins pour tous -, ils n’ont rien offert d’autres qu’une resucée de vieilles recettes. Une vacuité des discours qui fait dire au président de la Mutualité française, Thierry Beaudet, que « les candidats semblent avoir improvisé sur leur programme santé ».
Alors que pour les Français, la réduction du déficit de la Sécurité sociale passe en priorité par une meilleure organisation du système de santé, les candidats sont ainsi restés sur des poncifs, faisant pour les uns la part belle aux médecins, et pour les autres à l’hôpital. Une aberration à l’heure où la plupart des experts s’accordent à reconnaître qu’il convient de développer les coopérations interprofessionnelles, avec pour corollaires les délégations de tâches ou pratiques avancées. Conséquence : pas un mot sur les pharmaciens et sur l’opportunité de confier de nouvelles missions aux officinaux. Au moment où les négociations conventionnelles s’engagent, les représentants syndicaux apprécieront sûrement.
Économies pour Fillon
Après avoir réaffirmé le « rôle central de la santé dans le pacte républicain » et confirmé sa volonté de lui « garder une place prééminente », François Fillon est resté ferme sur son ambition de réaliser 20 milliards d'euros d'économies pendant le prochain quinquennat, tout en maintenant un cap : « mieux soigner, mieux rembourser, mieux gérer ».
L’occasion de réaffirmer le rôle complémentaire que devront jouer les mutuelles et autres organismes de prévoyance, en particulier « pour l'optique adulte et les dépassements d'honoraires ». Dans cette perspective et s’il est élu, François Fillon convoquera avant la fin de l'année « des États généraux de la santé pour finaliser, de manière consensuelle, les pistes à prendre et clarifier le rôle de chacun ». Le candidat de la droite entend également généraliser une « consultation prévention ». Biennale et plus longue qu’une consultation classique, elle concernerait tous les Français et serait rémunérée autour de 40 euros pour les médecins traitants. Dans la même optique les missions de la médecine scolaire et de la médecine du travail seraient renforcées notamment pour la nutrition, le sommeil, et la lutte contre les addictions. Ce plan prévention s’attaquera enfin au problème de l'observance… sans que ne soit cité le pharmacien.
Prévention pour Macron
Tout en lançant un plan d'investissement de 5 milliards d'euros dans l'hôpital et l'innovation médicale, Emmanuel Macron prévoit lui aussi de réaliser d'importantes économies sur l'assurance-maladie au cours des cinq prochaines années. « En maintenant un objectif national des dépenses d’assurances maladie (ONDAM) à +2,33 %, 15 milliards d'économies seront réalisées par rapport au tendanciel » a ainsi expliqué l’ancien ministre de l’Industrie et du Numérique. Comment ? Grâce à « une politique volontariste de prévention » et à un remboursement approprié des soins, « y compris les plus petits qui paraissent anecdotiques, afin d’éviter l'apparition de pathologies beaucoup plus lourdes ».
Dans la perspective d’« une meilleure organisation de l'offre de soins et pour éviter des recours inutiles à l'hôpital », le candidat d’En Marche envisage d’« élargir au privé les groupements de territoire (GHT) ». En clair, d’éviter les concurrences anarchiques entre les différents acteurs en favorisant un travail concerté entre libéraux et hospitaliers, qu'ils soient privés ou publics. Une vision qui conduit également Emmanuel Macron à envisager de créer des « maisons de suite permettant de passer d'un environnement hospitalier coûteux à un environnement médicalisé beaucoup moins lourd ». Et dans la même optique, il entend développer des maisons de santé pluriprofessionnelles.
Licence d’office pour Hamon
S’inscrivant dans la continuité du quinquennat de François Hollande, Benoit Hamon s’est quant à lui déclaré prêt à achever la généralisation de la complémentaire santé à tous les Français et notamment « aux fonctionnaires, aux retraités et aux étudiants qui n'en jouissent pas ». L’occasion pour le candidat socialiste d’« envisager d'une manière ou d'une autre une contribution ou impôt supplémentaire » afin de couvrir les 3,5 milliards d'euros qu’engendrerait cette dépense. À moins qu’il ne compte sur une baisse des prix des médicaments, qu’il considère « exorbitants » et pour lesquels il n’exclut pas de « recourir à la licence d'office dès lors que les prix du marché ne correspondent pas à la réalité des coûts de production ». D’autant que le candidat socialiste prévoit par ailleurs « l'automatisation de l'accès au droit à la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) pour les plus pauvres ».
* Enquête réalisée en ligne, par Harris Interactive, du 30 janvier au 7 février, auprès d’un échantillon de 2 000 personnes représentatif des Français âgés de 18 ans et plus, tenant compte des critères de sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle et région de l’interviewé(e).
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