LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN. – Votre mandat à la tête de l’USPO arrive à sa fin. Serez-vous candidat à votre propre succession ?
GILLES BONNEFOND. – Oui. L’assemblée générale de l’USPO est fixée au 28 mars, mais je peux d’ores et déjà déclarer que je me porte candidat pour mener un deuxième mandat à la tête de l’USPO.
Quels sont vos objectifs ?
Je souhaite continuer à renforcer les équipes et à intégrer de nouveaux départements, et de jeunes adhérents dont le nombre augmente régulièrement. Nous sommes sur une dynamique positive. Aujourd’hui, notre syndicat réunit plus de 2 700 pharmaciens. Nous progressons entre autres en région PACA, dans le Nord-Pas-de-Calais, en Midi-Pyrénées, en Languedoc-Roussillon et en Corse. Ce mandat ne sera pas facile car l’officine subit la forte pression exercée sur les dépenses de santé, et les recettes ne pourront pas augmenter, compte tenu du ras-le-bol fiscal de nos concitoyens. Nous allons être exposés à des mesures difficiles pour l’officine. Le contexte économique sera d’autant plus défavorable que la réforme de la rémunération qui se dessine risque d’être dramatique pour la profession.
Vous restez très hostile à la réforme de la rémunération proposée par l’assurance-maladie ?
En effet, cette réforme représente une énorme prise de risque. L’instauration d’un honoraire d’un euro par boîte dispensée aggrave la baisse des prix de tous les médicaments de plus de 1,91 euro et ne protège pas les pharmaciens. Cet euro va être distinct du prix du médicament, ce qui entraînera une concurrence avec les médicaments délivrés sans ordonnance. Il y aura un réveil très douloureux si nous n’arrivons pas à contrer cette réforme. Une réforme à laquelle les officinaux n’adhèrent pas, comme le montre notre enquête. J’ai déjà fait plus de trente réunions dans toute la France et je peux vous dire qu’ils la rejettent massivement. On ne peut pas imposer une réforme aussi importante contre le gré d’une profession. Et puis, peut-on confier 47 % de notre rémunération à l’assurance-maladie qui déclare qu’il y a, en France, 10 % de pharmacies en trop* ? Je me pose sérieusement la question.
Dans ces conditions, pourquoi avoir signé le protocole d’accord avec l’assurance-maladie ?
Ce protocole d’accord comprend trois parties : les honoraires, les génériques et les nouvelles missions. Et chacune de ces parties fera l’objet d’un avenant spécifique. Nous avons signé le protocole d’accord afin de pouvoir continuer à participer aux négociations sur les génériques et la partie métier (asthme, traitements substitutifs aux opiacés…), tout en émettant par écrit au ministère et à la CNAM, les plus grandes réserves sur les paramètres de la nouvelle marge. Pour nous, ces paramètres ne sont qu’une hypothèse de travail qu’il faut revoir.
Vous ne signerez donc pas l’avenant rémunération en l’état ?
Non, je ne signerai pas la réforme avec une révision de la marge dégressive lissée (MDL) telle qu’elle est envisagée aujourd’hui. Nous voulons renégocier ce point. Mais ce n’est pas facile, car le gouvernement et le syndicat majoritaire** poussent pour geler la situation.
Vous aviez fixé comme préalable à la réforme de la rémunération la finalisation des négociations sur les remises génériques. Où en est ce dossier ?
Nous avons été reçus la semaine dernière par le ministère de la Santé pour évoquer ce point. Et pour l’USPO, c’est clair, le taux de remises sur les génériques doit être le plus élevé possible, c’est-à-dire de 50 %. Nous avions demandé un déplafonnement total des remises, ce qui n’a pas été retenu. Nous souhaitons désormais que ce taux soit le plus haut possible. Car en dessous de 50 %, les pharmaciens perdront de l’économie, alors même qu’ils sont les principaux acteurs du développement du générique en France. Et grâce à leur engagement dans la substitution, les dépenses liées au poste médicament sont aujourd’hui maîtrisées. Cet arrêté doit sortir très vite pour clarifier les règles pour cette année.
La suppression de la vignette pharmaceutique prévue le 1er juillet 2014 est un autre sujet qui vous inquiète…
Tout à fait. Nous venons de recevoir le projet d’arrêté entérinant cette suppression. Il prévoit de nouvelles règles pour l’écoulement des stocks qui serait fixé, pour l’ensemble des spécialités, à 30 jours, sans distinction pour les génériques ou les grands conditionnements. Ce n’est pas acceptable pour nous. D’autant qu’un autre projet d’arrêté est dans les tuyaux : il concerne l’inscription sur les boîtes de médicaments de la mention SMR faible ou insuffisant. Et dans les prochaines semaines, un autre débat va s’ouvrir sur la dispensation à l’unité des antibiotiques, que nous refusons en bloc. Les pharmaciens n’en veulent pas. Pour nous, la coupe est pleine.
**La Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).
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