Le Quotidien du pharmacien. — Quels sont les principaux objectifs que doit viser la démarche d'une officine engagée sur la voie de la certification ?
Laëtitia Hible.- Si l'on considère aujourd'hui l'évolution de la pharmacie d'officine et la volonté politique de proposer au patient un parcours interprofessionnel, le pharmacien se place comme un acteur essentiel de ce parcours. Dans ce contexte de meilleure prise en charge du malade, le pharmacien va avoir besoin de deux choses, d'abord de réorganiser son officine afin de gagner en efficacité et de pouvoir se dégager du temps, notamment pour les nouvelles missions, mais aussi de sécuriser ses actes.
Quels prérequis doit prendre en compte un titulaire avant d'engager son officine et son équipe dans la procédure qualité/certification ?
Si je ne devais faire qu'une réponse à cette question, je dirais qu'il faut avant tout que le titulaire fasse preuve d'ouverture d'esprit. Car il doit pouvoir remettre en cause sa façon de travailler. La mise en place de nouveaux process va réorganiser le fonctionnement de sa pharmacie. Il faut également avoir à l'esprit que la démarche qualité vers la certification est un projet d'équipe. Un titulaire ou un PRAQ (pharmacien responsable de l'assurance qualité) seuls n'y arriveront pas. Cela ne fonctionne que si l'équipe se sent concernée par l'amélioration continue liée à la démarche.
Certains personnels vivent pourtant la démarche qualité comme une mesure punitive…
C'est tout le contraire ! On a vraiment mis en évidence un mieux-être des équipes grâce à la diminution des irritants du quotidien, c'est-à-dire tous les dysfonctionnements qui peuvent nuire à la qualité de vie professionnelle. Par exemple, en améliorant la gestion des tickets de promis qui est souvent génératrice de tensions. La disparition, ou du moins l'atténuation de tous ces micro-dysfonctionnements, fait que l'équipe fonctionne mieux et cela finit par se ressentir au comptoir.
Au-delà de la sécurisation de la délivrance, peut-on raisonnablement promettre un gain de productivité et de rentabilité à l'officine certifiée ?
Absolument. Nous avons même mené une enquête l'an passé pour objectiver cela. Nous savions que la démarche qualité amenait un mieux-être dans les pharmacies mais nous voulions vérifier et quantifier ce bénéfice en chiffres. Notre enquête sur une quarantaine d'officines s'est concentrée sur quelques situations identifiées comme chronophages, telle les erreurs de délivrances. Il y a quelques années nous avions évalué ces erreurs à 0,35 % des dossiers. Lors de l'enquête de 2017, lorsque l'équipe était impliquée sur cet indicateur-là, en appliquant notamment le principe du double contrôle, ce chiffre est tombé à 0,17 %. Ce qui correspond en moyenne par officine et par mois à 7 erreurs évitées. Si l'on considère que chaque erreur fait perdre 10 minutes en moyenne à l'équipe, et qu'on valorise ces minutes à 1 euro chacune, on arrive à une économie de 840 euros par an. En appliquant ce type de calcul à d'autres actes, tel le traitement des rejets de CPAM, la gestion des promis, les ventes ratées, la diminution du stock, etc... nous sommes parvenus à un total de 17 000 euros par an qui pourraient ne disparaître ni dans le fonctionnement, ni dans le stock.
Et à cette rentabilité purement financière, il faut bien sûr ajouter le bénéfice en mieux-être de l'équipe, qui retentit également sur la fidélisation du personnel de l'officine. Ce qui n'est pas négligeable pour le titulaire, même si ce critère n'est pas véritablement quantifiable.
Avec quels outils et moyens Pharma Système Qualité soutient-il la démarche de certification ?
Ils sont nombreux. Le premier groupe réunit les outils matériels. C'est d'abord le manuel qualité que nous donnons à nos adhérents chaque année et qui reprend tous les référentiels de nos univers, du management à l'accueil du patient en passant par la dispensation. Dans chaque univers, il y a des outils opérationnels, soit 180 au total. Il s'agit essentiellement de fiches thématiques. Puis il y a l'accompagnement physique, un dispositif qui diffère selon que la pharmacie fait partie ou non d'un groupement. À savoir, sur 2 300 adhérents nous avons 150 officines vraiment indépendantes. Le responsable qualité de chaque groupement fait également partie de nos comités de pilotage qui sont au nombre de 5 par an. L'évolution de notre démarche qualité est ainsi une entreprise collaborative. Quant aux pharmaciens indépendants, ils sont accompagnés dans leur démarche par notre partenaire, Caron Consultants, par le biais de chefs de projets.
Nous avons également un portail internet Pharma Système Qualité, sur lequel le pharmacien pourra trouver tous les outils évoqués ainsi que l'actualité de l'association.
Par ailleurs, nous réalisons des audits internes dans environ 800 pharmacies chaque année.
Enfin, nous travaillons cette année à la mise au point d'un logiciel de qualité officinale (LQO), qui va permettre aux pharmaciens de réunir l'ensemble des éléments nécessaires à la démarche de certification (appels médecins, fiches de dysfonctionnements, etc...). Toutes ces informations seront centralisées sur un logiciel ce qui permettra de simplifier les synthèses mensuelles et annuelles. Cet outil devrait sortir en fin d'année.
Quel rôle les groupements de pharmaciens jouent-ils dans la démarche de certification ?
Les groupements ont porté la démarche qualité dès son origine. Et si Pharma Système Qualité parvient à vivre en autonomie, elle le doit aux groupements. Ils ont été les moteurs du développement. Réseau Santé, Ceido, Cofisanté, Forum Santé, mais aussi PHR, Giropharm, Giphar, etc... Au total aujourd'hui 17 groupements sont associés à la démarche qualité, soit en nous confiant leurs pharmacies, soit en participant à nos comités de pilotage par le biais d'un responsable qualité.
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