Le Quotidien du pharmacien.- L’homéopathie a-t-elle toujours suscité des controverses ?
Pr Olivier Faure.- Initialement, l’homéopathie n’est pas déconnectée du reste de la médecine. Au départ, son créateur, Samuel Hahnemann, docteur en médecine, appartient au courant dominant de l’époque, fondé sur l’observation. Cependant, il s’en écarte rapidement en reformulant un principe permettant d’expliquer des phénomènes difficiles à relier : le principe de similitude, selon lequel les substances capables de générer un symptôme peuvent aussi susciter la guérison. Les réactions ont été telles que c’est autour de l’homéopathie que la nécessité d’évaluer un médicament a été exprimée pour la première fois de l’Histoire. Si les homéopathes ont accepté de fournir des études, celles-ci ont alimenté les controverses – notamment, à partir du vingtième siècle, en lien avec l’exigence notamment de randomisation que les homéopathes ne pouvaient satisfaire.
Ces controverses étaient-elles uniquement scientifiques ?
Le mode de fonctionnement de l’homéopathie a pu envenimer les débats : à certaines époques, les homéopathes ont formé une sorte d’église schismatique, souhaitant remplacer les anciennes pratiques par une « Nouvelle médecine » - et créant le terme d’« allopathes » pour désigner les autres médecins. Si bien que l’homéopathie a pu trouver un écho particulier par exemple après la Révolution, jusqu’à la seconde partie du 19e siècle. Là, de grands progrès scientifiques ont renouvelé la confiance du public vis-à-vis de la médecine conventionnelle – et provoqué un recul de l’homéopathie.
L’homéopathie est-elle vraiment si alternative et contestataire ?
C’est en s’appuyant sur une jambe contestataire et une jambe de la reconnaissance officielle que l’homéopathie a pu perdurer et se relever des coups durs. Par exemple, les homéopathes ont été capables de s’allier à d’autres courants contestataires, comme à la médecine néo-hippocratique, à la mode au lendemain de la première guerre mondiale. Et surtout, l’homéopathie a su s’intégrer au système dominant : la création de laboratoires pharmaceutiques homéopathiques a favorisé la diffusion des produits homéopathiques – pas si aisés à préparer. Et certains médicaments homéopathiques ont vite été pris en charge par les assurances sociales, puis, après la seconde guerre mondiale, par la sécurité sociale.
L’histoire de l’homéopathie touche-t-elle à sa fin ?
L’avenir est incertain, mais l’histoire de l’homéopathie est marquée par tant de fluctuations, de hauts et de bas, qu’il semble difficile d’en imaginer la disparition totale. Reste à savoir si en coupant la jambe officielle de l’homéopathie, le déremboursement n’aura pas renforcé sa nature contestataire – qui pourrait attirer certains individus critiques de la société.
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