AVEC SA BELLE FAÇADE XVIIe siècle, attribuée par certains à l’architecte royal François Mansart, l’hôtel de Miramion fut construit en 1630 par Christophe Martin, conseiller d’État et Contrôleur général des Écuries du roi, à côté des hôtels de Selve et de Nesmond, sur une parcelle cédée par le couvent des Bernardins. Il devint ensuite la propriété d’une jeune et riche veuve de vingt ans, Mme de Miramion, héritière d’un Beauharnais, qui en fit un lieu de charité voué aux entreprises de Saint Vincent de Paul, lui-même venant de créer non loin, à la porte Saint-Victor, un hospice pour les Enfants Trouvés. On a dit que Mme de Miramion créa la communauté séculière et laïque des Miramionnes à la suite d’un événement dont s’amusa le grand monde de l’époque : Roger de Rabutin, cousin de Mme de Sévigné, enleva la veuve, bien décidé à en faire son épouse. Celle-ci, loin de céder à la technique de séduction brutale de cet homme connu pour ses galanteries, se retira ensuite dans une vie de dévouement aux plus démunis en fondant dans son hôtel une institution pour l’instruction des petites filles et le soin aux malades. Ce qui fit dire à sa fille, Mme de Nesmond : « Les occupations de cette communauté sont de panser les pauvres, de saigner… elles font elles-mêmes toutes les drogues pour les malades, et les onguents pour les pauvres blessés, dont elles ont bien par jour près de deux cents. » Avec la Révolution, la communauté fut dissoute, en 1794, et l’hôtel de Miramion devint bien national. Eu égard à son passé de lieu de fabrication de remèdes, il fut choisi en 1812 pour accueillir le siège de l’apothicairerie générale des hospices civils, nouvellement appelée Pharmacie centrale des hôpitaux de Paris, une situation qui perdurera jusqu’en 1974.
La Pharmacie centrale devient musée.
Avec la nationalisation des structures hospitalières, la production pharmaceutique se vit centralisée. Petit à petit, les jardins des simples des hôpitaux disparurent, avec la vente de terres, et leurs apothicaireries suivirent, la Pharmacie centrale étant la seule habilitée à fabriquer les médicaments (près de trois cents mille cachets d’aspirine par an vers 1930), à les stocker et à les distribuer. Elle possédait un laboratoire et des réserves et il faut s’imaginer que, dans la cour actuelle, se trouvait un quai de déchargement où les carrioles venaient prendre les produits pour les livrer à tous les hôpitaux parisiens. Les apothicaireries d’hôpitaux confièrent donc leurs pots de conservation en faïence à la Pharmacie centrale qui improvisa une salle d’exposition visible dès la fin du XIXe siècle, prenant ainsi déjà conscience de la valeur patrimoniale de ces précieux objets.
En 1934, après de longues années de réticence à la notion de patrimoine hospitalier, un musée ouvrit enfin, en cohabitation avec la Pharmacie centrale, jusqu’en 1974, lorsque celle-ci fut transférée à Nanterre. Réunis comme dans un mausolée dans les premiers temps du musée, les pots de pharmacie et les mortiers sont toujours visibles aujourd’hui. La collection compte environ 1 500 pots provenant des anciennes apothicaireries des hôpitaux Beaujon, Necker, la Charité, Trousseau, Ricord, Enfants Assistés, Ménages et des anciennes maisons de secours de la rue de l’Arbre Sec, de la rue du Fauconnier, de la rue Saint Bernard, de la rue de Ville l’Évêque et de la rue Saint-Dominique, ainsi que des bocaux en verre datant du XIXe siècle. Les faïences, parfois ornées d’armoiries, comme l’exemple d’un magnifique vase à Diascordium, électuaire universel, ou marquées de l’image de Saint Jean de Dieu, sont toutes le fruit des meilleures manufactures de l’ancien régime, en particulier Saint-Cloud, Rouen, Nevers, Paris, Sceaux et Bourg-la-Reine. La mémoire des apothicaireries des hôpitaux parisiens est donc préservée, ainsi que celle de leur jardin de plantes médicinales, grâce à celui reconstitué dans la cour du musée, rassemblant les plantes pour fièvres et refroidissements, les plantes sédatives, les plantes vulnéraires, les plantes à utiliser avec prudence, les plantes pour les maux de ventre et les plantes pour les maux de femmes.
Le musée invite actuellement à réfléchir sur l’évolution de l’hôpital au XXe siècle dans l’intéressante exposition « L’humanisation de l’hôpital ». Si vous vous y rendez, n’oubliez pas de jeter un coup d’œil sur la plaque au-dessus du porche, où vous lirez : « Pharmacie centrale des Hôpitaux ». Quelques mots qui vous remémoreront l’histoire passionnante de l’hôtel de Miramion.
Ouvert du mardi au dimanche de 10 heures à 18 heures.
Exposition « L’humanisation de l’hôpital » jusqu’au 20 juin 2010.
Tél. 01.40.27.50.05.
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