Les recherches sur Bach ont progressé ces vingt dernières années sous l’égide de la Fondation des Archives Bach de Leipzig, présidée depuis deux ans par le chef anglais John Eliot Gardiner. Ce dernier a écrit une pièce majeure pour la connaissance de Bach, « Musique au Château du ciel » (2015, Flammarion, 747 p.). C’est grâce à cette lecture que l’on s’est décidé à partir sur les traces du compositeur, idée plus intellectuelle que touristique qui a conduit à une formidable incursion dans trois siècles de culture germanique.
Alors que son contemporain Haendel a mené une carrière européenne, celle de Jean Sébastien Bach se caractérise par un relatif immobilisme. Hormis deux excursions vers le nord à Lunebourg, puis à Lubeck (à pied, plus de 300 km), pour écouter le grand organiste de l’époque Dietrich Buxtehude, et à Hambourg, des séjours à Postdam à la cour de Frédéric le Grand et des voyages à Dresde à celle du prince de Saxe, Bach n'a pas quitté le centre de l'Allemagne. Principalement la Thuringe.
Weimar et ses grands hommes
Si la Thuringe, avec ses forêts profondes, évoque irrésistiblement les clichés allemands les plus médiévaux (Giselle, Tannhäuser), c’est le berceau de la culture germanique, région d’où sont originaires Goethe, Schiller, Luther, Herder, Nietzsche. En témoigne Weimar, où chaque coin de rue évoque ces grands hommes. On peut y commencer ce périple Bach. Weimar est aisément accessible par route ou train des aéroports de Leipzig-Halle (pas de vols directs de France) ou Dresde.
À Weimar, Bach fit deux séjours : en 1703, employé comme musicien et « lacquey » à la Cour, et de 1708 à 1717 au poste de Concertmeister, dont il voulut trop vite s’acquitter, ce qui lui valut quatre semaines de prison. Le temps semble s’y être arrêté, même si beaucoup de retard a été rattrapé (la Thuringe faisait partie de la RDA). Cette ville, autrefois capitale, a été un panthéon intellectuel où ont travaillé Cranach, Wieland, Schiller, Helder, Goethe, Schumann, Nietzsche et Liszt. Chacun a son musée et les collections d’art du château de la famille princière de Saxe-Weimar sont prodigieuses. Mais de Bach aucun souvenir, sinon une plaque indiquant sa maison détruite à proximité des auberges (aujourd’hui hôtels luxueux) de l’Ours noir et de l’Éléphant, quartier général de Goethe.
De Weimar on se rend aisément à Köthen, ville endormie où Bach dit avoir vécu « les plus belles années de sa vie », de 1717 à 1723, au service de Leopold de Cöthen-Anhalt. Ce jeune prince très musicien lui a donné le loisir de composer ses plus belles pages, notamment les « Concertos brandebourgeois ». C'est là que Bach épousa sa seconde épouse, Anna Magdalena. Le château, avec sa Chapelle royale et le musée Bach, est le lieu de ce pèlerinage où l’on peut sentir le mieux la présence du compositeur.
Leipzig, ses églises, son orchestre
Puis Bach postula pour le poste de Cantor de la Thomaskirche, à Leipzig, qu’il occupa de 1723 jusqu’à sa mort. Sur cette époque, on recommande le film de Jean-Marie Straub « Chronique d’Anna Magdalena Bach » (Éditions Montparnasse). Leipzig, historiquement grand centre commercial, est aujourd’hui une ville dynamique aux proportions idéales, peut-être la plus belle réussite de la réunification de l'Allemagne. Elle possède le plus touchant témoignage de Bach, sa tombe dans le chœur de la majestueuse église Saint-Thomas, pour laquelle Bach composa le plus grand nombre de ses cantates et la « Passion selon Matthieu ». Face à l’église, le musée Bach (et les Archives), moins charmant que celui de sa ville natale Eisenach, mais à vocation très pédagogique. L’église Saint-Nicolas, avec son étonnante décoration baroque, était l’autre pôle d’activité du musicien, où il créa la « Passion selon Saint Jean ».
Si Leipzig possède une compagnie d’opéra et un ballet réputés, sa plus célèbre institution est le Gewandhausorchester, créé en 1781, le plus ancien orchestre allemand qui ne soit pas un orchestre de cour. Mendelssohn, qui fit beaucoup pour la redécouverte de Bach, en fut un des directeurs (sa maison est un autre point de grand intérêt de la ville). L'orchestre siège aujourd'hui dans un bâtiment moderne dont la salle a une acoustique parfaite. On a eu la chance d’y entendre la « Troisième Symphonie » de Bruckner par le chef letton Andris Nelsons, qui en sera le directeur musical à la suite de Riccardo Chailly en 2017.
Autre joyau, Erfurt, capitale de la Thuringe, qui fut une importante place commerciale de la Ligue hanséatique, avec la vieille cité, parmi les plus belles d'Allemagne, et la majestueuse cathédrale Sainte-Marie. La ville est le berceau de la famille Bach mais n’en garde aucun souvenir.
À Eisenach, on peut voir la maison natale de Bach, où il vécut jusqu’à ce que, orphelin à 10 ans, il dût aller vivre chez un oncle à Ordruf (village sinistre où il ne reste strictement rien, si ce n’est le parfum de ce que pouvait être la RDA). La Bachhaus a une atmosphère indéniable et elle communique avec un musée très pédagogique.
À quelques kilomètres de là, il ne faut surtout pas hésiter à quitter la thématique du voyage pour visiter la forteresse médiévale de la Wartburg, un des monuments les plus importants d’Allemagne, parfaitement restauré, illustré par Wagner dans « Tannhäuser » et que l’on peut visiter idéalement en résidant une nuit dans le luxueux hôtel Auf der Wartburg, situé au pied de l’enceinte.
Quelques autres villes, toutes riches en palais et églises, méritent le détour dans ce périple Bach, que l’on peut enrichir grâce au superbe Bach Cantatas Website (www.bach-cantatas.com). Notamment Mülhausen, où il fut organiste et fit exécuter ses premières cantates ; Dornheim, où il épousa Maria Barbara ; Arnstadt, la plus ancienne ville de Thuringe et principal lieu d'activité de la famille Bach ; Naumburg, à la superbe cathédrale. Et surtout Gotha, avec Friedenstein, l'ancienne résidence des ducs de Saxe-Gotha, qui abrite, outre la chapelle où Bach fit exécuter en 1717 la première version de la « Passion selon Saint Jean », l'un des plus anciens théâtres baroques conservés en Europe.
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