Accompagnement des patients sous AVK ou sous anticoagulants d’action directe et des patients asthmatiques sous corticoïdes inhalés, bilan partagé de médication (BPM) destiné aux patients âgés polymédiqués sous traitements chroniques, vaccination antigrippale, test rapide d’orientation diagnostique (TROD) angine (en janvier prochain), entretiens d’accompagnement des patients sous chimiothérapie orale, prévus courant 2020… Toutes ces nouvelles missions, bientôt rejointes par la téléconsultation et auxquelles s’ajoutent déjà l’aide au sevrage tabagique et des actions, ponctuelles ou pérennes, de dépistage (diabète, insuffisance rénale, BPCO, maladies cardio-vasculaires…), ancrent le pharmacien dans son rôle de professionnel de santé. Mais sont chronophages et demandent investissement, organisation et formation. D’où des hésitations et des réticences.
De nouveaux leviers
« Les pharmaciens ont tendance à penser qu’ils sont obligés de s’engager dans ces nouvelles missions pour compenser ce qu’on leur enlève du côté des médicaments et le vivent comme une contrainte », explique Grégory Tempremant, président de l’URPS (Union régionale des professionnels de santé) pharmaciens des Hauts de France. « Il faut raisonner autrement et s’emparer de ces nouveaux leviers. Ce sont deux démarches parallèles. D’un côté notre cœur de métier, la délivrance des médicaments prescrits ou non, de l’autre les nouvelles missions qui fidélisent les patients et valorisent notre profession… D’autant que nous entrons dans une société du " care " avec le développement des maladies chroniques et le vieillissement de la population. Nous allons nécessairement vers plus d’accompagnement, de prévention, de repérage, de logique de parcours et le pharmacien a tout intérêt à s’inscrire dans cette dynamique, sinon d’autres acteurs le feront à sa place. »
Cela étant dit, une réflexion s’impose à cause des contraintes financières que ces nouvelles missions entraînent. « Ce n’est pas simple, les pharmaciens n’ont pas de possibilités comme les grandes entreprises privées », convient Grégory Tempremant. « Il faut s’organiser selon ses capacités, prioriser les missions en fonction de sa patientèle et procéder de façon séquentielle (vaccination, puis entretiens pharmaceutiques, puis TROD, etc). » Ce n’est pas facile à mener, renchérit Christian Nouvel du cabinet d’expertise comptable Fiducial (lire le « Quotidien » du 19 septembre 2019). « Cela touche à l’organisation de l’officine, à la formation des équipes et à la gestion financière. Il faut donc que le pharmacien y trouve une contrepartie. Sinon cela ne décollera pas et ce serait dommage car c’est une orientation indispensable qui peut apporter aux patients de la sécurité, aux pharmaciens une image positive et aux organismes de paiement des économies. »
Impliquer toute l’équipe
Avant de s’engager, plusieurs paramètres sont à prendre en compte. D’un point de vue pratique, l’espace de confidentialité est indispensable. « Deux espaces peut-être maintenant car les missions sont nombreuses et il est difficile d’anticiper les demandes », pense Grégory Tempremant. À défaut, la pièce (fermée) doit être suffisamment spacieuse pour être aménagée en deux parties, une pour l’orthopédie et l’autre, confortable et accueillante, avec une petite table et deux chaises, pour les entretiens, les BPM et les vaccinations. Idéalement, elle devrait abriter un poste informatique pour avoir accès aux dossiers des patients. Autre nécessité, la formation. Elle sera assurée par les centres de formation continue, tout en s’appuyant sur les outils des URPS. « Il faudrait ici revoir la formation des préparateurs pour coller à ces nouvelles missions et mettre tout en cohérence », pense Gregory Tempremant. « Mais toute l’équipe doit être impliquée, c’est essentiel. Au début tout le monde est un peu déconcerté mais il faut se poser, se réunir, expliquer, trouver des motivations. Les perspectives de carrière ne sont pas énormes en pharmacie d’officine mais les nouvelles missions rendent le travail plus intéressant, avec des responsabilités à la clé, et elles renforcent la cohésion. »
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