Le Quotidien du pharmacien. - Dans quels cas sont aujourd’hui prescrites les fluoroquinolones ?
Pr Jean-Paul Stahl. - Il y a deux indications majeures : l’infection urinaire en deuxième ou troisième ligne de traitement, et l’infection ostéo-articulaire en première ou deuxième ligne. En ce qui concerne les infections urinaires, les fluoroquinolones sont d’ailleurs le traitement de référence de la prostatite infectieuse - c’est-à-dire une infection urinaire s’accompagnant de fièvre chez l’homme - car ces antibiotiques sont ceux qui pénètrent le mieux dans le tissu concerné et qui ont le meilleur spectre d’action. La doctrine est toutefois de proposer les fluoroquinolones plutôt en seconde intention, hors prostatite, non pas pour des raisons de toxicité, mais pour éviter de développer des antibiorésistances qui affecteraient l’efficacité de ces molécules très sensibles aux mécanismes de mutation des bactéries vers la résistance.
Quels sont les effets secondaires les plus fréquents et les plus graves ?
Il y a au maximum 1 % d’effets secondaires d’importance significative et ils sont connus depuis 30 ans. Notamment, une phototoxicité, se manifestant par des brûlures cutanées en cas d’exposition au soleil. Ensuite, des tendinopathies, avec comme facteur de risque la pratique sportive intensive concomitante, une déshydratation et l’âge, sachant que la survenue sans facteur de risque est cependant possible. Enfin, il existe des effets secondaires neurologiques, conséquence néfaste de la très bonne diffusion des fluoroquinolones dans les tissus graisseux et dans le cerveau : insomnies, voire délires et hallucinations, qui cessent avec l’arrêt du traitement. Quant à l'impact des fluoroquinolones actuellement disponibles sur la fonction cardiaque, il est mineur. Les molécules de cette famille qui avaient un impact significatif ont été soit abandonnées avant la commercialisation, soit retirées du marché.
Ces affaires de dépôt de plaintes de patients vont-elles pousser à écarter les fluoroquinolones des habitudes de prescription ?
Déjà, il faudra voir quelles seront les suites données à ces plaintes par la justice. Ensuite, les fluoroquinolones ne doivent surtout pas être écartées : il suffit d’y avoir recours dans le cadre de leurs indications, clairement définies depuis longtemps, et pas en dehors. Elles n’ont pas leur place dans les infections cutanées, ORL ou respiratoires, par exemple, sauf après avis spécialisé. Elles ne doivent pas être prescrites en première ligne et doivent être réservées à des prescriptions bien cadrées : comme trop souvent, les accidents surviennent en cas de prescription inappropriée.
Quel message passer aux patients lors d’une prescription de fluoroquinolones ?
Leur parler des effets secondaires les plus courants : si des insomnies apparaissent d’un coup, ou des douleurs articulaires, qu’ils n’hésitent pas à contacter leur médecin. Et qu’ils évitent de se mettre au soleil lors du traitement, ou alors avec une bonne protection solaire (écran total) si cette exposition est indispensable.
* Professeur émérite d’infectiologie à l'université de Grenoble et co-coordonateur du groupe des recommandations de la Société de pathologie infectieuse de langue française (SPILF).
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