CHEZ NOUS, tout est sujet de politique intérieure, tout s’analyse en fonction des échéances électorales, tout débouche sur des querelles nationales. Comme l’a reconnu Alain Juppé, la diplomatie française a commis des erreurs d’appréciation, mais pas plus que celles de nos voisins européens où, pourtant les polémiques sont absentes. Il nous semble que l’Italie de Silvio Berlusconi était plus engagée en faveur de Kadhafi que la France de Nicolas Sarkozy. En outre, en nous appesantissant sur notre manque de clairvoyance passé ou même sur les bévues commises par des ministres ou des ambassadeurs, nous perdons du temps. La question ne porte plus sur l’Égypte de Moubarak, la Tunisie de Ben Ali ou l’Égypte de Moubarak, mais sur ces pays tels qu’ils sont devenus aujourd’hui.
Il est indubitable que la France et le reste de l’Europe ont parié sur l’avenir des régimes autoritaires, contrairement aux États-Unis qui, depuis près de dix ans, ont essayé par des moyens divers d’instaurer des démocraties au Proche-Orient. La deuxième invasion de l’Irak était inspirée par les néoconservateurs qui voulaient chasser Saddam Hussein et établir une démocratie parlementaire dans son pays. Le fameux discours de Barack Obama, au Caire, exposait le même objectif, mais par des méthodes respectueuses de la souveraineté des États. Si George W. Bush a couru au désastre, M. Obama a été prémonitoire : pas plus qu’ailleurs, pas plus qu’en Union soviétique, la main-mise sur un peuple et sur un pays du monde arabo-musulman n’est une fatalité qui ne permet aucun espoir. De même que la guerre du Vietnam a été une immense et coûteuse erreur parce qu’elle a entraîné de terribles souffrances au nom de craintes qui, après coup, ne furent guère justifiées, de même n’était-il pas nécessaire d’aller à Bagdad : tôt ou tard, le régime de Saddam se serait effondré. Le vent de liberté qui souffle sur le Proche-Orient finira par balayer d’autres pays, y compris l’Iran. Et on devine que, même en Chine, les internautes méditent sur l’exemple arabe.
Nous ne saurions minimiser non plus les conséquences négatives de ce bouleversement géopolitique. L’instabilité créera un flux migratoire incontrôlable ; le prix de l’énergie deviendra insupportable ; les mesures de protection de l’Europe coûteront cher alors que nos caisses sont vides. Mais le pire serait soit de jouer un attentisme qui serait perçu comme une forme d’indifférence ou d’hostilité par des peuples qui ont déjà fait de lourds sacrifices, soit de sembler regretter le « bon vieux temps ». Nous n’avons plus le choix. Nous devons stigmatiser les potentats déchus, maintenant que les crimes qu’ils ont commis sont mis au grand jour et nous devons aider les populations qui se sont affranchies de leur domination.
Il n’y a aucune raison de croire que le désordre causé par le changement soit durable ou qu’il soit durablement capable de désorganiser nos sociétés. Au contraire, plus nous contribuerons à l’instauration de régimes justes et plus vite nous retrouverons les échanges commerciaux et culturels que nous avions avec ces pays. Un regain du tourisme, un renforcement des investissements, le respect (ce qui ne veut pas dire l’obséquiosité) des aspirations populaires et des nouvelles directions sont les meilleurs garants de nos intérêts propres, auxquels la diplomatie française est uniquement vouée. Nous serons en meilleure position pour empêcher l’immigration sauvage ou massive si nous aidons ces pays à contrôler les flux entre eux et nous et entre eux, comme le démontrent des vagues de Libyens qui partent pour la Tunisie ou l’Égypte. Nous découvrirons que nous partageons avec les nouveaux gouvernements les mêmes idées. Bien entendu, la tâche est d’autant plus difficile que la crise a affaibli l’Europe. Mais l’Union européenne peut compenser par l’unité de ses décisions les moyens qu’elle n’a plus.
Le retour des droits de l’homme.
Elle doit, en outre, revenir à ces bons vieux principes que nous avons abandonnés au nom de la realpolitik. La preuve vient d’être fournie que les droits de l’homme sont un élément essentiel de l’évaluation d’un pays. Et que pactiser avec un régime dictatorial, cruel et sanguinaire prépare inévitablement de terribles lendemains où la froide logique et la raison d’État nous font soudainement apparaître comme les vulgaires complices du crime. Plus nous approuverons les révolutions démocratiques, moins nous les craindrons, plus vite nous rétablirons le dialogue et l’ordre.
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