EN 2004, une réforme de la rémunération devait permettre aux pharmaciens de ne plus être dépendants de l’évolution à la baisse du prix des médicaments : cette année-là, la marge fut remplacée par un honoraire de 8,10 euros par boîte, complété par une marge administrative de 3 %, un système qui a donné toute satisfaction aux pharmaciens… si ce n’est que l’honoraire, qui devait être régulièrement revalorisé, n’a pas bougé d’un centime depuis. Les frais de fonctionnement des officines ont, eux, considérablement évolué, d’autant que les pharmaciens doivent consentir aux caisses un « rabais » de 2,05 euros par boîte prescrite. Il ne leur reste donc plus, en réalité, qu’un honoraire moyen de 6,38 euros par boîte, totalement insuffisant pour faire face à leurs frais, sans parler de l’augmentation générale des prix et du coût de la vie.
Un exemple stupéfiant.
« Ce n’est pas que nous voulons plus d’honoraires, c’est que nous en avons besoin », ont rappelé les confrères allemands lors de leur congrès, alors même que plus de 370 officines ont fermé leurs portes depuis un an, soit une par jour, et que les seules augmentations du « rabais aux caisses », passé en 2011 de 1,75 à 2,05 euros, se traduisent par une baisse de revenu de 15 000 euros par officine et par an.
Déjà, les pharmacies de certaines régions restreignent leurs services de garde, tandis que les frais de fonctionnement ne cessent de s’alourdir, à l’image de l’anecdote… stupéfiante citée en exemple par le président de l’ABDA, l’association fédérale des pharmaciens, Hans-Günther Wolf : une nouvelle législation oblige les pharmaciens à remplir de nombreuses formalités administratives supplémentaires avant de délivrer des stupéfiants. Ils touchent pour ce travail un supplément de 26 centimes par boîte. Mais les grossistes, eux, ne livrent ces produits aux pharmaciens que moyennant un supplément d’un euro par boîte, pour couvrir leurs frais… les pharmaciens, au bout du compte, perdent donc de l’argent en délivrant ces spécialités.
« Il est grand temps de reconsidérer la rémunération des officines si on veut éviter une catastrophe », rappellent solennellement les pharmacies aux pouvoirs publics, tout en soulignant par ailleurs qu’ils disposent de nombreux atouts pour faire baisser les dépenses de santé, notamment en travaillant plus étroitement avec les médecins. L’ABDA et l’Union fédérale des médecins conventionnés (KBV) ont ainsi mis au point un modèle de coopération sur les prescriptions qui, selon eux, pourrait faire économiser plusieurs milliards aux caisses. Mais ce projet attend encore le feu vert de ces dernières.
Relations tendues avec les caisses.
Il est vrai que les relations entre les caisses et les pharmaciens sont de plus en plus tendues, et qu’une embellie est loin d’être d’actualité. Symbole de cette ambiance détestable, le « scandale » mis à jour il y a quelques semaines par la fédération des caisses d’assurance-maladie : selon elle, 11 000 officines, soit une pharmacie sur deux, auraient facturé aux caisses des médicaments… qui n’avaient pas encore été mis sur le marché. Après avoir traité les pharmaciens de tous les noms, notamment dans la presse, les caisses ont dû revoir leurs accusations à la baisse : effectivement, un certain nombre de pharmacies avaient, comme elles en ont le droit, « préfacturé » des médicaments, mais l’un de ceux-ci n’existait pas encore, son fabricant ayant subi un retard dans sa production. Or, les logiciels des pharmaciens n’avaient pas anticipé ce retard et le médicament incriminé, un générique qui en remplaçait un autre, avait été automatiquement commandé et facturé par un certain nombre d’officines, en très petite quantité de surcroît. L’« escroquerie du siècle » s’est donc vite dégonflée pour devenir une banale erreur de gestion et de facturation, mais l’affaire en dit long sur le climat qui règne actuellement entre la profession et l’assurance-maladie.
Les pharmaciens ont l’impression d’être devenus les boucs émissaires de l’augmentation des dépenses de santé, alors qu’ils sont au contraire les « moins dépensiers » de tout le système : en 2010, a souligné le président du syndicat fédéral des pharmaciens, Fritz Becker, « les honoraires médicaux ont augmenté de 2,1 %, les dépenses hospitalières de 4,6 % et les dépenses pharmaceutiques ont diminué de plus de 6 %, mais c’est nous qu’on frappe, ce n’est plus acceptable ». Une situation d’autant plus difficile que les perspectives pour l’année 2012 sont elles aussi loin d’être roses…
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