IL EST ÉVIDENT que les deux journalistes qui interrogeaient le président auraient dû le relancer après cette déclaration. Ils diront qu’ils ne sont pas là pour lui donner une seconde chance. Avocat, gardien de la constitution, détenteur de la magistrature suprême, le chef de l’État n’est pas objectivement excusable. Il a commis une bourde de première grandeur qui, d’ailleurs, ne sert pas ses intérêts. Deux thèses s’affrontent : ou bien il s’agit d’un lapsus, ou bien M. Sarkozy l’a fait exprès. Dans les deux cas, on ne peut pas l’exonérer. Qu’une rancune tenace lui fasse tenir un propos immodéré ne sied guère à sa fonction ; qu’il se livre, en territoire étranger, à un provocation qui n’intéresse que le Landerneau n’est pas davantage acceptable. Il n’en a pas fini de payer son erreur. Dominique de Villepin l’a assigné en justice pour n’avoir pas respecté la présomption d’innocence, mais le président ne peut être jugé qu’après son mandat présidentiel, soit en 2012, ou même en 2017 s’il est réélu. Ce sera bien embarrassant pour M. Sarkozy de retrouver cette affaire dans trois ou huit ans.
Hystérie politique.
Tout cela étant clairement dit, il ne faut pas que l’hystérie politique fasse de l’écart présidentiel une monstruosité. Ce serait trop simple. Il y a un monde entre une parole malheureuse et un complot qui, s’il est confirmé, visait à disqualifier M. Sarkozy pour l’élection présidentielle de 2007. Dans l’affaire, Dominique de Villepin n’est pas la victime, c’est Sarkozy. En outre, l’ancien Premier ministre, quelques instants avant le procès, avait prononcé une brève déclaration dans laquelle il avait parlé de l’acharnement de Sarkozy contre lui. C’est Villepin qui a choisi de se battre sur le front politique, comme s’il voulait diluer les faits dans un grandiose affrontement historique entre lui et Sarkozy. Hélas, les faits, eux, s’ils sont prouvés, sont scélérats et honteux. Ils ne relèvent guère du romantisme passionné dont M. de Villepin veut orner tout ce qu’il dit et tout ce qu’il fait.
Il y a, entre les deux hommes, une haine inexpiable. Sarkozy, il suffisait de l’écouter mercredi dernier, veut sa vengeance. Villepin n’a toujours pas compris que les jeux auxquels il jouait dans les palais de l’État étaient mortifères. La « gaffe » de Sarkozy n’est rien par comparaison avec l’atmosphère de complot qui, semble-t-il, régnait à Matignon à la fin du deuxième mandat de Jacques Chirac. Comme d’habitude, on nous dit : mais ces magouilles florentines ont toujours existé. Ce n’est pas une raison pour traiter par l’indulgence celle qui apparaît au grand jour. Elle peut servir d’exemple. Et sur un point au moins, le chef de l’État a tout à fait raison : on a voulu porter atteinte à son honneur. Il est peut-être insupportable pour beaucoup de gens, mais il est intègre, ce qui n’est pas toujours le cas dans la classe politique.
Le même mépris du droit.
Tout s’est passé, en tout cas, comme si M. Sarkozy poursuivait de sa hargne vengeresse un homme pour lequel le peuple éprouverait, en réalité, une grande compassion. Dans leur hâte à dénoncer l’abus de droit, la gauche et une bonne partie de la droite ont abreuvé M. Sarkozy d’injures, volant ainsi au secours d’un homme que l’opposition accablait naguère et qu’ils sont prêts à innocenter prématurément, de la même manière que M. Sarkozy est prêt à le condamner avant l’heure. La rigueur grandiloquente avec laquelle l’incartade du président est jugée chez les « chiraquo-villepinistes » et chez les socialistes fait bon marché du fonds judiciaire de l’affaire. On raisonne tête-bêche, en espérant ainsi faire oublier les attendus de l’accusation. Dans la véhémence des réactions aux propos de Sarkozy, on retrouve le même mépris du droit, balayé par la politique.
Et, bien entendu, c’est une tempête dans un verre d’eau qui n’aura aucun impact historique. Si M. de Villepin est blanchi, comme il le disait lui-même avant le procès et comme on le lui souhaite, il est bien peu probable qu’il puisse reprendre sa carrière politique là où il a été contraint de la laisser ou qu’il puisse représenter une menace pour le président actuel. S’il est condamné, il ira jusqu’à la Cour de cassation et même jusqu’à la Cour de justice européenne. Villepin s’estime aussi innocent que Sarkozy le croit coupable.
Nicolas Sarkozy lors de l’interview télévisée.
Insolite
Épiler ou pas ?
La Pharmacie du Marché
Un comportement suspect
La Pharmacie du Marché
Le temps de la solidarité
Insolite
Rouge à lèvres d'occasion