LA RARÉFACTION des médecins dans les campagnes n’est pas neutre pour le réseau officinal. Inquiète de cette évolution, l’Association de pharmacie rurale (APR) vient de demander à la société Celtipharm de mener une étude sur la désertification médicale et ses conséquences, dont les résultats seront présentés lors de son assemblée générale en mai prochain (voir encadré). « Depuis 2005, nous alertons les pouvoirs publics sur les risques de la disparition des médecins pour les officines de proximité », rappelle son président, Benoît Thiébaut. Le phénomène pourrait prendre de l’ampleur. Selon l’APR, pas moins de 20 % des 9 000 officines rurales devraient être confrontées à ce problème de désertification médicale dans les cinq ans à venir. Dans ce contexte, l’association a donc décidé d’agir. Comment ? En proposant que tout patient domicilié dans un village ayant perdu son dernier prescripteur ou résidant dans une commune appartenant à la zone de chalandise d’une officine, soit tenu de se faire dispenser ses médicaments remboursables par cette seule pharmacie. Celle-ci pourrait être appelée « officine dédiée de proximité », précise Benoît Thiébaut. Le malade qui choisirait une autre pharmacie, serait alors moins bien remboursé. « Aujourd’hui, chaque Français a un médecin traitant qu’il consulte prioritairement, ce qui lui garantit un suivi médicalisé et un remboursement optimal, explique le président de l’APR. Ce même schéma pourrait s’appliquer aux pharmacies. »
La fin du libre choix du pharmacien pour les malades ? « Certes un peu, en convient Benoît Thiébaut, mais il est nécessaire de trouver des solutions pour défendre le réseau officinal. Les pistes avancées pour maintenir l’implantation des médecins dans certaines zones ont jusqu’ici toutes échoué ». « Notre proposition concerne uniquement les médicaments remboursables et le service apporté aux patients est le même quelle que soit l’officine », ajoute Jacky Maillet, membre du bureau national de l’APR chargé des affaires vétérinaires. Quoi qu’il en soit, « malgré quelques inconvénients, cette proposition présentent de nombreux avantages », insiste Benoît Thiébaut. D’abord, sans surcoût pour la collectivité, elle permettrait d’assurer l’avenir de milliers de petites officines rurales, sans intervenir dans l’exercice des médecins ; ensuite, respectant la loi démogéographique et les quotas de population, elle évite tout déséquilibre du réseau, même en cas de création de maisons médicales de santé ; enfin, elle peut être mise en place rapidement. Autre atout aux yeux du président de l’APR : « notre solution prend en compte les nouvelles missions du pharmacien définies par la loi HPST, en particulier celle du pharmacien correspondant ». Contrairement aux médecins, « il y a encore dans notre profession des personnes qui ont envie de s’installer en zone rurale, il ne faut donc pas les décourager », poursuit-il.
Le potentiel vétérinaire.
Reste maintenant à convaincre les pouvoirs publics de l’intérêt du projet. Benoît Thiébaut, qui assure que sa proposition a déjà séduit de nombreux maires, espère qu’elle figurera dans le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur l’économie des officines. En attendant, elle sera débattue lors de la prochaine assemblée générale de l’association.
Autre sujet au programme des discussions : le développement du marché du médicament vétérinaire en pharmacie. « Une autre solution pour préserver nos officines rurales », affirme Jacky Maillet. Malheureusement, selon lui, cette activité est encore peu exploitée par les confrères des campagnes. Pourtant, le potentiel semble énorme. « Près de 3,5 millions de personnes franchissent chaque jour la porte d’une officine et une sur deux possède un animal de compagnie, rappelle Jacky Maillet. Environ 40 % des chats ne sont pas médicalisés. C’est pratiquement la même chose pour les chiens. » Idem pour les animaux de rentes. Un éleveur sur trois déplore en effet ne pas pouvoir utiliser librement son ordonnance chez le pharmacien. Là où cela coince, c’est que bien souvent, « le vétérinaire capte la délivrance des médicaments en usant de son pouvoir de prescription », souligne le spécialiste du dossier vétérinaire. Mais attention, pas question pour lui de reprendre une part de ce marché aux vétérinaires sans imaginer, en contrepartie, une revalorisation de leurs honoraires. Car, fait-il remarquer, « nos destins sont liés ». S’il n’y a plus de vétérinaire à la campagne, il n’y aura plus non plus de prescription. Pour Jacky Maillet, il faut tout simplement que les vétérinaires puissent vivre de leurs actes. Aujourd’hui, 70 % de leur chiffre d’affaires est assuré par la vente de médicaments. Pendant ce temps, seulement 6 % du marché des spécialités vétérinaires (1,2 milliard d’euros au total) est détenu par les officinaux. Un levier de croissance considérable pour les pharmacies.
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