L’IDÉE vient de Naples et sa coutume du café « suspendu » : un consommateur prend un café et en paie deux ; le second étant mis en attente, pour être servi plus tard à un client dans le besoin. Cette formule généreuse a déjà conquis le Canada et de nombreuses villes françaises où de telles initiatives naissent dans des bars, des boulangeries… À Nantes, l’association Tout en Attente, créée en octobre dernier, s’est emparée du concept pour le développer et l’élargir à d’autres types de commerces. Elle compte déjà une vingtaine de partenaires : boulangeries (pain, viennoiseries), bars (café, jus d’orange), pizzeria, traiteur, crêperie, tabac (journal, cigarettes), épicerie et… une pharmacie. Installée depuis 2005 dans une petite officine, à deux pas de la Cathédrale et du Château des ducs de Bretagne, Dominique Dambrine-Darnis est la première pharmacienne à rejoindre l’association.
Donner autrement.
« Tous les jours, je vois beaucoup de gens dans la rue, la main tendue. On ne peut donner utilement à chacun. L’initiative de Tout en attente constitue une autre façon de donner, peut-être plus efficace. Pour le moment, je n’en suis qu’à la phase d’information, je cherche à susciter les questions et le dialogue avec les clients pour expliquer cette initiative. Je présente dans ma vitrine les produits que j’ai choisi de proposer « en attente », essentiellement des produits d’hygiène : savons, gels douche, serviettes hygiéniques, lingettes pour bébés, mais aussi dentifrice, brosses à dents, fixateur de dentier… car l’hygiène buccale est importante pour la santé, elle conditionne l’alimentation. »
Les bénéficiaires de Tout en attente, choisis par les associations caritatives qui travaillent auprès d’eux, sont SDF, demandeurs d’asile, étudiants, chômeurs ou retraités à faibles revenus. Pour Dominique Dambrine-Darnis, ce type de solidarité doit passer par l’officine : « Le pharmacien connaît tous ses patients et peut repérer les gens dans le besoin, établir le lien avec les associations. Travaillant seule, je suis toujours au comptoir, cela permet l’échange, la discussion. » Une pratique de l’officine qui plonge ses racines dans son enfance vendéenne, partagée entre un père vétérinaire de campagne qu’elle accompagnait en tournée, et ses vacances auvergnates chez une cousine pharmacienne qui lui a fait découvrir la nature, les plantes, les champignons…
Un lieu pour s’épancher.
Dominique Dambrine-Darnis s’inscrit à la faculté de pharmacie de Nantes. Après des études qu’elle avoue avoir adorées, elle s’installe dans une officine de Ploemeur (Morbihan) où elle restera 23 ans, avant de reprendre la pharmacie de Verdun, à Nantes. Deux officines où elle exprime son sens du relationnel : « Ici, les clients trouvent toujours un siège ; mon officine est un lieu pour souffler, raconter sa vie, ses problèmes, s’épancher. C’est important de prendre le temps. Si je suis débordée et que je vois une personne qui a besoin de parler, je la fais patienter ou je lui demande de revenir. Les médecins n’ont plus le temps. Or, face à des pathologies difficiles, vécues par des personnes souvent isolées, nous devons offrir une écoute. Mais rassurez-vous, je raconte aussi ma vie ! Je donne beaucoup, et je reçois aussi énormément. Mon officine est petite, mais je m’y sens bien. J’ai encore envie de continuer ainsi, malgré évolutions de la profession. »
L’officine de Dominique Dambrine-Darnis est un bastion du lien social. Celui que promeut l’association Tout en attente, comme l’explique l’un de ses fondateurs : « Au-delà du produit qu’elles viennent chercher, pour les personnes dans le besoin, le simple fait d’oser entrer dans un commerce, parler un moment… est un moyen de recréer du lien, se réinsérer doucement dans la vie. »
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