Nous nous situons ici devant une chute de cheveux à bien différencier de l’alopécie. L’alopécie est la raréfaction des cheveux. La chute est la perte de cheveux avec un cuir chevelu apparemment normal.
La chute de cheveux prend le nom savant d’effluvium télogène dont le seul intérêt est de rendre les choses compliquées car faussement savantes. La cause d’une chute de cheveux doit être absolument cherchée par un interrogatoire approfondi et un examen clinique général.
La carence en fer : première cause chez la femme
Elle est méconnue du fait des normes biologiques ! Une des causes les plus fréquemment observées, est en effet la carence en fer. Celle-ci est de diagnostic souvent tardif ou manquant. Le diagnostic d’une carence martiale se fait principalement, pour ne pas dire exclusivement, par le dosage sanguin de la ferritine. D’aucuns pensent que la carence martiale s’accompagne inéluctablement d’une anémie microcytaire : l’anémie n’est qu’un effet retardé de la carence martiale prolongée qui n’aurait pas été traitée. Ainsi, dans la plupart des cas, la carence martiale s’accompagne d’un taux d’hémoglobine tout à fait normal, tout comme le VGM. Le dosage du fer sérique n’a aucun intérêt !
La carence en fer est la carence nutritionnelle la plus répandue dans le monde, et cela est d’autant plus vrai de nos jours du fait que la femme moderne a une maturité sexuelle plus jeune, fait moins d’enfants et a une période d’allaitement moins longue, ce qui entraîne une période de menstruations supérieure à celle des femmes d’antan. Les carences en fer peuvent s’expliquer par trois phénomènes :
- un défaut d’apport,
- une malabsorption,
- ou un excès d’élimination.
Les causes principales du défaut d’apport sont liées à l’alimentation. La viande rouge et les abats sont inéluctablement les plus gros « fournisseurs de fer » à l’organisme. Ainsi 100 g de boudin contiennent environ 22 mg de fer héminique, alors que 100 g de lentilles cuites contiennent environ 3 mg de fer non héminique ; en tenant compte de la différence d’absorption on s’aperçoit qu’en termes d’apport ferrique, 100 g de boudin noir sont équivalents à environ 5 kg de lentilles cuites ! Il est donc inutile de préconiser la prise d’épinards ou de lentilles lorsqu’une personne souffre d’une carence en fer. De plus, lorsque la carence est avérée, l’alimentation à elle seule ne peut pas la corriger, même si elle est riche en viande rouge.
La deuxième cause de carence en fer est la malabsorption digestive, comme la maladie cœliaque ou l’achylie de la maladie de Biermer. La fréquence des maladies cœliaque est estimée à 2 à 5 % chez les patients ayant une carence martiale telle qu’ils sont même anémiques.
Enfin, l’excès d’élimination est la troisième cause de carence en fer. Les saignements lors d’hémorragies ou lors des menstruations représentent la première cause d’excès d’élimination du fer sérique (lié à l’hémoglobine des hématies), ce qui explique pourquoi les femmes en âge de procréer sont les plus carencées.
Comment faire le diagnostic de carence en fer ?
La ferritinémie reflète les réserves en fer disponibles pour le métabolisme de tout l’organisme. Il est inutile de continuer à doser le fer sérique qui n’apporte que peu d’informations. En effet, en mars 2011, un rapport d’évaluation de la Haute Autorité de santé (HAS) recommande « en premier lieu le dosage de la ferritine sérique. Une ferritine sérique abaissée suffit à affirmer le diagnostic d’une carence en fer ; le recours à d’autres marqueurs du métabolisme du fer est inutile ».
Quelle est la valeur seuil de la ferritinémie ? Basé sur notre expérience et les publications de Rushton, nous recommandons d’atteindre une valeur cible de ferritinémie d’au moins 60 µg/L pour la prise en charge optimale des chutes de cheveux et alopécies. Ainsi, toute valeur de ferritine inférieure à 60 ng/ml, pouvant d’ailleurs se trouver dans les valeurs normales données par le laboratoire d’analyse, doit être considérée comme une carence en fer, et donc la cause possible de la chute de cheveux.
Autres grandes causes de chutes de cheveux
- L’hypothyroïdie, de plus en plus rare car dépistée très précocement devant souvent des anticorps antithyroperoxydase, avant même que la TSH ne soit élevée.
- La diathèse auto-immune de type lupique en attente de poser un diagnostic de lupus érythémateux systémique, chez des personnes ayant quelques symptômes du lupus et des anticorps antinucléaires.
- Les causes médicamenteuses : par exemple certains médicaments androgènes, (Danatrol), le stérilet recouvert de progestatif, les minipilules qui privent le patient d’œstrogènes extrêmement bénéfiques pour ses cheveux, plus rarement les pilules de 1re et de 2e génération de moins en moins utilisées.
- Les chutes de cheveux post-ménopausiques, liées au déficit œstrogènique.
- L’alopécie androgénogénétique (AAG)
- Les troubles hormonaux avec un état d’hyperandrogénie, que ceux-ci soient liés au port d’un stérilet revêtu de lévonorgestrel (progestérone) ou liés à une pilule androgénique comportant notamment de la noréthistérone, ou encore à une dystrophie ovarienne micropolykystique caractérisée le plus souvent par des ménorragies, un syndrome prémenstruel et parfois une spanioménorrhée (règles tous les 32 jours).
- La pelade est une maladie dont le nom est déconsidérant. Appelons-la alopécie en aires ou en plaques. La chute de cheveux rapide par poignée aboutit à une alopécie en plaques, voire totale. C’est un processus immunologique sous-jacent dont le déclenchement est la source des recherches des cliniciens. Souvent associée à un choc psychique, un événement douloureux de la vie, elle doit faire chercher un syndrome dépressif, mais aussi un foyer infectieux sous-jacent bactérien ou parasitaire, une maladie auto-immune associée.
La correction de la cause et notamment de la carence en fer
La prise en charge des chutes de cheveux varie en fonction de l’étiologie, cependant une carence en fer doit toujours être corrigée. Le fer joue un rôle important comme traitement adjuvant aux antiandrogènes chez des patientes carencées souffrant d’AAG.
La supplémentation en fer :
Lorsque la carence est plus profonde, l’alimentation ainsi que les compléments alimentaires ne sont plus suffisants et la supplémentation est indispensable.
Par voie orale, il existe plusieurs spécialités sur le marché à base de sels ferreux (fumarate, sulfate, gluconate). La prise doit être quotidienne et durant une durée minimum de 3 mois. L’efficacité clinique sur la croissance pilaire peut prendre 5 à 6 mois.
Attention aux chélateurs du fer qui bloquent l’absorption digestive du médicament, que sont les fibres végétales (céréales et légumineuses comme le son, le blé, le maïs, l’avoine, le riz et le soja), le calcium des produits laitiers, le café et, le plus puissant, le thé. En effet, les tanins sont des puissants inhibiteurs de l’absorption du fer. À l’inverse, l’absorption du fer est améliorée lorsqu’il est pris à jeun, c’est-à-dire à 2 heures loin d’un repas, avec de la vitamine C. Il est donc conseillé d’associer la prise de fer à un verre de jus d’orange, mais pas à du vin ni à du thé.
Je recommande la prise de fer et de vitamine C le soir au coucher, une bouteille d’eau sur la table de nuit. La vitamine C n’empêche pas de dormir.
Lorsque la prise per os est impossible, dans un contexte de malabsorption ou en cas d’urgence, le fer doit être administré par voie intraveineuse.
Les autres traitements en fonction de la cause :
Les estrogènes sont indiscutablement à envisager chez une femme ménopausée.
Les vitamines telles que la biotine et le bépanthène ont une solide réputation dans le traitement des chutes de cheveux. On ne sait s’ils ont un rôle placebo important ou s’ils apportent quelque chose. En tout cas ils ne traitent nullement une cause, et seront recommandés soit au début d’une chute de cheveux apparemment bénigne et saisonnière qui va céder spontanément, soit après avoir épuisé les traitements des causes trouvées.
Les apports de Cystine ou de cystéine, et de gélatine seront vus de la même façon que précédemment.
Les lotions antichutes ont des effets modestes, insuffisants en cas de cause établie.
Le traitement des alopécies, c’est-à-dire des raréfactions importantes des cheveux liées à des chutes répétées et sur une longue durée, ne sera pas abordé ici.
Conclusion
Le fer est le premier élément à considérer comme facteur de carence en cas de chute de cheveux chez une femme jeune. C'est un élément indispensable dans la synthèse et la composition du cheveu. La carence martiale est la cause première à évoquer dans l’effluvium télogène. Le fer est impliqué aussi dans l’alopécie androgénogénétique et la pelade.
Chaque cause a son traitement. Je ne peux qu’encourager le patient et le professionnel de santé à chercher l’origine de la chute qui, si non traitée, aboutira inéluctablement à une alopécie.
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