LA MONTAGNE a-t-elle accouché d’une souris ? Face à la spéculation, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel qui, comme on pouvait s’y attendre, ont conduit le bal à Bruxelles, semblent avoir décidé qu’on ne peut pas traiter l’Union européenne et l’euro comme des entités faibles, à la merci des caprices du marché. Leur réponse peut se résumer ainsi : pas de panique, la Grèce peut redresser ses comptes toute seule, ses partenaires de la zone euro ne ménageront pas leur soutien financier le moment venu, mais ils ne sont pas soumis aux moindres mouvements des bourses.
Cette position présente des inconvénients. Il n’est pas impossible que les spéculateurs ne soient pas convaincus par une attitude uniquement politique, non dépourvue d’arrogance, et qu’ils s’ingénient à créer cette semaine un chaos suffisant pour déclencher des mesures qui, alors, seront prises dans la hâte. Cependant, en se contentant de réaffirmer qu’ils ne laisseront tomber la Grèce en aucun cas, les Européens ont levé plusieurs obstacles : les règles de fonctionnement de l’Union excluent lque des États membres volent au secours d’un pays qui, comme la Grèce, ne s’est pas soumis à la discipline financière. Or chacun sait que les gouvernements hellènes ont truqué leur chiffre pour être admis au sein de l’UE et que leur laxisme a duré jusqu’à présent. Ils ont acheté la paix sociale en déversant des avantages prohibitifs sur leurs concitoyens. Les manifestations qui se sont déroulées la semaine dernière à Athènes n’ont pas été énormes, car les Grecs sont aujourd’hui conscients que, s’ils ne sont pas riches, ils ont vécu au-dessus de leurs moyens. Le gouvernement de Georges Papandréou s’est engagé à diminuer de 4 % du PIB pendant trois ans les déficits publics, ce qui implique une austérité dévastatrice. Il n’a pas vraiment le choix. Il pouvait certes s’adresser au Fonds monétaire international pour obtenir des crédits, mais la Grèce, comme tout autre pays, défend sa souveraineté et ne souhaite pas être considérée comme le paria du continent. Enfin, si la Grèce est endettée au-delà du raisonnable, tous les États-membres de l’UE sont eux aussi endettés. L’idée que la France, dont la dette atteint 1 500 milliards d’euros puisse voler au secours d’Athènes, n’est même pas logique. Inversement, si la Grèce doit faire une cure, la France ne devra-t-elle pas suivre son exemple dans les mois qui viennent ?
La France et l’Allemagne n’ont laissé ni Herman Van Rompuy, président de l’Union, ni José Manuel Barroso, président de la Commission, prendre des décisions. Après avoir consulté M. Papandréou qui, lui non plus ne souhaitait s’adresser ni à la Banque centrale européenne ni au FMI, Nicolas Sarkozy et Angela Merkel ont décidé de ne rien faire. Au sujet d’un plan d’aide financière, les Allemands étaient très réticents : ce sont eux qui ont introduit la clause de non assistance dans les règles de fonctionnement de l’Union, pour une raison simple : comme leur économie est la plus puissante de l’UE, comme c’est l’Allemagne qui porte à bout de bras l’euro fort, ils savaient qu’en cas d’indiscipline de tel ou tel, on ferait d’abord appel à Berlin. En outre, la spéculation, pour le moment, n’a pas réellement fait plonger l’euro. Il se négocie à 1,37 dollar, alors qu’il était à 1,17 lors de son lancement et qu’il est tombé, vers 2001-2002, à 0,82 dollar. Lors de son pic de l’an dernier, à 1,60, il était devenu un obstacle aux exportations de la zone euro et personne n’est mécontent qu’il ait perdu un peu de sa vigueur.
Tous les maillons sont faibles.
Et il reprendra tôt ou tard son ascension. Car les États-Unis eux aussi ont une dette énorme. On peut dire que tout l’hémisphère nord est affreusement endetté et que la spéculation, dans cette affaire, essaie de trouver un maillon plus faible dans une chaîne où tous les maillons sont faibles. On ne s’en étonne guère, surtout depuis que les marchés ont prouvé, et à quel prix, leur absence totale de rationalité. Il y a néanmoins des limites à l’incohérence, ces limites établies par le risque que prennent les spéculateurs : ils peuvent perdre leur chemise s’ils continuent à jouer la baisse de l’euro. De toute évidence, c’est sur la foi de ce raisonnement que M. Sarkozy et Mme Merkel ont pris la décision de s’abstenir. Eux aussi ont pris un risque. Pourtant, il n’est peut-être pas mauvais, à l’heure où la régulation des marchés devient impérative et qu’elle est préconisée aussi bien en Amérique qu’en Europe, que les États montrent aux financiers de quel bois ils se chauffent.
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