LA LOI HÔPITAL, patients, santé et territoires (HPST) est en cours de discussion à l’Assemblée nationale. Une aubaine pour la profession qui a su dépasser les divergences de chacun pour présenter d’une seule voix quatre amendements à la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot. Fruit du travail de l’Ordre national des pharmaciens, l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF), l’Association de pharmacie rurale (APR) et du Collectif des groupements, l’un des amendements a fait beaucoup de bruit. Il s’agissait de celui proposant d’instituer un statut de « pharmacien traitant ». L’utilisation du vocable « traitant » a provoqué la colère des médecins. Première à monter au créneau, la Confédération syndicale des médecins français (CSMF) s’en est immédiatement offusquée : « Les rôles des pharmaciens et des médecins sont définis et complémentaires mais ne doivent pas être confondus. Si la nécessité d’assurer un meilleur suivi dans la délivrance des médicaments, notamment chez les patients atteints d’affections chroniques, peut justifier l’instauration d’un pharmacien désigné, la dénomination de pharmacien traitant constitue une provocation inutile que la profession médicale ne saurait tolérer ».
Comprise et admise, cette réaction épidermique a poussé les pharmaciens à redéfinir le rôle qu’ils souhaitent jouer - voire le rôle qu’ils jouent déjà - afin de trouver une appellation plus conforme. Dès le départ, la FSPF préférait parler de « pharmacien désigné ». Après réflexion, la profession s’est finalement décidée pour le « pharmacien de coordination », tandis que certains parlementaires font d’autres propositions. Ainsi, Jean-Luc Préel, député du Nouveau Centre et cardiologue de profession, parle de « pharmacien habituel » ou « désigné ».
Définition réductrice.
« N’en déplaise à ma profession, j’ai tout de suite su, en considérant les mots de pharmacien traitant, qu’on allait se mettre à dos les médecins, ce qui est compréhensible et n’a pas manqué. Le but de cet amendement est d’inscrire dans le Code de la Santé Publique ce que les pharmaciens font depuis des années. C’est important aussi pour leur assurance professionnelle. Si on se limite à la définition réductrice de distributeur détaillant de médicaments, que se passera-t-il si nous avons un jour un problème sur l’une de nos autres activités ne figurant pas dans le Code ? », s’interroge Catherine Lemorton, députée du groupe Socialiste, radical, citoyen et divers gauche (SRC) et elle-même pharmacienne à Toulouse.
Quelle que soit l’appellation qui sera retenue, le contenu de l’amendement change peu. Ce pharmacien désigné par le patient se chargerait du suivi thérapeutique. À la demande ou avec l’accord du médecin, il pourrait renouveler périodiquement des traitements chroniques, ajuster les posologies et effectuer des bilans de médications pour en optimiser les effets. Alors que de nombreux pays ont devancé la France en termes de coopérations entre professionnels de santé, il semble aujourd’hui logique de mettre en place un système équivalent dans l’Hexagone, dont la Haute Autorité de santé (HAS) serait chargée d’établir les protocoles, la nature, le champ, les conditions et les modalités.
« À titre personnel, confie au « Quotidien » Jean-Pierre Door, député UMP et médecin chef de service hospitalier, je suis très favorable à cet amendement car le pharmacien doit être véritablement reconnu comme un acteur de santé, dans le cadre du parcours de soins. Il faut donc le valoriser, ce que fait bien cet amendement en parlant de coordination des soins sur le territoire et de son rôle majeur en milieu rural ou isolé. Ce rôle est primordial pour faire face au vieillissement de la population et à la multiplication des soins et hospitalisations à domicile. Je partage ces idées avec d’autres députés UMP mais je ne peux répondre au nom de tous. En tout cas, je soutiens cet amendement à 100 % ».
L’intérêt de santé publique.
Jean-Luc Préel est également enthousiaste. « Les pharmaciens ont un rôle à jouer dans la prévention et l’éducation thérapeutique, en particulier dans les affections de longue durée. Néanmoins, ce statut de pharmacien habituel implique d’installer un espace de confidentialité dans l’officine et de modifier leur mode de rémunération qui ne peut être uniquement appuyé sur des marges commerciales. Leur rôle est d’ailleurs réaffirmé par l’arrivée de ce progrès qu’est le dossier pharmaceutique (DP) dans les pharmacies ».
Un discours qui devrait satisfaire l’Ordre national des pharmaciens. Son président, Jean Parrot, rappelle en effet que, parmi les nouvelles missions du pharmacien, celle qui consiste à évaluer ponctuellement ou périodiquement les traitements d’un patient, afin d’en optimiser les effets, va permettre, avec la généralisation du DP, « de lutter contre l’iatrogenèse par surdosage ou interactions ».
Seul hic, selon Catherine Lemorton, l’amendement prévoit qu’un décret en Conseil d’État en fixera les conditions. « J’y suis réticente, comme les syndicats de pharmaciens, parce qu’on ne peut pas savoir ce que le décret contiendra, mais nous n’avons pas le choix. Toutefois, je ne manquerai pas de demander à Mme la ministre ce qu’il y aura dans ce décret. »
Pour le moment, il reste difficile de dire si cet amendement va être adopté, en particulier les dispositions relatives au pharmacien de coordination. Jean-Luc Préel se veut pourtant confiant, soulignant que le seul problème posé concernait le vocabulaire utilisé, ce qui a été corrigé. Catherine Lemorton se félicite de son côté d’avoir convaincu tout le groupe socialiste, « en faisant valoir l’intérêt de santé publique », mais elle craint que les députés UMP soient plus dispersés. À suivre…
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