LES ÉLUS SOCIALISTES qui ont déposé leur recours devant la CJR, soupçonnent Nicolas Sarkozy d’avoir promis à Bernard Tapie, en 2007, de l’indemniser copieusement en échange de son soutien lors de la campagne électorale. La question est posée : l’engagement de M. Tapie en faveur de M. Sarkozy valait-il 285 millions d’euros ? C’eût été, de la part du candidat, payer la voix de M. Tapie, qui n’entraîne aucune foule et ne dirige aucun parti, d’une somme fabuleuse.
En tout état de cause, Mme Lagarde n’a pas suivi les conclusions de la commission d’arbitrage sans en référer au préalable au président. Lequel est pour le moment invulnérable et c’est pourquoi la ministre se retrouve sur le gril. Elle fait valoir qu’elle a agi en droit et en raison et qu’une solution judiciaire eût été très longue et peut-être plus coûteuse que celle de l’arbitrage. Elle se déclare sereine sur l’issue de l’affaire.
Il est impossible toutefois de négliger le risque que comporte le choix de Christine Lagarde, qui a d’excellentes chances d’être élue à la tête du FMI et qui, si elle était ultérieurement condamnée, devrait démissionner, ce que personne ne pardonnerait à la France après le terrible épisode du départ de Dominique Strauss-Kahn, dans les circonstances que l’on sait. L’opposition parle d’imprudence du gouvernement, ce en quoi on ne peut que l’approuver tout en constatant qu’elle a elle-même créé les conditions qui rendent imprudente la candidature de la ministre.
Une fois que ce contexte a été soigneusement établi, on remarque que, paradoxalement, personne n’est choqué de ce que, après le fiasco DSK, les Français aient le front de présenter l’une de leurs concitoyennes ; que les Européens sont unanimes à souhaiter que Christine Lagarde soit élue à la tête du FMI ; que les États-Unis n’y feraient pas objection, bien qu’ils soient informés de l’obstacle judiciaire qu’il lui reste à franchir et que les autres candidatures ne sont pas vraiment crédibles. Elles ne le sont pas pour au moins une raison essentielle qui balaie les accès de mauvaise humeur des Russes, des Chinois et d’autres pays émergents : s’il est vrai que c’était leur tour de diriger le FMI, la conjoncture exige qu’un Européen soit élu. L’action de DSK a en effet montré que le Fonds peut jouer un rôle très positif dans la gestion des crises irlandaise, grecque, portugaise et espagnole, dans la survie de l’euro et peut-être de l’Union européenne. Ce ne sont pas l’Asie et la Russie qui sont en danger, c’est l’Union. Il faut donc, maintenant, un directeur européen du FMI qui ait un calibre comparable à celui de DSK (lequel, aussitôt après sa chute, a été encensé par les employés du Fonds, à tous les niveaux de la hiérarchie, et par l’ensemble des États européens), une expérience suffisante et un minimum de leadership pour prendre, dans ces dossiers techniquement complexes, la décision politique qui convient.
Mme Lagarde réunit de tels atouts. Assurément, on ne peut pas l’absoudre avant le jugement de la CJR, qui ne sera pas connu avant un ou deux ans, alors que la crise financière européenne ne saurait attendre.
Il n’est pas interdit de se demander s’il fallait lui faire porter un fardeau qui n’est pas le sien. Le différend de M. Tapie -qui, quoi qu’il en soit, n’est pas tenu de rembourser l’argent que l’État lui a accordé- avec le Crédit Lyonnais est antérieur à l’entrée de Mme Lagarde dans le gouvernement de Jacques Chirac, puis dans celui de M. Sarkozy ; et si les petites guérillas électorales sont à la mesure d’enjeux plus importants, une condamnation éventuelle de la ministre de l’Économie ne suffirait pas à assurer la victoire de la gauche en 2012, qui dépend des facteurs économiques et sociaux.
Christine Lagarde, qui a éprouvé naguère quelques difficultés à gérer sa communication ministérielle, semble désormais au mieux de sa forme. Avec d’autres, elle a tout de même mis en œuvre une politique économique dont les résultats sont passés sous silence mais n’en sont pas moins positifs : croissance de 1 % au premier trimestre, baisse du chômage depuis quatre mois, réduction plus rapide du déficit budgétaire. Mme Lagarde a refusé récemment de parler de sortie de crise et elle a raison. Une hirondelle ne fait pas le printemps mais, sans la moindre hirondelle, c’est pire. Que ne disait-on pas il y a encore quelques mois de la gestion de la dette, du plan de relance, de l’ensemble de la politique économique et sociale de M. Sarkozy ! Qu’on l’admette ou non, les faits prouvent qu’il y a une amélioration. Dans ces conditions, qu’est-ce qui compte ? Que l’on crée un abcès autour de l’affaire Tapie ou que l’on contribue au redressement du pays ?
› RICHARD LISCIA
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